AccueilArticlesOuest Charge - Pourquoi les tarifs de la recharge augmentent… ou pas ?

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Renault Twingo électrique en charge
Renault Twingo électrique en charge

Pas une semaine ne s’écoule actuellement sans que nous parvienne une information concernant la modification tarifaire d’un réseau de recharge. A travers l’exemple de Ouest Charge, nous allons comprendre pourquoi les prix ont fortement augmenté comme dans le Finistère, mais pas dans les Côtes-d’Armor pourtant réunis dans un même maillage.

Un prix unique au départ

Avant de s’étendre à 4 départements des Pays de la Loire (Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Mayenne, et Vendée), le réseau Ouest Charge a été mis en service en 2019 à l’initiative des syndicats d’énergie de 3 départements bretons (Côtes-d’Armor, Finistère et Ille-et-Vilaine) représentés, avec le Morbihan qui avance de façon autonome, dans le Pôle Energie PEBreizh.

Youenn Huon est chargé de mission au SDEF basé à Quimper (29). A Saint-Brieuc, David Connan est adjoint à la responsable du Pôle transition et usages énergétiques du SDE22. Les deux hommes peuvent témoigner qu’à l’origine, le réseau Ouest Charge dédié au ravitaillement en énergie des véhicules électriques et hybrides rechargeables a été voulu et ouvert avec « un tarif unique pour une facilité d’usage au bénéfice des utilisateurs ». Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui.

Si les prix à l’usage peuvent donc être différents, les changements de grilles tarifaires peuvent également intervenir de façon différenciée. Le tout récent passage de 0,22 à 0,49 euro TTC le kilowattheure sur les bornes 22 kW AC, pour ne citer qu’elles, c’est dans le Finistère et en Ille-et-Vilaine. Dans les Côtes-d’Armor, tout comme dans le Maine-et-Loire dont le syndicat SIEML nous avait déjà contacté, rien ne change pour le moment au profit des usagers électromobilistes.

La situation dans le Finistère

Youenn Huon déplore le manque de clarté des premiers messages envoyés pour annoncer une augmentation des prix qui ne concernait pas tout le réseau : « Izivia a aussi justifié cette augmentation par de nouveaux investissements à réaliser pour étendre le réseau. Il y a bien des nouvelles implantations prévues. Mais c’est l’augmentation du prix de l’électricité qui est à l’origine du changement de tarif dans le Finistère ».

Avec un taux important ? « Entre 2020 et 2022, nous avons acheté à peu près au même prix notre électricité. Avec des achats à l’année, les marchés sont conclus pour 3 ans. Le dernier pour nous se terminait au 31 décembre 2022. Nous avons donc dû lancer un appel d’offres cet été, alors que les prix étaient très élevés, multipliés par 2,5 par rapport aux précédents ».

Les tarifs de l’électricité sur les marchés ont pourtant beaucoup baissé. « C’est vrai pour les prix spot avec un achat à la valeur du jour pour le lendemain. Des spécialistes ont craint les 1 500 euros au mégawattheure. C’est bien plus bas aujourd’hui ». A la date du 28 janvier 2023, le prix spot de l’électricité est de 121,48 euros le MWh. Il était inférieur à 50 euros il y a un an.

« Les syndicats d’énergie ne peuvent pas acheter aux prix spot, ils n’y sont pas autorisés. Sur les achats à terme, les prix ont beaucoup moins baissé. Notre groupement d’achat concerne les bornes de recharge du département, mais aussi l’alimentation des bâtiments publics », précise le chargé de mission au SDEF.

A prix coûtant

« Pour faire face à l’augmentation du prix d’achat de l’électricité, les élus en charge du syndicat de l’énergie ont proposé de limiter celle du réseau de recharge au prix coûtant. Mais si on compte les coûts de la maintenance et de la supervision, on n’équilibre pas », souligne Youenn Huon.

Le SDEF reste en réflexion au sujet des prix à la recharge : « Nous sommes bien conscients que les prix sont élevés par rapport à ce qu’ils étaient précédemment. Ils demeurent tout de même compétitifs par rapport à ceux du gazole. Pour une voiture électrique qui consomme 16 kWh/100 km, nous sommes encore en dessous des 8 euros pour parcourir 100 kilomètres ».

