AccueilArticlesL’histoire derrière la première borne rapide entre Rennes et Nantes, 12 ans après

L’histoire derrière la première borne rapide entre Rennes et Nantes, 12 ans après

La suite de votre contenu après cette annonce

De G. à D. : Jérôme Fresnay, Nathalie et Cyril Gourdon
De G. à D. : Jérôme Fresnay, Nathalie et Cyril Gourdon

À l’époque où quelques syndicats de l’énergie commençaient à développer des réseaux de recharge pour véhicules électriques, Nissan voulait booster sa Leaf en nouant des accords avec de grandes surfaces. Au printemps 2013, la mise en service de deux bornes dans la commune rurale de Grand-Fougeray (35) relève de l’exception. Douze ans après les premières discussions entre le couple de gérants atypiques et le constructeur, l’offre s’est bien améliorée, sans lui.

Préambule

J’ai déjà sollicité plusieurs fois des dirigeants de magasins sous diverses enseignes afin de recueillir leurs témoignages sur leurs programmes d’installation en bornes de recharge pour véhicules électriques sur leurs parkings. Le plus souvent sans suite. Quand il y en avait une, c’était toujours avec un retour très axé business. Ce qui n’a rien de surprenant et n’est pas forcément négatif non plus.

En revanche, en entrant en contact avec Nathalie et Cyril Gourdon du U Express de Grand-Fougeray, en Ille-et-Vilaine, c’est la première fois que je tombe sur des gérants aussi sensibles, ouverts à la mobilité durable, serviables autant pour les clients habituels que pour des inconnus de passage, et confiants à mon égard en délivrant leur témoignage.

Sur ce dernier point, je peux en particulier remercier chaleureusement Jérôme Fresnay qui a joué le rôle d’intermédiaire pour préparer la rencontre. Elle s’est déroulée le mercredi 22 mai 2024, alors que j’accompagnais le pionnier de l’électromobilité sur la route du retour. Il venait de retrouver sa Citroën C-Zero confiée à Revolte à la suite d’une panne bloquante.

Les bornes Nissan

C’est sans doute peu connu chez les néo-électromobilistes, mais Tesla n’a pas été le seul constructeur à vouloir déployer un réseau de recharge pour véhicules électriques avec son nom sur les bornes. Nissan l’a fait aussi pour pousser les ventes de sa compacte électrique Leaf. Souvent en s’associant avec des enseignes. Ainsi Auchan et Ikea.

Les chargeurs n’étaient pas réservés aux seuls clients de la marque nippone ni des magasins, mais il y avait tout de même au moins une condition à réunir, si ce n’est deux. La première était de disposer du bon sésame. À l’époque, c’était le KiWhi Pass, ou badge dérivé s’appuyant sur lui. Seconde précaution : il valait mieux rouler avec une voiture électrique équipée d’un connecteur CHAdeMO ou pour le 43 kW AC. Pour exemple, justement, le chargeur DBT installé en avril 2013 à la station du U Express de Grand-Fougeray. Il n’acceptait que ces deux possibilités.

Toutefois, des chargeurs offerts par Nissan ont aussi été aussi dotés d’un câble CCS. Notamment ceux intégrés aux réseaux des syndicats de l’énergie. C’était le cas en Vendée et dans le Morbihan, pour ne citer que ces départements. Nissan a finalement laissé tomber le déploiement, devant des ventes finalement pas à la hauteur en France pour ses Leaf et e-NV200.

Trentième borne offerte par Nissan en France

En 2012, Cyril Gourdon s’interrogeait déjà au sujet des voitures électriques : « J’avais été sensibilisé par la radio qui annonçait leur prochain développement. Il n’y avait rien dans les environs pour les recharger à haute puissance alors que nous sommes tout à proximité d’un axe majeur. Grand-Fougeray est à 65 km de Nantes et 45 de Rennes ».

Son épouse se souvient bien aussi de cette période : « Le profil de Cyril est d’être un précurseur. Il a toujours une longueur d’avance sur ce qui va se passer ». Le couple était dans cet état d’esprit en rencontrant le constructeur de la Leaf : « Nissan était intervenue dans notre département au cours d’une réunion de tous les associés de la chaîne U. Ça a été pour nous l’élément déclencheur ».

Le premier corridor électrique ouvert par la marque fin 2012 concernait le tronçon Strasbourg-Karlsruhe. Le programme de Nissan prévoyait le déploiement de 400 bornes en Europe. Celle mise en service dans la commune bretonne de 2 500 habitants environ était la trentième offerte dans l’Hexagone par le constructeur.

« On a ressenti une véritable accroche humaine »

À l’époque, le don de cette borne représentait un cadeau de 30 000 euros : « En revanche, les frais d’installation étaient à la charge du magasin. Nous avons investi de notre côté 15 000 euros de plus pour mettre en place une seconde borne, de type 22 kW AC. Elles étaient gérées par Sodetrel. Nous étions dans l’idée de faire quelque chose de concret pour aider le développement de la voiture électrique. On a ressenti une véritable accroche humaine avec les gens de Nissan, du KiWhi Pass et du fabricant de bornes DBT ».

