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Quadricycle astucieux, mais coûteux, le Mobilize Duo brille surtout par son autonomie. Notre test dans les rues de Rome.
À Rome, la congestion est un phénomène ancien. Dans ses Satires écrites autour de l’an 100 de notre ère, le poète Juvénal – à la fois réactionnaire et habile croqueur de son époque – s’irritait déjà en hexamètres face à la circulation chaotique :
« Embouteillage de chariots dans les ruelles sinueuses, criailleries des muletiers dont le troupeau n’avance plus. Moi, le flot qui me précède me retarde et celui qui me suit me coince les reins ! »
Me voici dans les mêmes lieux et songeant à la même chose, deux millénaires plus tard, confronté à une fourgonnette qui recule, un scooter qui bourdonne et des quolibets en italien.
Pour contourner ce problème éternel, Mobilize – branche « nouvelles mobilités » du Groupe Renault – propose du nouveau. Révélé dans sa version définitive au dernier Mondial de l’automobile, le Duo entend nous réconcilier avec la conduite en ville et chasser sur le territoire de l’Ami.
Comme son aïeul, le Renault Twizy, le Mobilize Duo est disponible en deux versions. La première (45 Néo) vise les jeunes conducteurs et conductrices dès 14 ans ou ceux qui auraient raté/perdu/pas passé leur permis en répondant à la catégorie « quadricycle léger ». Le second (80) s’adresse aux possesseurs de permis B ou 125 cm³ (« quadricycle lourd »). Aujourd’hui, nous nous installons au volant de la seconde. La configuration étant quasiment identique sur le 45, on en tirera aussi quelques conclusions sur la « sans permis ».
Dans la cohue de cars touristiques et de pèlerins circulant aux portes du Vatican, l’engin est incontestablement à son aise. Assis au milieu du véhicule et en mesure de mieux mesurer les écarts avec le reste du trafic, on s’amuse à se glisser entre les véhicules plus gros, gagnant deux ou trois positions à chaque feu rouge sur les Jeep et les Fiat alentours. C’est d’abord une question de dimension.
Le Duo arrive à se glisser et à stationner partout, notamment en raison d’une étroitesse encore supérieure à l’Ami (9 cm d’écart). Un écart à relativiser : le Duo dispose de rétroviseurs hexagonaux situés au bout de longues perches là où l’engin de Citroën colle ses miroirs de vélos à sa carrosserie en plastique. Pour les régler ou les replier, il faudra replier les ouvrants.
N’empêche, on engage le Duo avec plaisir au milieu de la dense circulation. La visibilité avant est très satisfaisante, malgré des montants épaissis par la structure tubulaire (voir encadré). À cela s’ajoute un diamètre de braquage de marmouset. Engageons-nous dans une impasse pour le vérifier. L’engin pivote en 6,80 m, contre 7,20 en Citroën. Mais, comme aux commandes de son rival, il faudra jouer du volant. La démultiplication est élevée et la direction un chouïa dure lorsque l’on fait tourner les roues à l’arrêt. Normal : pas de direction assistée ici.
À basse vitesse, les piétons peuvent observer la silhouette inhabituelle du Duo. Plus haut que large, il s’habille de plastiques bruts couverts de stickers. Les portes en élytre soignent l’effet cool (attention à ne pas se coincer les doigts, cela casserait l’effet) tout en facilitant le stationnement. On peut se garer au plus près des autres véhicules sans mettre un coup de portière. Merci tout de même de leur laisser un peu d’espace.
À lire aussiMondial de l’Auto 2024 – Nouvelle Citroën Ami : la reine du lycée aura un look plus sympa en 2025Les fenêtres ajourées dans leur partie basse – façon Lamborghini Marzal — assistent les créneaux : on voit directement le « coin » du véhicule déjà garé. On peut aussi sortir des deux côtés. Attention à ne pas se prendre les pieds dans le frein à main en quittant le véhicule par la droite.
Les astuces low-cost sont nombreuses. Les pare-chocs avant et arrière sont identiques et habillés de camouflages afin de diminuer l’impact visuel d’une rayure. Les clignotants sont les mêmes aux quatre coins. L’essuie-glace mono-balai est bien suffisant pour nettoyer le pare-brise.
