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Voitures électriques : pourquoi la puissance de la carte grise ne correspond pas à la puissance annoncée ?

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De nombreux conducteurs ont remarqué que la puissance indiquée sur la carte grise de leur voiture électrique ne correspond pas aux promesses officielles. On fait le point sur sa signification.

Pour calculer la puissance administrative d’une voiture (cv), l’administration retient la puissance nette maximale, exprimée en kilowatts (kW) et non pas en chevaux (ch). Cette puissance nette, indiquée à la case P.2 de la carte grise d’un véhicule, correspond à la puissance qu’une chaîne de traction est capable de produire pendant 30 minutes.

Si celle-ci est très généralement équivalente à la puissance maximale indiquée pour un moteur thermique, elle diffère avec une voiture électrique. Et pour cause : si la puissance maximale correspond à ce que la voiture peut produire dans le meilleur des cas, la puissance nette dépend de très nombreux facteurs, qui donne un aperçu sur l’endurance des équipements électriques sous la contrainte. En fonction des choix techniques retenus, tous les véhicules électriques ne sont donc pas logés à la même enseigne. Pire encore, l’apport du moteur électrique passe à la trappe sur les véhicules hybrides rechargeables, qui ne laissent finalement apparaître que la puissance annoncée du moteur thermique ! On fait le point sur le sujet avec notre base de données.

Rappel technique

Dans une voiture thermique, le moteur produit un certain niveau de couple mécanique en fonction de son régime de rotation. Le produit des deux valeurs donne la puissance moteur, et c’est la valeur maximale obtenue sur l’ensemble de la plage d’utilisation qui est retenue pour les fiches techniques. Très généralement, et hors technologies électrifiées, cette dernière correspond à la puissance nette maximale objet de ce sujet. On va y revenir.

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Contrairement à la croyance populaire héritée des voitures thermiques, les machines électriques ne produisent pas de puissance. Leur rôle est de convertir en énergie mécanique la puissance électrique envoyée par la batterie et de la délivrer aux roues. La puissance est donc limitée par le maillon faible de la chaîne, très généralement la batterie. Par exemple, sur les voitures sportives, à l’image des Lucid Air Sapphire ou Maserati GranTurismo Folgore, les machines peuvent délivrer un niveau de puissance supérieur à celui de la batterie. La puissance finale retenue sera donc celle que la batterie peut effectivement produire.

À l’instar d’un moteur thermique, c’est la plus haute valeur que peut produire le système qui est retenue sur les fiches techniques. Il arrive aussi parfois que ces dernières indiquent les pics de puissance maximale obtenus avec un Overboost. Dans tous les cas, il s’agit d’un pic disponible sur une durée assez courte. Cependant, et c’est là que la voiture électrique se différencie de la voiture thermique, la puissance produite par la batterie dépend de nombreux facteurs, dont le taux de charge et la température des cellules de la batterie. En fonction de l’utilisation qui en est faite, la puissance maximale peut ne pas être atteinte. Voilà pourquoi de nombreux constructeurs n’hésitent pas à poser des réserves. C’est le cas de Volkswagen par exemple : pour la puissance maximale d’une GTX (250 kW/340 ch), la marque ajoute que la puissance maximale est disponible « en cas de batterie haute tension à une température comprise entre 23 et 50°C et un niveau de charge supérieur à 88 %. La puissance maximale peut être utilisée pendant 30 secondes maximum ». Pour l’anecdote, seules cette version à quatre roues motrices et ses autres déclinaisons (Audi Q4 Quattro, Skoda Enyaq RS, …) sont concernées par cette note.

Comment est calculée la puissance nette maximale ?

Le champ P.2 indiqué sur la carte grise désigne la puissance nette maximale, exprimée en kW, que peut délivrer une chaîne de traction. Celle-ci est obtenue à la suite d’une procédure d’homologation obligatoire, que les constructeurs doivent réaliser en respectant le protocole définit par le règlement n°85 de l’ONU. Pour faire simple, le fabricant doit faire tourner sur un banc de mesure l’ensemble de la chaîne de traction (accompagnée de ses composants nécessaires à son bon fonctionnement) à sa puissance maximale et sur une durée de 30 minutes, avec une température de 25 °C. Pour ce faire, c’est au constructeur de définir en amont le régime de rotation optimal pour obtenir la meilleure puissance possible.

Sachant qu’il est très rare qu’un moteur thermique s’essouffle au cours de l’exercice (ce qui explique qu’il n’y a généralement pas de différence entre la puissance maximale annoncée et la puissance nette maximale P.2), les choses diffèrent avec une voiture électrique. Car en fonction des choix techniques retenus par les fabricants, la batterie, les onduleurs et les machines électriques peuvent ne pas produire le niveau maximal de puissance sur toute la durée de la mesure. La chaleur produite par l’activité de la chaîne de traction, entre autres raisons techniques (prudence du système de gestion électronique, …) peut donc entraîner la chute de la tension, et donc la puissance totale produite par le système. Ainsi, la puissance nette maximale d’une voiture électrique correspond à « la moyenne de la puissance calculée sur une durée de 30 minutes » selon le règlement de l’ONU, à la ligne 5.3.2.3 du document.

Quel est le niveau de perte moyen ?

