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La voiture électrique est-elle déjà passée de mode ? Pas vraiment. Certes, les chiffres de mars sont mitigés. Mais on est dans une période de stabilisation, avant une nouvelle étape de progression.
– 11,3 %. Telle a été la baisse des ventes d’autos électriques en mars en Europe. Un recul important qui a eu un large écho dans la presse. Après avoir à peine décollé, les ventes de voitures électriques sont-elles déjà en train de s’effondrer ? Non.
Elles sont même toujours orientées à la hausse, que ce soit à l’échelle française, européenne ou mondiale, si on regarde au niveau du premier trimestre 2024. Ainsi, en France, de janvier à mars, le nombre de voitures électriques immatriculées a encore progressé de 23,5 % en un an. A l’échelle européenne, c’est + 3,8 %.
Un tour de passe-passe ? Pas vraiment, car les données de l’industrie automobile s’analysent sur un temps long, chaque mois pouvant apporter son lot d’événements, sources de fluctuations. Par exemple, en mars, les ventes globales ont reculé de 5 %, et l’ACEA qui communique ces données n’a pas hésité à mentionner l’impact du week-end de Pâques.
Si la hausse du marché des électriques en Europe a été timide, cela n’a pas été une baisse. On parlera volontiers d’une stagnation au niveau de l’Union, les performances de certains pays, comme la France, la Belgique ou les Pays-Bas, étant contrebalancées par le plongeon en Allemagne, le marché le plus important en volume pour les électriques. Chez nos voisins d’Outre-Rhin, les ventes ont reculé de 14 % (toujours à l’échelle du trimestre).
À lire aussiCoup d’arrêt pour Tesla : mauvais bilan des ventes pour le premier trimestre 2024La raison est simple : l’Allemagne a mis fin à son bonus, quasiment du jour au lendemain. C’est bien sûr la preuve que les aides à l’achat restent importantes pour les voitures électriques, dont les prix restent encore plus élevés que les véhicules thermiques équivalents. Le recul des ventes en Italie s’explique ainsi par l’attente de nouvelles aides, promises depuis plusieurs mois. Tandis qu’en France, le marché a clairement été boosté par le succès du leasing social, dont un peu plus de 50.000 dossiers ont été acceptés. Le premier trimestre a aussi été porté par les livraisons de véhicules commandés avant la baisse du bonus, voire la perte totale de l’aide en raison de l’éco-score.
C’est d’ailleurs un autre aspect du marché de la voiture électrique qui impose de regarder les courbes sur un temps long, la demande est impactée par le timing des évolutions des aides dans les pays. Reste qu’après de belles croissances, on a donc une baisse notable en mars. Du pain béni pour la presse. Clairement, le moindre faux pas de la voiture électrique fait vite les gros titres, agitant ses opposants sur les réseaux sociaux, générant clics et réactions.
Faut-il toutefois s’attendre à un recul qui va se prolonger ? Pas vraiment. Certes, on est dans un moment où cela ne progresse plus. Comme si la voiture électrique avait atteint un plafond de verre. C’est d’abord l’effet d’un rééquilibrage après une flambée des ventes ces derniers mois, envolée portée par la fin d’aides à l’achat, le début de la guerre des prix avec MG et Tesla ou encore un effet de rattrapage des livraisons suite à la pénurie de semi-conducteurs. D’ailleurs, la comparaison européenne de mars se fait avec un mois de mars 2023 record, avec plus de 151.000 immatriculations, contre moins de 100.000 en mars 2022.
Et l’électrique est un type de motorisation qui progresse par palier. Au fur et à mesure que les technologies évoluent et surtout que les prix baissent, ces voitures touchent de nouveaux publics. Il suffit de voir les chiffres fous du Model Y en 2023, année où ses prix ont été fortement baissés, lui permettant en France d’avoir le bonus et de venir à la portée de nouveaux acheteurs.
En clair, les électriques ont d’abord été achetées par des clients très aisés. Puis par des clients aisés. Elles commencent maintenant à s’adresser à la classe moyenne. Car, même si beaucoup gardent en tête l’image d’un produit trop cher, les tarifs se rapprochent petit à petit de ceux des thermiques. Sans bonus, le Scenic électrique commence à 39.990 € quand l’Austral débute à 40.800 € en hybride. Chez Toyota, le bZ4X est même moins cher que le RAV4 hybride.
Outre la bataille des tarifs lancée chez les SUV électriques familiaux, il y a une nouvelle offre de véhicules à prix plus abordables qui arrive chez les citadines. Citroën frappe un grand coup avec la ë-C3, affichée à partir de 23.300 € hors bonus. En quelques semaines, la voiture a reçu 10.000 réservations. Chez Renault, en plus du Scénic, on attend bien sûr la R5. Le Losange a eu plus de 50.000 demandes en Europe pour ce modèle !
Autant de futurs succès qui feront atteindre de nouveaux paliers de ventes aux voitures électriques, qui grignoteront petit à petit des parts de marché, une ascension régulière jusqu’au tout électrique, objectif régulièrement remis en cause mais toujours fixé par l’Europe en 2035. De grands patrons, notamment celui de Stellantis, demandent d’ailleurs cette fois de bien maintenir cette échéance car ils ont besoin de stabilité dans ces règles pour que les investissements déjà lancés pour passer à l’électrique ne soient pas dévalorisés.
Il y a toutefois un aspect qui est vrai pour les voitures électriques : le marché ne progresse pas aussi vite qu’espéré. Thierry Piéton, directeur financier du groupe Renault, l’a lui-même reconnu cette semaine lors de la présentation des derniers résultats financiers du Losange. D’autres marques ont récemment annoncé une adaptation de leur calendrier d’électrification, par exemple chez Mercedes et Kia. Mais sans qu’il ne soit question de renoncer à l’électrique. Il était surtout question de garder plus longtemps à côté des thermiques ou hybrides.
Encore une fois, il faut prendre du recul. En février, Luca de Meo, directeur général du groupe Renault, estimait que « le monde est un peu trop impatient avec l’électrique ». Auprès du Figaro, il déclarait : « Analystes et médias ont tendance à perdre la vision à long terme. Il faut garder la tête froide, ce marché aura des hauts et des bas, mais on ne reviendra plus en arrière sur la bascule vers l’électrique ».
De son côté, Fatih Birol, directeur de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), déclarait cette semaine : « Plutôt que de ralentir, la révolution globale de l’électrique semble se préparer à une nouvelle phase de croissance. Avec une vague d’investissement dans la fabrication de batteries, la chaîne logistique s’apprête à s’accorder avec les plans ambitieux des constructeurs automobiles ». Dans un rapport, l’AIE a estimé qu’il y aura une hausse des ventes d’électriques de 20 % à l’échelle mondiale en 2024. Une hausse qui sera aussi valable en France et en Europe.
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