Et la vue de l’engin intrigue les plantons devant les casernes. Mais il y a un gros mais. Et l’on s’en rend compte en changeant de file sur des quais fréquentés. La visibilité sur le tiers arrière est catastrophique. Installé au milieu du véhicule et en l’absence de rétroviseur central, on doit beaucoup se pencher pour savoir ce qu’il se passe derrière nous.
La lunette arrière est minimaliste et il faut se retourner à presque 180° sur le siège pour savoir ce qu’il se trame dans notre sillage. La vue est également bouchée par les montants, obstruant la consultation des angles morts. Le Twizy, très (trop ?) ouvert aux éléments, offrait une bien meilleure visibilité de trois quarts. L’Ami, avec sa verrière, en fait voir bien davantage. On se consolera en écrivant que cela poussera les jeunes conducteurs et conductrices à bien regarder autour d’eux.
Véhicule rustique, mais léger, le Mobilize Duo n’est pas spécialement prévenant sur les nids de poule. On ressent très bien les aspérités et cicatrices de l’asphalte. Mais le siège conducteur, légèrement rembourré, assure un meilleur confort que le strapontin de l’Ami. Le résultat est plus convaincant sur les fréquences élevées, notamment les pavés, assez admirablement absorbés. La présence de vraies portes permet d’isoler l’habitacle. Mais l’oreille capte tout de même bien les conversations des romains ou le pot pas tout à fait légal des Ducati. Le pare-brise chauffant est livré de série et le siège chauffant en option. Se faire cuire le cul réchauffe plus vite qu’une soufflerie.
Avec une puissance de kart de location, s’insère-t-on aisément dans la circulation ? La réponse est oui. Un coup d’accélérateur un peu vif permet de vite dégager un carrefour. L’accélération se « tasse » au-delà de 30 km/h, mais reste suffisante. Sur les pentes du Janicule – grimpant jusqu’à 10 % – notre version 80 du Mobilize Duo continue à accélérer. La longue course de la pédale d’accélérateur permet de bien moduler son allure dans les « zones 30 ». La « régén’ » au lever de pied n’est pas réglable, mais bien jugée.
Le Mobilize Duo répond aux catégories L6 et L7. Il s’agit de quadricycles dont le poids est limité à 425 et 450 kg (hors batteries). La structure est tubulaire. La machine animant le Duo est extraite de la gamme Renault. Il s’agit en réalité d’un alternodémarreur 48 volts Valeo utilisé notamment sur l’Austral à hybridation légère. La batterie, placée sous les fesses des passagers, propose une capacité nette de 10,3 kWh. Elle est de composition nickel-manganèse-cobalt, proposant une plus forte densité énergétique que la LFP montée sur les Citroën ou Fiat.
Les quelques lacets de la colline permettent également de se faire une idée du comportement. Le roulis est quasi-absent et le grip correct en courbe sur le sec. Les habitués du Twizy reconnaîtront avec plaisir les trains roulants développés à l’époque.
Le coup de frein est moins rassurant. Si les quatre disques mordent efficacement, l’absence d’ABS et l’adhérence rudimentaire des Continental 13 pouces font qu’on peut glisser légèrement en pilant. Ça sent aussi le brûlé si l’on répète l’exercice.
Les distances d’arrêt demeurent très courtes grâce au poids-plume de l’engin. Le Duo soigne par ailleurs sa sécurité passive. Derrière le moyeu d’ex-volant de Clio ou de Captur se cache un airbag de 50 litres. Il est proposé de série sur toutes les versions.
Le Duo a récupéré la configuration du Twizy. Le passager ou la passagère arrière doit donc faire quelques contorsions pour atteindre son siège et accepter de chevaucher la batterie pour quelques kilomètres. Le fauteuil avant est creusé sur les flancs pour glisser les cuisses. En revanche, notre dos aurait apprécié un meilleur rembourrage : la colonne n’est que partiellement soutenue si l’on est assis(e) à l’arrière. Et attention à ne pas s’enrouler dans la ceinture si l’on souhaite quitter le véhicule par la gauche.