Avec une voiture électrique, la puissance nette maximale est donc systématiquement plus faible que la puissance maximale annoncée par le constructeur, qui correspond à un pic plus ou moins fugace, rappelons-le. Elle permet donc de donner un aperçu sur les performances d’une chaîne de traction et sur son endurance sous la contrainte. Pour imager, c’est le même phénomène qui se produit en recharge rapide : si le pic de puissance annoncé est élevé, la puissance moyenne sur un exercice de recharge est forcément plus faible, et parfois bien éloignée de ce que le pic peut laisser supposer en matière de performance.

Dans les deux cas, toutes les voitures ne sont pas logées à la même enseigne. C’est ce que nous avons noté au fil de nos différents essais poussés, et principalement dans le cadre d’un Supertest où nous consignons le maximum de données dans notre base. De manière générale, sur une quarantaine de voitures électriques pour lesquelles nous avons enregistré la carte grise, la différence entre la puissance maximale indiquée par le constructeur et la puissance nette maximale homologuée est de -54,8 %. Autrement dit, à pleine charge pendant une demi-heure, la puissance nominale des systèmes de propulsion électriques est deux fois moins importante que le pic annoncé par les brochures. La perte absolue est de 113 kW/154 ch en moyenne.

Cependant, il convient de lire entre les lignes, car toutes les voitures ne se ressemblent pas, avec de très bons élèves et des nettement moins bons. On retrouve en première position chez nous le Subaru Solterra AWD qui, avec 42 kW de moins entre le pic annoncé (160 kW/218 ch) et la puissance P.2 (118 kW/161 ch), ne présente qu’un écart de -26,3 %. Avec une perte de -33,8 % et de -36,5 %, les Peugeot e-3008 et MG 5 Autonomie Étendue complètent le podium.

A contrario, plus la puissance en pic est élevée, plus la perte est importante au bout des 30 minutes. C’est ce que révèlent les cartes grises des Audi e-Tron GT RS (-67,7 %), BYD Seal (-69,6 %) et Maserati GranTurismo Folgore (-74,8 %). Les deux sportives affichent par ailleurs la plus grosse perte absolue avec 419 kW/570 ch de moins pour l’Italienne et 298 kW/405 ch de moins pour l’Audi ! Si les conception et architecture sont différentes, les deux voitures partagent les mêmes cellules LG E66a, ainsi que la même puissance nette maximale d’à peine plus de 140 kW soit… 192 ch.

En attendant notre outil permettant de trier les voitures enregistrées dans notre base, voici un classement de quelques voitures électriques du marché en fonction de la puissance nette relevée sur leur carte grise respectives :

Puiss. pic annoncé (kW/ch)Puiss. nette P.2 (kW/ch)Écart (kW/ch)Écart (%)
Tesla Model 3 GA Highland293/398153/208-140/-190-47,8
Audi RS e-Tron GT440/598142/193-298/-405-67,7
Maserati GranTurismo Folgore560/761141/192-419/-569-74,8
BMW iX xDrive50385/523140/190-245/-333-63,6
Subaru Solterra160/218118/161-42/-57-26,3
Mercedes EQE 350+215/292109/148-106/-144-49,3
Peugeot e-3008157/213104/141-53/-72-33,8
BYD Seal230/31370/95-160/-218-69,6
Cupra Born VZ XL170/23070/95-100/-135-58,8
Volkswagen ID.3 Pro204/15070/95-80/-109-53,3
MG 4 Luxury204/15068/92-82/-112-54,7
Peugeot e-208 GT115/15662/84-53/-72-46,1
Hyundai Ioniq 6168/22956/76-112/-153-66,7
Renault Scenic e-Tech GA160/21855/75-105/-143-65,6
Renault Twingo e-Tech60/8131/42-29/-39-48,3
 

Il n’y a pas de quoi s’alarmer

Si vous prêtez attention à la carte grise de votre véhicule, il ne faudra donc pas vous estimez trompé par le constructeur concernant la puissance de votre voiture. Les pertes lors de ce test d’homologation avec les véhicules électriques sont physiques et donc systématiques. En revanche, cela peut donner une vague indication sur les performances du système de refroidissement de la voiture et de l’endurance de ses composants sous la contrainte. Et on insiste sur la notion.

Car si la puissance homologuée peut être divisée par deux par rapport au pic indiqué sur la fiche technique, ces conditions n’existent pas dans la vraie vie, où il est parfaitement impossible de maintenir la pleine charge pendant 30 minutes, et encore moins dans les strictes conditions fixées par l’ONU. Même en cas d’usage intensif, il n’est donc pas tout à fait certain de pouvoir diviser la puissance par deux. Preuve en est avec nos essais : malgré le rythme imposé, la GranTurismo Folgore a toujours délivré le niveau de puissance maximale annoncé lorsque nécessaire.

Pour mesurer l’endurance des performances de la chaîne de traction, nous préférons effectuer des reprises (80-120 km/h) à 80 %, 50 % et 20 % de charge. Cela permet de donner un aperçu plus proche de la réalité sur l’endurance d’une voiture électrique utilisée normalement. Pour information, sur la quarantaine de voitures enregistrées dans notre base de données à ce jour, nous notons en moyenne une perte de 0,7 s (-11,9 %) entre une mesure réalisée à 80 % de charge et une autre à 20 %. Autrement dit : la plupart des chaînes de traction actuellement disponibles sur le marché sont suffisamment endurantes pour assurer le même niveau de performance dans la plupart des situations.

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