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Association indépendante qui assure ne pas recevoir « de financements spécifiques d’acteurs privés », HOP diffuse un rapport de 56 pages alertant sur « l’obsolescence accélérée » des voitures particulières. Le document d’une très grande richesse est assorti de la possibilité de signer une pétition.
En s’appuyant en particulier sur une durée de vie moyenne de 19 ans en France, Halte à l’Obsolescence Programmée (HOP) estime que « le secteur automobile est longtemps resté un modèle d’économie circulaire et de durabilité ». En passant à des voitures connectées et électriques, ce schéma est menacé. Le rapport cite par exemple « Tesla et ses kilos de mousse rose emprisonnant des batteries dans un bloc irréparable ».
A défaut de la disponibilité des packs que rien n’oblige, un électromobiliste pourrait très bien n’avoir d’autre solution que de remplacer tout le véhicule pour un simple problème de cellule ou de module. D’où cette vision de voitures jetables contre lesquelles l’organisme se bat actuellement. Entraînant une dépréciation plus rapide, le problème est accentué par la pratique du giga-casting qui « moule d’un bloc de nombreuses pièces ».
Ce qui a pour conséquences potentielles d’augmenter lourdement le coût des réparations. En devenant « une sorte de smartphone sur roues », l’automobile est aussi soumise a davantage de risques d’obsolescence portant sur des composants miniatures et les logiciels de pilotage. L’électronique : une connaissance intime de HOP qui a déjà produit des rapports similaires sur les imprimantes, téléviseurs, lave-linges, etc.
À classer comme une association de consommateurs avec une très grande sensibilité environnementale et sanitaire, HOP part du principe que l’empreinte de la mobilité individuelle doit être réduite. Comme Transport & Environment et les Shifteurs, l’organisme appelle d’abord « les citoyennes et citoyens » à la sobriété et au report modal (vélo, marche, transports en commun, covoiturage, autopartage, location, etc.).
« La voiture la plus vertueuse est celle qu’on ne produit pas. Il paraît illusoire de penser que nous pourrions atteindre les objectifs de l’accord de Paris si l’usage de l’automobile n’évolue pas », rappelle HOP. Tout en mettant en perspective que « la manière dont fonctionne notre société et la façon dont sont construits nos villes, nos villages et nos réseaux de transports ne permettent pas encore de se passer facilement d’une voiture individuelle ».
C’est pourquoi, devant les 40 000 décès annuels dus aux particules fines et les 7 000 causés par l’oxyde d’azote, l’association valide le passage à l’électrique. Mais pas n’importe comment ni à n’importe quelles conditions. Devant déjà profondément changer leurs habitudes et mobiliser un budget plus important, les consommateurs ne doivent pas en plus subir des frais annexes insurmontables ni avoir à remplacer trop vite des véhicules qui pourraient durer bien plus longtemps.
À lire aussiTesla ouvre sa plateforme de réparation aux indépendantsLa crainte que s’organise et se généralise à tous les constructeurs un « giga-gâchis » a très nettement animé les rédactrices qui ont rencontré pour produire leur rapport des constructeurs, équipementiers, réparateurs, remanufacturiers et experts des mobilités. Quelle que soit l’énergie qui alimente le moteur, produire une voiture neuve a un impact environnemental dès l’extraction des ressources dont on ne connaît pas vraiment la disponibilité.
HOP fait siennes les évaluations de Carbon4 selon lesquelles, sur 200 000 km, une électrique émet 71 % de CO2 en moins par kilomètre qu’une voiture thermique, et qu’elle devient intéressante pour le climat entre 30 000 et 40 000 km. De fait, les petits rouleurs à quelques milliers de kilomètres par an ne trouveront pas forcément avec le VE « une alternative positive évidente ».
Zones à faibles émissions, évolution de la norme vers des modèles moins émissifs en CO2, malus, futures interdictions des ventes de véhicules thermiques, aides à l’achat pour les VE dont la prime à la conversion, etc. : les incitations à abandonner bien plus rapidement les voitures essence et diesel sont à juste titre qualifiées « d’obsolescence règlementaire » par HOP.