La démarche ne s’est pas arrêtée là : « Nissan nous a prêté une Leaf pendant six mois. Nous l’avons conservée ensuite pendant deux ans sous la forme d’une location. Ce qui nous permettait de la louer ou de la prêter à nos clients. Pas seulement nos clients d’ailleurs, puisque nous l’avons aussi mise à disposition dans le cadre d’un marché de Noël à Grand-Fougeray pour une découverte des voitures électriques ».

L’expérience du VE a cependant été arrêtée pour quelques années : « En raison du silence de la Leaf, nous avons écrasé par mégarde trois de nos chats. Les enfants ne voulaient plus entendre parler de voiture électrique ».

À lire aussiReportage – Cette nouvelle station multi-énergies bretonne propose des solutions innovantes

L’art et la manière de dépanner

Les deux bornes installées en 2013 ont été exploitées pendant dix ans : « Globalement, le service fonctionnait bien. Comme les bornes étaient à la station, on ne voyait pas les gens qui les utilisaient. Sauf quand ça n’allait pas bien. Il fallait parfois calmer ceux qui se sentaient frustrés. En général, les automobilistes ont été compréhensifs les premières années, car la mobilité électrique démarrait ».

Pour les cas les plus épineux, Cyril et Nathalie n’hésitaient pas : « On a parfois prêté une voiture, pas forcément électrique, quand des gens ont été bloqués par une recharge défaillante chez nous. Une fois, c’était pour que des personnes que nous ne connaissions pas puissent arriver à temps à un mariage. On passait aussi à l’occasion un badge de recharge pour ceux qui n’avaient pas le KiWhi Pass ».

Il est arrivé que la borne principale soit indisponible pendant plusieurs jours : « Il n’y avait qu’une seule personne à la maintenance du fabricant DBT. Le technicien est parfois resté une journée entière sur place pour réparer. Dans quelques cas, nous avons permis le branchement d’une voiture électrique sur une prise 220 V du magasin. On a aussi dépanné après l’heure de fermeture. En général, ces personnes que nous ne connaissions pas repartaient contentes ».

Situation en 2024

En 2024, la station-service du magasin U Express de Grand-Fougeray a déménagé à environ 200 m du magasin. Le service de recharge est toutefois resté sur place, avec une nouvelle borne DBT. Elle propose la recharge DC en CCS comme en CHAdeMO, et, au milieu, une prise pour se brancher en 22 kW AC. Ce matériel est désormais intégré au réseau Freshmile, avec une meilleure ouverture à l’itinérance comprenant le paiement par carte bancaire.

En plusieurs mois, la diversité des modèles qui sont passés par là est très large, avec une bonne quarantaine de VE. Certains sont peu courants, comme le Nissan Townstar qui n’est autre qu’un Renault Kangoo rebadgé. Pour ne se limiter qu’aux marques afin d’aller plus vite, le chargeur a délivré de l’énergie pour des Renault, Citroën, Peugeot, Opel, Dacia, Renault, Audi, Volkswagen, Mercedes, BMW, Mini, Tesla, Kia, Hyundai, etc.

En recharge chez U Express Grand-Fougeray
En recharge chez U Express Grand-Fougeray

Certains de ces véhicules étaient des utilitaires. Un constat qui sert parfaitement de transition au projet à court terme des gérants : « Nous allons commander dans l’année un Peugeot Partner électrique réfrigéré pour livrer nos clients. Ce modèle a été choisi pour faire fonctionner le garage local ». De son côté, Nathalie envisage : « J’aimerais passer au vélo à assistance électrique pour venir au magasin ».

À lire aussiReportage – Vendeur automobile, mode d’emploi : voilà l’exemple à suivre pour la voiture électrique

Mix énergétique

Cyril voit plus loin que l’électrique et envisage toutes les pistes : « Je suis persuadé que la mobilité durable prendra la forme d’un mix énergétique. Nous avons un garage à Grand-Fougeray, Motors 701, qui propose des conversions au GPL. Nous avons commencé à entamer des démarches sur le sujet avec Primagaz. Plusieurs clients nous ont fait la demande d’une pompe pour délivrer ce carburant et nous sommes sur un axe très passager avec du potentiel ».

Has been le GPL ? Comme produit pétrolier, son avenir en Europe est plutôt sombre. Toutefois, Primagaz s’est déjà positionné sur les bioGPL, pour l’instant en se limitant au chauffage. Ce qui ouvre toutefois une porte pour une déclinaison en carburant en exploitant la biomasse.

Ce projet d’une pompe GPL est cependant en attente pour l’instant : « Il nécessiterait de mobiliser 30 000 euros de notre part. Mais aujourd’hui, nous devons faire face au changement des appareils de froid du magasin contre d’autres avec des produits réfrigérants moins nocifs. C’est une opération qui nécessite déjà un budget très important ».

La station de Grand-Fougeray délivre déjà du Superéthanol E85 pour lequel l’installateur local s’est aussi spécialisé dans la pose des boîtiers dédiés. Cyril regarde aussi du côté de l’hydrogène. Bref, son site apparaît plus que jamais particulièrement évolutif.

Automobile Propre et moi-même remercions beaucoup Nathalie et Cyril Gourdon pour leur accueil. Un grand merci également à Jérôme Fresnay pour avoir organisé à notre demande cette rencontre.

La suite de votre contenu après cette annonce

La suite de votre contenu après cette annonce


Vous aimez le véhicule Nissan Leaf (ancien) ?Réservez votre essai

Nos guides