Sous les jambes, on retrouve un unique filet de rangement qui ne stockera qu’une petite trousse. Pour le reste, on calera les bagages sur les flancs, mais à la vue de tous. Pas de coffre, à moins d’opter pour le Bento (voir ci-dessous).
Les professionnels peuvent se tourner vers le Mobilize Bento. Proposé à partir de 10 000 € hors-taxes, il embarque un sac à dos d’une capacité de près de 650 litres, soit presqu’autant que la soute d’un Skoda Superb break… Attention : ce coffre est un peu haut perché, sollicitant les dos fragiles. Il peut être aménagé façon atelier ou caisson frigorifique, mais il faudra faire appel à des fournisseurs tiers.
À la place du conducteur ou de la conductrice, on fait face à une planche de bord rectangulaire habillée d’autocollants. Selon les designers maison, la forme très simple évoque une boombox (également connue sous le nom de ghetto-blasters) des débuts du hip-hop. Les pictogrammes rappellent d’ailleurs habilement les radiocassettes JVC ou Sharp avec le triangle « play » pour la marche avant, « rewind » pour la marche arrière… Il faudra bien appuyer sur le frein pour engager les rapports. Basique, simple, mais efficace.
Tout comme le combiné d’instrumentation avec ses affichages 7 segments, montrant explicitement l’essentiel, de l’état de charge de la batterie à la vitesse en temps réel. Sur les côtés, les plastiques montés dans l’usine de Tanger (Maroc) sont de meilleure qualité que la concurrence et les ajustements plus rigoureux. Un support pour smartphone et un port USB-C trouvent leur place à droite du volant. La sono est assurée par un transducteur et non une enceinte complète (option à 200 €).
Pas d’originalité côté ergonomie, mais c’est plutôt une bonne nouvelle. Une buse sur le plancher permet de nettoyer l’habitacle aux grandes eaux.
Et que dit le compteur d’ailleurs ? Le Duo est annoncé avec une autonomie de 161 km selon le généreux cycle moto WMTC utilisé pour les quadricycles. En réalité, Mobilize promet surtout un « 100 bornes » réelles en toutes circonstances.
À l’issue de notre essai urbain, mais vallonné, nous avons calculé une autonomie de 122 kilomètres, soit une consommation équivalente à 8 kWh/100 kilomètres. La portée risque de se réduire sérieusement si vous vous aventurez hors des agglomérations avec de longues périodes à la vitesse maximale de 80 km/h ou si vous roulez par temps glacial.
Côté recharge, l’engin est doté d’une prise domestique et d’un adaptateur Type 2 (option à 200 €) placé à l’avant. Dans le second cas, la puissance de recharge, plafonnée à 2 kW, n’y gagne pas grand-chose. Il s’agira essentiellement de se brancher à davantage de prises publiques.
Les temps passés avec fil sont logiquement plus longs que sur une Ami aux piles plus petites. Il faut 5 h 20 pour recharger de 0 à 100 % et une heure de branchement offre 25 kilomètres supplémentaires.
À lire aussiComparatif – Citroën Ami vs Fiat Topolino : querelle de sœurs sans permisLes tarifs demeurent tout de même salés. Le Mobilize Duo 45 Néo prévu pour les jeunes ou ceux qui n’ont pas le permis B est facturée à partir de 9 990 € hors bonus, sans option.
Une formule de location sur trois ans est proposée à partir de 29 € par mois après un premier loyer d’un peu plus de 2 000 €. Mobilize entend aussi proposer des prêts de courte durée en direction de ceux qui ont perdu leur papier rose. Toutes choses égales par ailleurs, les Citroën Ami et Fiat Topolino sont moins chères, mais iront nettement moins loin.
Notre Mobilize Duo 80 démarre à 12 500 €, hors bonus aujourd’hui fixé à 900 €. C’est évidemment coûteux. Une Dacia Spring ou une Smart For Two de trois ou quatre ans – deux véhicules plus polyvalents – se trouvent sur le marché de l’occasion à des prix similaires.
Nous avons beau avoir cherché, nous n’avons retrouvé aucune complainte de Juvénal sur le tarif des véhicules dans la Rome antique.
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