La perception de cette évolution tarifaire est différente selon l’utilisation du réseau de recharge finistérien par les électromobilistes : « Si nos bornes servent seulement d’appoint, c’est supportable pour les usagers, car l’augmentation ne représentera qu’une petite partie de leurs dépenses pour la recharge ».

Cas des usagers sans solution personnelle de recharge

Et pour ceux qui n’ont pas de solution personnelle de recharge ? « Ces automobilistes peuvent hésiter à passer à l’électrique. Dans le cadre de la réflexion sur le schéma directeur des IRVE [NDLR : Infrastructures de recharge pour les véhicules électriques], nous avons bien noté le besoin d’usage particulier pour ceux qui vivent en appartement ou des maisons de ville sans garage, et nous devons y répondre ».

Comment ? « Déjà nous avons décidé de ne pas appliquer de pénalité sur la durée de connexion aux bornes 22 kW AC. Ce qui évite aux utilisateurs de se lever éventuellement en pleine nuit pour venir débrancher leur voiture. C’est un usage résidentiel, comme s’ils rechargeaient chez eux ».

Peut-être un tarif préférentiel ? « Nous y réfléchissons, mais n’avons pas encore pris de décision. Cette augmentation du prix de l’électricité est la première difficulté majeure à laquelle nous sommes confrontés. Des aides ont été distribuées pour faire face à la hausse des prix des carburants, mais pas pour la recharge. Un tarif spécifique à un usage de type résidentiel serait une solution possible. Par exemple à travers la recharge de nuit ».

La situation dans les Côtes-d’Armor

Dans les Côtes-d’Armor, le calendrier n’est pas le même que dans le Finistère. Il n’y a pas eu d’augmentation du prix de la recharge aux bornes installées par le SDE22. Elle risque cependant d’arriver dans quelques mois, mais pas avant le printemps. « Nous menons actuellement une réflexion pour revoir notre tarification. Nous allons nous baser sur le bilan d’exploitation du service pour définir quel modèle économique adopter », explique David Connan.

Avec des préoccupations particulières ? « Nous souhaitons déjà conserver l’attractivité de la recharge à nos bornes. Elle demeure d’ailleurs chez nos voisins qui viennent de procéder à une augmentation des prix, si on les compare avec ceux des carburants ». Le SDE22 a fait un choix particulier pour son électricité : « Nous avons opté pour le renouvelable à travers un lot à haute valeur environnementale. Le prix est un peu plus élevé, mais reste bien placé ».

Comme Youenn Huon, David Connan évoque des coûts d’exploitation avec une part variable et une part fixe : « Cette dernière est plus importante sur les bornes qui ne sont pas beaucoup utilisées. L’usage diffère selon le cadre, rural ou touristique, des implantations. Le département des Côtes-d’Armor est médian à ce sujet ».

Le fameux bouclier tarifaire

« Fin octobre, Emmanuel Macron a annoncé un bouclier tarifaire. Nous pensions donc pouvoir ne pas répercuter sur le prix de la recharge la hausse à laquelle le SDEF était confrontée », révèle Youenn Huon.

Ce dispositif permettrait de revoir les prix à la baisse sur les bornes du Finistère. « Nous espérons bien qu’il va arriver, et nous comptons même dessus pour maintenir un service essentiel afin de se déplacer en véhicule électrique, notamment dans le cadre de l’itinérance de la recharge. Ce ne sera d’ailleurs peut-être pas facile à mettre en place concrètement. Mais ce bouclier est important et cohérent pour la filière ».

Au SDE22, un doute demeure : « Tarif de vente réglementé ou bouclier tarifaire ? Emmanuel Macron a annoncé l’un, puis l’autre ensuite. Les conséquences ne seraient pas les mêmes pour nous. S’il s’agissait d’un tarif réglementé, les utilisateurs en bénéficieraient à travers une offre. Là, nous n’aurions plus le choix sur la provenance de la production électrique. L’action serait différente avec un bouclier tarifaire qui visera à compenser un surcoût à l’achat, en agissant sur des taxes ».

Une fréquentation en constante augmentation

« En 2022, sur notre réseau finistérien, nous avons enregistré une moyenne de 300 recharges annuelles par borne, avec des disparités importantes, de 50 à 1 800 opérations. Ces chiffres ont doublé par rapport à 2021. Ils avaient déjà été multipliés par 2 à l’exercice précédent », communique Youenn Huon.

