Voiture électrique accidentée

Les derniers arguments des opposants à l’électrique vont chercher du côté de la sécurité. Encore une fois, ils ont tout faux.

Nous l’avons vu il y a quelques jours, il y a débat sur le fait que les voitures électriques n’émettent aucun son de moteur à basse vitesse, ce qui peut parfois causer des situations délicates avec les autres usagers de la chaussée, on pense bien sûr d’abord aux piétons.

Au-delà de ce constat, on entend parfois dire – souvent par les détracteurs habituels jamais en maque d’arguments un peu tordus – que les voitures électriques seraient dangereuses pour d’autres raisons diverses et variées.

Parmi celles-ci, outre leur insupportable silence, donc, on trouve aussi leur couple trop important (j’ai même lu récemment qu’il faudrait le brider ou l’interdire, oui oui) et son corollaire, la puissance. Et donc ce qui va avec, à savoir des accélérations trop brutales et difficiles à maîtriser, le one pedal qui conduirait les électromobilistes à oublier de freiner, voire à ne plus avoir de vrais freins car rouillés par manque de sollicitation, et, tant qu’on y est, le fait que les électriques roulent trop lentement sur l’autoroute à cause de leur autonomie insuffisante pour que Jean-Kevin Diesel puisse faire 1000 km non-stop à 140 sur la file de gauche.

Sans parler de toutes ces Tesla qui accélèrent toutes seules, ni de ces voitures électriques qui s’enflamment spontanément.

Bref, de vrais dangers publics.

Des poncifs à la réalité, le grand écart des idées reçues

Alors, au risque de décevoir, tous ces griefs ne sont pas vraiment conformes à la réalité, et relèvent davantage des fantasmes issus de cerveaux ayant une certaine tendance à se complaire dans un mode de pensée légèrement déconnectée de la vérité, voire même alimentée par un léger soupçon de complotisme.

Concernant le silence, le débat est pratiquement clos puisque depuis 2019 les voitures électriques et hybrides sont obligatoirement équipées de l’AVAS, ce fameux système qui émet un son audible des piétons en-dessous de 20 km/h. Ce n’est pas la panacée mais cela peut cependant éviter quelques rencontres fâcheuses. Notez que ce serait bien la première fois que l’on dirait que le silence tue…

Au sujet des puissances et de l’énormité du couple instantané, tout est évidemment question de maîtrise. Il est évident qu’il ne vaut mieux pas mettre une Tesla Model 3 Perf ou Model S Plaid dans les mains d’une jeune personne de 18 ans venant de décrocher son permis et sans aucune expérience, car le silence de fonctionnement et la facilité de conduite peuvent rapidement donner l’illusion que l’on est à bord d’un sympathique et docile jouet, alors qu’un monstre sommeille sous le capot, prêt à bondir à la moindre sollicitation. Sauf que dans la réalité, ce n’est pas vraiment le cas de figure le plus courant, et que les propriétaires de ce genre d’engin savent généralement doser ce qu’ils ont sous le pied. D’ailleurs, nous en avons déjà parlé, côté dosage, il n’y a pas plus fin et progressif que l’accélérateur d’une électrique, que l’on croirait directement connecté au cerveau. Dans ce domaine, Tesla est le maitre incontesté, et permet à peu près à n’importe qui de conduire ses voitures en dosant exactement à sa main. Bref, votre grand-mère peut conduire une Plaid et ne jamais savoir qu’elle est assise parmi 1025 chevaux.

D’autre part, la puissance peut être maitrisée par l’informatique, puisque si vous prêtez votre Tesla, vous pouvez la brider à votre choix avec le mode Voiturier afin que l’emprunteur ne se crashe pas à la première accélération.

Concernant le one pedal (ou freinage régénératif jusqu’à l’arrêt complet), cet élément de confort est tellement prisé de ceux qui y ont goûté que jamais ils ne reprendraient une auto qui n’en soit pas équipée. Et cela ne semble pas poser de problème particulier de sécurité. Bien sûr, il y a une petite courbe d’apprentissage, mais elle est très rapide, en quelques kilomètres c’est assimilé. Une fois la maitrise de cette spécificité acquise, c’est plutôt un élément de sérénité qui induit une conduite plus coulée, à l’opposé d’un hypothétique danger. Ne pas freiner n’implique pas de ne pas s’arrêter, encore moins de faire un carnage au premier ralentissement venu. Quant aux disques, mâchoires et plaquettes de freins qui deviendraient inopérants du fait d’une utilisation trop peu fréquente, il suffit de vraiment freiner une fois de temps en temps pour “déglacer” l’ensemble, et la question est réglée.

Il y a aussi la question du poids des véhicules électriques, plus important à modèle équivalent que celui des thermiques. Qui dit poids supérieur dit inertie supplémentaire et risques de blessures plus importantes en cas de choc avec un véhicule plus léger pour les occupants de ce dernier. C’est la raison pour laquelle les constructeurs essaient de réduire le surpoids des voitures électriques, notamment en travaillant sur l’efficience permettant une réduction de la taille des batteries. Même si la norme semble se situer aux alentours des 2 tonnes, certains VE sont moins lourds, comme la Tesla Model 3 (environ 1,8 tonne) la MG4 (de 1,6 à 1,8 tonne) ou encore la Citroën ëC3 (1,4 tonne). Dans les très compactes, une Fiat 500e et une R5 électrique pèsent entre 1,3  et 1,4 tonne selon les versions.

Les tarifs des assurances sont stables

Les assurances publient régulièrement des études statistiques fondées sur les données récoltées, qui leur permettent d’établir et adapter leurs tarifs. Malgré l’hécatombe annoncée par les prédicateurs de l’anti-VE, il ne se passe au final pas grand chose, et les tarifs de couverture des voitures électriques n’ont pas explosé ces dernières années, en dehors des augmentations classiques appliquées à tous les modèles, y compris les thermiques. Probablement le signe que, malgré certaines annonces parfois un peu racoleuses, les électriques ne causeraient pas plus d’accidents que les thermiques. Notons cependant que la dernière étude connue, celle d’AXA, remonte déjà à près de 2 ans. Il faudra attendre d’autres statistiques plus récentes ou actualisées pour avoir une meilleure photographie de l’accidentalité des voitures électriques en comparaison des thermiques de catégorie équivalente.

Reste la question des incendies de voitures électriques. Là aussi, sans nier que cela puisse se produire, il faut savoir raison garder. Car, à périmètre égal, les études démontrent que les voitures électriques s’embrasent beaucoup moins souvent que les thermiques. Cela étant, les incendies, pour la plupart dus aux batteries, sont en effet beaucoup plus difficiles à circonscrire. Mais les équipementiers et les constructeurs travaillent sur la question. Renault équipe par exemple ses modèles électriques d’une sorte de vanne anti-incendie, le “Fireman Access”, une pièce qui fond avec la chaleur pour laisser place à un trou ouvrant un accès direct à la batterie pour la lance à incendie des pompiers. La batterie est alors inondée en moins d’une minute.

Bref, roulez branché et dormez sur vos deux oreilles (mais pas en conduisant), ça devrait bien se passer.