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Alors que la contestation populaire exprimée initialement contre la hausse des taxes sur le carburant s’est rapidement transformée en ras-le-bol fiscal général, la question de la stratégie à adopter dans les mois et les années à venir se pose. Objectif : éviter une nouvelle fronde des automobilistes face à une problématique annoncée de longue date et dont il devient urgent de se saisir collectivement : la réduction drastique de la dépendance au pétrole dans le transport.
Entre d’un coté la colère de celles et ceux qui ont le sentiment d’avoir été pris au piège en achetant une voiture diesel à crédit ces 3 dernières années ou qui n’ont pas eu beaucoup d’autre choix étant donné l’offre d’occasion à petit prix et de l’autre, l’exaspération de ceux qui depuis plusieurs années mettent un point d’honneur à organiser leur vie afin de limiter leur dépendance au pétrole, la France se retrouve divisée à un moment où elle aurait besoin d’être réunie et plus que jamais solidaire pour aborder sereinement la fin annoncée du tout pétrole dans le transport.
Dans un cas comme dans l’autre, la frustration est grande car au bout du compte, on a une nouvelle fois le sentiment que les décisions politiques sont dictées par l’urgence du court terme au détriment du long terme. Résultat : jamais le décalage entre l’offre de véhicules d’occasion à petits prix et la réalité des besoins n’a jamais été aussi décalée. Et vu la part croissante que représentent les SUV à pétrole dans le total des ventes de voitures neuves, la situation n’est malheureusement pas prête de s’arranger dans les années à venir.
On ne le répétera jamais assez : plus que jamais, les acheteurs de voitures neuves – LLD inclus – ont une responsabilité particulière dans le sens où ils participent indirectement à structurer l’offre future du parc de véhicule d’occasion. Considérant que l’acheteur de véhicule d’occasion n’a pas d’autre choix possible que de trouver son bonheur parmi l’offre de véhicules déjà immatriculés, c’est bien aux acheteurs de véhicules neufs et à eux seuls que revient la lourde responsabilité d’améliorer l’efficacité énergétique du parc roulant au fur et à mesure que l’offre constructeur s’enrichit en véhicules sobres.
Problème : depuis plusieurs années déjà, les acheteurs de voitures neuves – que ce soit des particuliers ou des entreprises – font rarement du critère environnemental une priorité.
Résultat : dans 5 ans, le marché de l’occasion sera toujours relativement pauvre en véhicules électriques d’occasion. Le constat sera un peu moins rude s’agissant de l’hybride compte tenu des volumes écoulés ces dernières années, tout en restant très inférieur à l’offre disponible en véhicule thermique à petit prix.
Plutôt que de continuer à donner la parole à des gens mal informés qui défendent la théorie du complot et continuent à croire, à tort, que la technologie seule pourrait répondre à leur problème, qu’attendent les médias pour donner la parole à celles et ceux qui, quelque soit leur niveau social, n’ont pas attendu que les prix à la pompe augmentent pour réduire d’eux même leur dépendance au précieux fluide ?
Vélo, vélocargo, train, covoiturage, scooter électrique, Twizy, voiture électrique, citadine à essence alimentée partiellement à l’E85, transport collectif + torttinette électrique, voiture + vélo pliant : à l’heure où les alternatives au tout voiture partout tout le temps n’ont jamais été aussi nombreuses et financièrement accessibles, que font les médias pour aider celles et ceux qui en réalité ont d’autre choix possible que la solution du tout voiture dans laquelle ils sont installés depuis des années, bien aidés par le matraquage publicitaire incessant en faveur du dernier SUV à pétrole du moment qui transpire le monde d’hier ?
Que font les décideurs, tant à l’échelle nationale qu’au niveau local, pour inciter réellement la population à préférer la sobriété et l’efficacité énergétique plutôt que la gabegie organisée et les vieilles habitudes du passé ?
Face à l’ampleur du défi, les solutions pour sortir de l’impasse nécessitent plus que jamais une mobilisation de l’ensemble des acteurs. La responsabilité des individus se limitant à préférer les solutions qui répondent le mieux à leurs besoins tout en prenant soin de vérifier qu’elles apportent d’une manière ou d’une autre un début de réponse aux enjeux à venir.
Si les mesures prises par le gouvernement au nom de la transition énergétique ont été très critiquées par l’opposition ou par les gilets jaunes, ce n’est pas uniquement à cause du sentiment d’injustice et de ras-le-bol fiscal auxquelles elles sont associées. En réalité, cette colère est d’abord et surtout la conséquence d’un manque criant de courage et de vision des gouvernements en place ces 15 dernières d’années. Des décideurs qui n’ont cessé de privilégier le court terme au détriment du long terme. Assumant tour à tour le versement de bonus écologique y compris pour l’achat de petites voitures diesel dépourvues de filtre à particules ou encore le renoncement de la taxe poids lourds et ses conséquences désastreuses pour le pays, les gouvernements successifs ont leur part de responsabilité dans le désarroi et la colère qui s’expriment dans la rue et les médias ces dernières semaines.
Une autre raison à cette colère, c’est le manque de cohérence. Entre d’un coté un gouvernement qui annonce vouloir engager des réformes courageuses en faveur de la transition énergétique et de l’autre un manque d’ambition manifeste pour obliger les constructeurs automobiles à commercialiser des produits qui répondent vraiment aux enjeux actuels et à venir.
Pour mémoire, souvenons-nous qu’en 2012, le ministre de l’industrie de l’époque, aux cotés de Renault et de PSA, promettaient de faire de la voiture à 2L/100km, une priorité pour 2020. Lorsque l’on voit ce qui constitue le gros des ventes de voitures neuves à ce jour, difficile d’imaginer comment un tel objectif pourrait être tenu, même avec quelques années de retard ?
Au risque de déplaire à une majorité de français, l’autre difficulté à laquelle la société française dans son ensemble est confrontée c’est l’addiction forte à la vie à crédit : addiction au pétrole et à l’énergie nucléaire, addiction à la voiture partout tout le temps (congestion, pollutions, accidentologie, etc…), addiction à la maison individuelle qui grignotte inexorablement les terres agricoles et accélère le déclin de la biodiversité, addiction aux subventions et au prix artificiellement bas de l’énergie, addiction au toujours plus de services publics, etc…
Une réalité inaudible par les très nombreux ménages qui peinent à boucler leur fin de mois dès que le prix de l’énergie augmente mais qui pourtant est difficilement contestable pour qui fait l’effort de regarder objectivement la situation. Une réalité devant laquelle les décideurs ont aussi leur part de responsabilité tant qu’ils continueront à désigner à tort la croissance comme une solution alors qu’elle est devenue au fil du temps un problème.
Face à cette situation, il y a plus que jamais urgence à sortir du déni et regarder enfin la réalité en face : avec ou sans taxe carbone, la transition énergétique est une question dont la société française aurait du se saisir depuis plusieurs années déjà pour anticiper les difficultés actuelles et surtout à venir.
Pour éviter que la transition énergétique ne se transforme en déclin énergétique, les ménages aisés ont une responsabilité particulière devant l’histoire : cesser d’entretenir le mythe du toujours plus qui accentue les inégalités et montrer qu’une autre croissance est possible. Une croissance synonyme de mieux avec moins. Une croissance qui ne se fait pas sur le dos de ceux qui ont peu ou pas assez et qui pour pouvoir faire mieux ont besoin d’un peu plus. Il y a urgence…
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