Les Côtes-d’Armor connaissent une évolution similaire. « Nous avons enregistré 61 795 recharges en 2022. Ce qui donne une moyenne de 327 par borne. Nous en comptons aujourd’hui 189 sur notre réseau. Les chiffres ont aussi doublés chez nous. En 2021, 31 005 recharges avaient été réalisées. En 2020, c’était 19 251 », aligne de son côté David Connan.

Pour coller à cette hausse de fréquentation, et « suivre le développement du nombre de véhicules électriques », le SDE22 et le SDEF vont continuer à étendre leurs réseaux. Le syndicat des Côtes-d’Armor prépare d’ailleurs une action de communication sur la mobilité pour début février.

Des réseaux qui s’étendent

Quelques chiffres nous ont été livrés pour les Côtes-d’Armor par David Connan : « Nous avons en projet de mettre en service 20 nouvelles bornes dans le courant de l’année, dont 10 sont déjà en cours de développement et 5 seront des superchargeurs 184 kW ». Pour le Finistère aussi, 2023 apportera quelques nouveautés, à commencer par « l’intégration à Ouest Charge des bornes du réseau de Brest Métropole », représenté également dans le pôle PEBreizh.

« Le maillage du SDEF compte actuellement 300 bornes de recharge. Nous avons prévu d’en ajouter 1 000 à 1 200 d’ici 2030. Il y a un vrai besoin dans les zones résidentielles, et les zones touristiques près du littoral. Nous comptons aussi sur les aménageurs privés », dévoile Youenn Huon.

Avec des particularités ? « Nous allons développer un mix, pour moitié avec des bornes 22 kW AC plus particulièrement destinées à un usage collectif et résidentiel, et pour le reste en 24 kW DC pour la recharge à destination dans les centres-bourgs et centres-villes. Les 4 chargeurs 50 DC les plus exploités seront remplacés par des modèles 180 kW. Ils seront mis en service sur les axes Quimper-Lorient et Brest-Morlaix ».

Ajout du 7 février 2023

En réaction à la première phrase du paragraphe intitulé « La situation dans le Finistère », Izivia tient à apporter cette précision que nous vous livrons précisément : « Izivia étant seulement l’exploitant du réseau Ouest Charge, ce sont bien les syndicats d’énergie propriétaires du réseau Ouest Charge qui fixent les prix de la recharge et non Izivia. De la même façon, la communication sur l’augmentation des tarifs est à la main des syndicats concernés, le rôle d’Izivia en tant qu’exploitant étant seulement de relayer les messages définis à l’avance par Ouest Charge ».

La demande initiale de l’opérateur était de supprimer ce passage. Journalistiquement, ce n’est pas une option souhaitable. En revanche, y répondre en la reproduisant fidèlement l’est davantage. Ce faisant, nous respectons la citation de la personne interviewée, le souci de communication du demandeur, et nos lecteurs qui ont accès à la nature exacte de la sollicitation.

Automobile Propre et moi-même remercions beaucoup Youenn Huon et David Connan pour leur disponibilité.

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Avis de l'auteur

L'idée de ce nouvel article concernant le réseau Ouest Charge est née après que nous ayons reçu un message de Youenn Huon l'invitant à le contacter. En parallèle, il nous avait été signalé que, dans les Côtes-d'Armor, des électromobilistes, pourtant pas concernés par l'augmentation des tarifs, vivaient mal les annonces effectuées par l'opérateur du grand maillage breton et ligérien. Nous avons donc sollicité David Connan à ce sujet. Tout comme nous avions déjà particulièrement apprécié d'être contactés par le SIEML à la suite du premier article consacré à l'augmentation des prix sur le réseau Ouest Charge, nous remercions pour leur confiance les représentants du SDEF et du SDE22. En espérant avoir bien respecté leur souhait de communication. Il manque toujours un retour et éclairage. Et il est majeur. Il concerne ce fameux bouclier tarifaire de la recharge, très important pour ceux dont la mobilité électrique dépend entièrement des bornes implantées dans l'espace public. Hélas, je n'ai plus mon ancien Kangoo Elect'Road, auparavant confié par Renault au service du courrier de l'Elysée, pour aller chercher la réponse à la source.

Philippe SCHWOERER

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