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Un rapport parlementaire présenté le 20 mars est catégorique : la voiture électrique ferait perdre plusieurs dizaines de milliards d’euros à l’état à l’horizon 2040. Une analyse largement partagée dans les médias, mais peu contrastée. En effet, elle ne considère aucun des avantages sanitaires et économiques que la transition pourrait apporter.
Les grands changements font peur. La révolution technologique qu’incarne le passage de la mobilité carbonée à la mobilité « propre » n’échappe pas aux angoisses habituelles. S’il est légitime d’analyser les différentes options pour changer de paradigme, l’urgence climatique et sanitaire impose de ne pas traîner.
Un long rapport de la députée Huguette Tiegna et du sénateur Stéphane Piednoir remis le 20 mars explore « Les scénarios technologiques permettant d’atteindre l’objectif d’un arrêt de la commercialisation des véhicules thermiques en 2040 ». Un document qui reconnaît la nécessité de la transition tout en interpellant sur la baisse des recettes fiscales liées à la vente d’hydrocarbures.
En effet, les parlementaires estiment que la diminution des revenus tirés de la Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) aura un « impact important » sur le budget de l’Etat et des collectivités territoriales. Cette taxe devrait rapporter 37,7 milliards d’euros en 2019, dont les bénéfices sont partagés entre l’état à 45,1%, les collectivités à 32,6%, une enveloppe dédiée à la transition énergétique à 20,1% et enfin l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) à 3,2%.
Un coût à associer à celui du développement de l’infrastructure nécessaire à la recharge. Le rapport explore trois scénarios : le premier « médian » imagine qu’à l’horizon 2040 les batteries disposeront d’une densité énergétique de 210 Wh par kg (en 2018, elles affichaient en moyenne 130 wh/kg) et coûteront 120 euros par kWh contre 230 euros/kWh en 2018. Le second « pro-batterie » projette l’hypothèse d’une forte progression technologique ou les batteries disposent d’une densité de 300wh/kg et coûtent seulement 50 euros/kWh. Enfin, le troisième explore une toute autre technologie : l’hydrogène.
Selon le rapport, le coût de développement de l’infrastructure du scénario « médian » oscillerait entre 30,7 et 100,6 milliards d’euros. Une très vaste fourchette que l’on retrouve aussi sur les autres pistes : entre 32,8 et 108 milliards d’euros pour le scénario « pro-batterie » et entre 42 et 103,9 milliards d’euros pour le scénario « pro-hydrogène ».
Sur 20 ans, « le coût [total] de la décarbonation du parc automobile français serait avec toutes les précautions d’usage de l’ordre de 500 milliards d’euros » estime t-il. Si le document parvient à chiffrer les pertes, il omet cependant d’évaluer les gains potentiels. Et il y en a !
Selon une enquête sénatoriale publiée en 2015, les conséquences de la pollution de l’air coûteraient 101,3 milliards d’euros chaque année. Une pollution qui affecterait principalement la santé mais également les bâtiments, la biodiversité et même l’agriculture. Le rendement des champs de blés franciliens seraient ainsi inférieurs de 10% par rapport à une exploitation située en région non-polluée. « La pollution de l’air n’est pas qu’une aberration sanitaire, c’est aussi une aberration économique » alarmaient les sénateurs.
Un enjeu crucial que le rapport parlementaire sur la transition vers des véhicules plus propres aborde assez légèrement. Il se contente de citer les résultats d’études sanitaires sans jamais chiffrer les pertes financières. Le document rappelle ainsi que plus de 480.000 décès en Europe dont 47.000 en France sont imputables à la mauvaise qualité de l’air, en plus de nombreuses pathologies. Le bruit généré par les moteurs à explosion est également pointé du doigt.
Le rapport n’évalue pas non plus la possibilité d’adapter la TICPE à la transition. Pourquoi ne pas taxer à terme l’électricité consommée par les voitures électriques en charge sur les bornes rapides et accélérées ? Un revenu qui pourrait être conséquent, sans atteindre celui de la TICPE actuelle.
Dans un scénario où l’électricité délivrée aux bornes publiques est taxée à hauteur de 0,02 euros/kWh et ou 16 millions de voitures électriques (50% du parc) rechargent 10 kWh quotidiennement, la TICPE « du futur » pourrait rapporter environ un milliard d’euros chaque année. Dans tous les cas, difficile de douter sur l’inventivité de l’état pour trouver les mécanismes qui permettront de compenser la baisse des taxes liées à la vente d’hydrocarbures.
En terme d’emploi et d’industrie, la transition peut également être source de bénéfices pour le pays. Combien d’emplois et de revenus seront générés par le futur « Airbus de la batterie », par la fabrication et l’entretien des bornes de recharge, le recyclage des accumulateurs et le développement d’un florilège de services liés à l’automobile électrique ? Même si environ 25% des emplois dans l’automobile pourraient être perdus à terme, un véhicule électrique étant plus facile à assembler qu’un véhicule thermique, de nombreux postes devraient émerger dans d’autres secteurs. A titre d’exemple, plus de 3000 employés travaillent au sein de la Gifactory 1 de Tesla dans le Nevada. En France, plus de 440.000 personnes sont salariées dans le secteur automobile, motoristes, équipementiers et carrossiers inclus.
Reste à voir comment le rapport parlementaire sera interprété et quelles décisions seront actées en conséquence. De nouvelles taxes pourraient apparaître lorsque le parc de véhicules électriques aura atteint un niveau significatif. On devrait également davantage entendre parler des industries liées à l’écosystème de l’automobile décarbonée, aujourd’hui embryonnaires. L’engouement du Président de la République pour la création d’un géant européen de la batterie montre en tout cas que l’enjeu est considéré. Rendez-vous en 2040 !
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