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La petite société normande Lormauto a créé la sensation sur le Mondial de l’Auto en présentant une Renault Twingo 1 électrifiée et parfaitement restaurée. Cette icône recyclée peut-elle concurrencer une Dacia Spring fabriquée en Chine à faible coût ?
Située dans la zone industrielle de Lisieux, la société Lormauto a été fondée par Sébastien Rolo, un informaticien passionné d’automobile. « Quand la loi sur le rétrofit a été votée en avril 2020, j’ai tout de suite pensé qu’il fallait faire renaître une icône française comme la Twingo. La période du confinement m’a permis de me concentrer sur ce projet dans mon garage avant d’envisager de devenir un vrai constructeur ».
Désormais entouré d’une équipe de jeunes ingénieurs, Sébastien Rolo ne se contente pas de remplacer le moteur thermique de la petite citadine française par un moteur électrique. Il s’agit d’une reconstruction presque complète du véhicule qui est dépecé et reçoit un berceau moteur spécifique avec une nouvelle installation électrique. Le moteur synchrone, fabriqué en Italie, est associé à un réducteur de couple qui remplace la boîte de vitesses. Seul le différentiel est conservé pour transmettre la puissance aux roues avant de cette petite traction. Capable d’offrir 38 kW pour 200 Nm de couple, la mécanique est alimentée par un pack de batteries LFP (Lithium Fer Phosphate) d’une capacité nette utile de 16 kWh. Les 48 cellules assemblées sur place sont reparties sous le capot, dans le tunnel de servitude et à la place de l’ancien réservoir afin d’optimiser la répartition des masses et par la même l’équilibre du véhicule. Jantes, pneus, biellettes, silentbloc, amortisseurs, disque et plaquettes sont changés. La Twingo de Lormauto reçoit également nouveau système de chauffage avec des résistances intégrées dans les contre-portes et la planche de bord ainsi qu’un radar de recul et même un avertisseur d’angle mort.
Si la première génération de Renault Twingo fut commercialisée de 1993 à 2007 en France, Lormauto ne récupère que les modèles à partir de 2003 dotés de quatre Airbags et d’un ABS. « Les coques en acier galvanisé vieillissent très bien et nous essayons de trouver des modèles dont la carrosserie n’a pas trop souffert pour limiter les frais de remise en état » explique Sébastien Rolo. L’habitacle profite par ailleurs d’une remise à neuf avec un nettoyage de la moquette, le remplacement des accoudoirs de contre-portes avec du lin et un recouvrement de la planche de bord par une peinture noire. Les sièges avant sont entièrement refaits avec de nouvelles mousses et un recouvrement en tissu résistant qui habille aussi la banquette arrière coulissante. À cela s’ajoute un support pour smartphone avec chargeur à induction ainsi qu’une balise GPS permettant de localiser le véhicule, surveiller son état de fonctionnement, voire effectuer des petites mises à jour à distance.
Outre son design intemporel, la première Twingo propose une architecture originale puisqu’il s’agit d’une petite voiture urbaine de 3,43 m avec 3 portes dont un grand hayon. Sa banquette arrière coulissante en deux parties offre une modularité inédite et permet même de former un lit en inclinant les dossiers avant. La visibilité n’a pas non plus d’équivalent dans la production automobile actuelle grâce à d’immenses surfaces vitrées et même un toit ouvrant panoramique sur certains modèles. Spacieuse et fonctionnelle, la Twingo souffre juste de la longueur de ses portières dans les parkings serrés. Un petit défaut qu’elle compense par sa taille fine (1,63 m de large) et son excellent rayon de braquage.
