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L’émergence de la voiture électrique induit de profonds changements dans notre rapport à l’automobile. Jusqu’à la fréquence de renouvellement ?
En s’inscrivant à marche forcée dans la transition électrique, les constructeurs sont-ils malgré eux en train de tuer la poule aux œufs d’or ? On sait déjà qu’une voiture électrique est de conception plus simple qu’une voiture thermique, qu’elle fait appel à beaucoup moins de pièces, et qu’elle est théoriquement plus fiable. Ce qui induit avantages et inconvénients : d’un côté des voitures moins chères à concevoir et à construire (c’est essentiellement le coût des batteries qui plombe pour le moment le prix final), de l’autre des revenus liés à l’entretien qui fondent comme neige au soleil – sauf cas particulier bien sûr.
Un autre effet de bord risque à terme de ne pas faire les affaires des constructeurs : qui dit voitures plus simples dit logiquement voitures plus fiables, et donc théoriquement plus durables.
Tout un faisceau d’arguments plaide en la faveur d’une plus grande longévité des VE : moins de pièces mécaniques et en mouvement, une utilisation beaucoup moins fréquente des freins en raison d’un puissant frein moteur au lever de pied (freinage régénératif), et souvent une conduite apaisée qui induit également une moindre usure des pneumatiques (à part les cas particuliers induisant quelques burns sauvages en Tesla ou Taycan). Ajoutez à cela des moteurs électriques quasi inusables puisque pour un usage dans la moyenne (soit 20 000 km par an), un moteur pourrait fonctionner parfaitement pendant plus de 50 ans.
Enfin, côté batteries, selon le Guide de l’énergie EDF, la longévité moyenne d’une batterie est de 1 000 à 1 500 cycles de recharge. Ce qui équivaut à 200 000 à 500 000 km environ, selon l’utilisation de la voiture. Pour un véhicule roulant 20 000 km par an, la batterie peut donc durer entre 10 et 15 ans. Mais on sait que Tesla annonce des chiffres encore beaucoup plus ambitieux pour ses nouvelles batteries 4680 dont certaines cellules pourraient tenir plus de 15 000 cycles de charge, ce qui équivaudrait à environ 3,5 millions de kilomètres.
Du côté des conducteurs, différentes études statistiques montrent que la distance moyenne annuelle parcourue en voiture est environ de 15 000 kilomètres (de 12 000 à 17 000 selon les sources et selon l’énergie utilisée, essence, diesel ou électrique). Le calcul est simple : avec une voiture capable d’atteindre sans problèmes majeurs 500 000 kilomètres, il serait possible de la garder 33 ans avant qu’elle soit définitivement bonne pour la casse. Quand on sait que l’âge moyen auquel on passe le permis est de 19 ans (vous pensiez plus ? Moi aussi), et en supposant que l’on achète une voiture dès celui-ci obtenu, celle-ci pourrait nous accompagner jusqu’à presque 55 ans… âge moyen de l’achat d’une voiture neuve en France ! Rappelons au passage que la durée moyenne actuelle de vie d’une voiture en France est de 9,4 années, et que les Français gardent leur voiture pendant près de six ans.
Bien sûr, tout cela n’est que prospective, mais de nombreux éléments peuvent laisser penser que cela pourrait devenir une tendance. Car les mentalités et les usages changent. La voiture est de moins en moins un marqueur social et de plus en plus un objet à visée purement utilitaire, permettant de déplacer des personnes et des marchandises d’un point A à un point B. Les notions de plaisir, de voyage, d’indépendance, de liberté individuelle… et de frime sont de plus en plus étrangères aux nouveaux conducteurs, pour qui la bagnole est avant tout une contrainte obligée. Et coûteuse.
Une clientèle qui entend dépenser de moins en moins dans un « déplaçoir », qui investit dans les mobilités douces, et dont le budget est davantage préempté par le logement et les dépenses liées au numérique. Il y a aussi les préoccupations environnementales, qui plaident en faveur de la durabilité et contre l’obsolescence, qu’elle soit programmée ou naturelle (usure). Bref, on peut se demander si changer de voiture tous les trois ou cinq ans aura encore un sens dans les prochaines décennies.
C’est ici que la voiture électrique a aussi son rôle social à jouer, de par la longévité qu’elle promet. Si l’on ajoute à l’équation le fait que les VE vont être capables de plus en plus fréquemment de recevoir des mises à jour leur permettant d’intégrer régulièrement des améliorations et donc de rester tant bien que mal à un niveau technologique satisfaisant, il devient envisageable qu’il en soit avec elles comme il en est de l’acquisition d’un bien immobilier : un achat pour la vie.
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