AccueilArticlesQuand les ministres rechargent leurs voitures électriques… au diesel

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Dépassée par l’ampleur des événements, la préfecture du Rhône a eu recours à des groupes électrogènes fonctionnant au gazole pour recharger la cinquantaine de voitures électriques des ministres rassemblés à un sommet de politique européenne.

C’est le quotidien Le Progrès qui a révélé mardi 15 février dernier cette situation plutôt cocasse. Dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne, les ministres des Affaires étrangères et de la Santé des différents pays membres étaient invités à participer à un sommet programmé sur 2 jours. La journée inaugurale avait pour cadre la ville de Lyon. Le lendemain, tout ce petit monde était attendu à Grenoble.

Cet événement avait pour thème la politique européenne en matière de santé. Il portait aussi son lot d’exigences. Parmi elles, l’obligation faite aux participants de recourir à des véhicules électriques pour réaliser leurs trajets depuis la gare ou l’aéroport vers les sites de réunion. Ainsi pour le Palais des Congrès de Lyon.

Une contrainte qui, plus que l’insuffisance des installations de recharge sur le territoire, a mis au jour le manque d’imagination et d’anticipation du staff chargé de l’organisation.

Plus de 200 points de recharge à Lyon

Pour justifier l’emploi de 2 groupes électrogènes fonctionnant au gazole, le service de presse de la préfecture a indiqué que son site n’est actuellement équipé que de 4 bornes de recharge. Le bâtiment étant classé, il ne serait pas possible d’en ajouter davantage.

Une petite recherche sur le site Chargemap montre qu’il existe plus de 200 points de recharge à Lyon, chaque borne en présentant la plupart du temps 2. Quelques chargeurs rapides sont également présents sur le territoire.

Selon la photo publiée par Le Progrès, les navettes électriques utilisées par les ministres sont des Peugeot e-Traveller. Puisqu’il s’agit de transporter des personnalités, on peut estimer que le modèle retenu pour cette flotte embarque la grosse batterie d’une capacité énergétique de 75 kWh, et, bien sûr, la recharge rapide DC au standard Combo CCS et le chargeur AC 11 kW.

Une recharge était-elle nécessaire pour tous les véhicules ?

L’autonomie WLTP en cycle mixte des Peugeot e-Traveller est de 330 kilomètres. En usage normal, il vaut mieux ne pas compter sur plus de 250 km. Il y a moins de 25 kilomètres entre l’aéroport de Lyon Saint-Exupéry ou la gare TGV et le Centre des Congrès de Lyon. Le trajet entre cette ville et Grenoble a-t-il été réalisé avec ces navettes ? Si oui, la distance entre les 2 points est d’une centaine de kilomètres.

Nous ne voyons donc pas pourquoi il a été nécessaire d’avoir recours à des groupes électrogènes.

Nous partons en outre du principe qu’un chauffeur est dédié à chaque voiture électrique et que les ministres étaient mobilisés plusieurs heures d’affilée. Dans ce cas, il était tout à fait possible d’établir une sorte de cartographie avec attribution d’une borne pour chacun des véhicules, et une éventuelle rotation aux chargeurs rapides.

Si le staff organisateur se sentait dépassé par l’arrivée d’autant de véhicules électriques, il était possible de faire autrement que d’afficher un amateurisme contre-productif pour un sommet européen traitant de la santé. Il pouvait tout à fait déléguer cette tâche à un organisateur de rallyes en voitures à énergies alternatives.

Ainsi Tour véhicules électriques, qui imagine par exemple chaque année depuis 8 ans environ le Vendée énergie Tour. Nous avons contacté son dirigeant Jean-François Villeret. Il confirme que la situation pouvait être gérée facilement avec les moyens du bord, sauf bien sûr des éléments que nous n’aurions pas à notre disposition.

Si lui-même avait eu à recharger une pareille flotte, il aurait assurément privilégié les bornes existantes dans les environs. « Au pire, nous aurions utilisé des bornes mobiles branchées sur des prises triphasées facilement accessibles dans un périmètre restreint », a-t-il immédiatement envisagé.

D’autres alternatives

Et puis il y avait aussi la possibilité de faire appel à Drop’n Plug. En ne prenant qu’un espace réduit, le van transformé en station mobile, et déjà exploité en 2021 pour le Tour de France cycliste, permet de brancher simultanément jusqu’à 20 voitures électriques. Son créateur Claude Le Brize est également atterré par l’emploi de groupes électrogènes fonctionnant au gazole.

« Nous aurions très bien pu gérer la situation avec notre station mobile. Bientôt, nous pourrons même proposer une version capable de recharger des voitures électriques à partir d’hydrogène », assure-t-il.

Station de recharge mobile Drop'n Plug
Station de recharge mobile Drop'n Plug

Groupes électrogènes

Pourquoi avoir recours à des groupes électrogènes gavés au gazole alors qu’il est possible de les alimenter autrement ? Par exemple à l’huile de friture, comme l’avait un temps envisagé Bruno Ricordeau d’Atypik Travel Organisation pour ses Green Expedition.

Ou à l’hydrogène, encore une fois, en employant le générateur Shyva construit en France par la société nantaise H2X Ecosystems. Il sera employé dès le mois prochain au Maroc pour alimenter le rallye Aïcha des Gazelles. Ces 2 dernières solutions, exploitables dans des conditions très difficiles, avaient toute leur place à Lyon à l’occasion du sommet dédié à la politique européenne en matière de santé.

C’est bien gentil de donner des coups de pied dans le tissu industriel français et les sociétés de service pour qu’ils proposent des solutions en matière de la mobilité durable. Encore faudrait-il que les instances dirigeantes y fassent appel quand elles ont été développées.

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