Avec son moteur électrique, la version Lormauto fait table rase des vibrations et du bruit envahissant du vieux moteur Cléon. Douce et silencieuse, la citadine se montre assez réactive à l’accélération pour un usage urbain et dispose d’un système de freinage régénératif variable sur trois modes qui permet de se mettre en roue libre ou ralentir jusqu’à l’arrêt complet du véhicule sans toucher à la pédale de frein. Ce mode de conduite à « une pédale » évite d’user ses plaquettes, mais génère un léger à-coup à l’accélération en raison du couple conséquent du moteur. Côté performances, nous avons mesuré un 0-100 km/h en 16 s (au smartphone donc à prendre avec des pincettes) ce qui équivaut à celui d’une version thermique 1.2 de 55 ch. Mais l’absence de boite de vitesses facilite l’usage en ville et rend la voiture plus réactive sur le 0 à 50 km/h. Les reprises de 60 à 90 km/h suffisent pour dépasser un camion sur une nationale et la vitesse de pointe de 130 km/h (sur le plat) autorise des petits parcours sur autoroute. Un résultat légèrement plus favorable que celui d’une Dacia Spring qui offre 33 kW et 125 Nm. L’insonorisation et le confort sont également comparables avec des sifflements d’air sensibles à partir de 90 km/h et des bruits de roulement assez présent.
En matière de comportement routier, la Twingo Lormauto n’a pas à rougir. Bien que son train avant soit assez « chargé », la tenue de cap reste saine et la voiture prend moins de roulis qu’une Dacia Spring à la fois plus haute, plus étroite et dépourvue de barres antiroulis. Doté d’un ABS, d’un amplificateur et des pneus toutes saisons (155/65R14) assez accrocheurs, la française nous a semblé saine au freinage. Il lui manque juste un antidérapage ESP en cas d’évitement d’urgence. Pour ce qui relève de la sécurité passive, la Dacia se contente de 1 étoile aux crash test EuroNcap malgré ses 6 Airbags, mais la Twingo et son mini capot ne devrait pas faire mieux. Notons que la petite française se révèle plus lourde que la Roumaine (1 000 kg contre 970 kg) bien que cette dernière accueille une batterie de plus grande capacité (26,8 kWh contre 16 kWh utiles).
C’est donc surtout en matière d’autonomie que la Twingo de Lormauto fait moins bien qu’une Dacia Spring qui offre environ 180 km d’autonomie réelle, soit 80 km de plus que la Twingo en usage mixte route/ville. La Dacia autorise une recharge un peu plus rapide, car elle bénéficie de série d’un chargeur de 6 kW pour faire le plein 4h51 sur une Wallbox de 7,4 kW. La Dacia peut aussi se doter en option d’une prise combo CCS pour faire une charge à 80% en 1 h sur une borne rapide. Mais qui dit plus petite batterie dit aussi charge plus rapide. Avec son chargeur embarqué de 3,2 kW, la Twingo de Lormauto revendique 5h30 pour recharger ses 16 kWh sur une prise domestique alors que la Spring demandera presque le double.
Pas facile de lutter contre une voiture « Low Cost » fabriquée en Chine à grande échelle. « Si l’on devait vendre notre Twingo aujourd’hui, elle serait trop chère pour une voiture populaire » reconnaît Sébastien Rolo qui préfère proposer une formule de location sans apport et sans limitation de km à 200 € par mois. Cela reste cependant toujours plus onéreux que l’offre de Dacia à 150 € par mois (sur 49 mois et limité à 44 000 km) avec bonus écologique de 5 616 € et prime à la casse de 2 500 €. « Si nous bénéficions, nous aussi, du bonus écologique et d’une prime à la non-casse, nous pourrions développer notre production à plus grande échelle et proposer une offre à 100 € sans apport sur une voiture produite en France avec une empreinte carbone bien plus favorable ». Reste ensuite à s’assurer que ces aides publiques n’aillent pas à des « rétrofiteurs » du dimanche au risque de nuire à la filière tout entière comme ce fut le cas avec certains poseurs de panneaux photovoltaïques. L’homologation d’un véhicule à l’UTAC n’est néanmoins pas facile et devrait servir de label qualité pour ces pionniers d’un nouveau mode de production automobile plus vertueux pour l’environnement.
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