En effets pervers à l’obsolescence règlementaire, les véhicules encore en état mais supprimés de nos routes peuvent connaître d’autres vies en Afrique ou en Europe de l’Est, mais débarrassés de leurs systèmes de dépollution. Sauf que la pollution et les émissions de CO2 ne s’arrêtent pas aux frontières. En outre, ce scénario appauvrit potentiellement en France le gisement de pièces de rechange d’occasion.
HOP envisage la solution du rétrofit électrique, soulignant qu’elle pourrait être intéressante pour les personnes effectuant de relativement courts déplacements. Et ce, en raison d’une batterie d’une capacité énergétique souvent moindre. L’association souligne toutefois le coût élevé du groupe motopropulseur de remplacement en raison de l’homologation et de l’obligation légale de n’utiliser que des pièces neuves. Ce dernier point est à mettre en perspective avec la contrainte légale faite aux garagistes depuis 2016 de proposer des pièces de remplacement issues de l’économie circulaire.
Les voitures électriques neuves ne sont pas épargnées par l’obsolescence règlementaire, avec déjà des spécificités. Le rapport ne la cite, pas, mais rappelons-nous en 2021 de la fin de l’obligation pour les opérateurs de recharge d’inclure le standard CHAdeMO dans les stations à haute puissance DC.
Dans deux tableaux, le rapport propose de comparer les impacts environnementaux et économiques pour les automobilistes de plusieurs solutions : essence, diesel, GPL, Superéthanol, hybride simple, hybride rechargeable, électrique à batterie. Bien loin d’être mature pour la mobilité personnelle, l’hydrogène a été écarté. Plus les cases sont rouges dans ces tableaux, plus le point inscrit pose problème. À l’opposé, un vert vif signale les aspects les plus vertueux. Ainsi le GPL ou le superéthanol concernant le coût limité pour la conversion.
Cet exercice n’a pas dû être simple pour les rédactrices. Sans pour autant remettre en cause la qualité du travail ni le classement, plusieurs cases nécessitent une précision. Trois en particulier. D’abord, celle qui associe la méthanisation à l’E85. Ce dernier est produit par fermentation. La méthanisation, c’est pour le GNV qui n’a pas été retenu dans les tableaux et qui existe pourtant aussi en France. Même si en déclin pour les voitures de particuliers du fait de l’offre qui se réduit chez les constructeurs.
Il y a ensuite la référence à l’ouvrage « La guerre des métaux rares » de Guillaume Pitron. Dans leur reportage « A Contresens », les journalistes suisses Marc Muller et Jonas Schneiter avaient pointé le manque de rigueur de l’auteur au sujet des terres rares et des matériaux critiques. Que ce soit pour les éoliennes ou les moteurs des VE, les terres rares sont une option, mais pas une obligation. L’ingénieur et Youtubeur Le Réveilleur s’était également exprimé en ce sens.
La troisième précision à apporter concerne l’installation des bornes domestiques. Rappelons qu’il est possible de n’utiliser que des prises classiques dans son garage pour la recharge des véhicules électriques. C’est ce que font toujours de nombreux automobilistes sans autres problèmes que l’efficience très moyenne du procédé.
L’appel à la vigilance de HOP intervient au bon moment, alors que « se dessinent et se structurent les tendances de conception et de durabilité de la filière émergente des voitures électriques ». Pourront-elles durer autant que les modèles thermiques ?
S’appuyant sur un article publié dans Ouest-France en mars 2024, le rapport indique : « Il existe 300 000 véhicules immatriculés ‘de collection’ de plus de 30 ans d’âge qui sillonnent encore la France ». Rappelons que le passage en carte grise de collection est un choix. En conséquence, le nombre de voitures de plus de 30 ans en circulation dans notre pays est donc bien plus élevé que pour celles reconnues « Collection » en préfecture. En outre cette mention gèle la possibilité d’un rétrofit, sauf à demander de revenir à une immatriculation normale.
Quelle est la durée de vie d’une batterie de voiture électrique ? À cette question simple, l’association n’a pas reçu une réponse nette et unanime. Tout simplement parce qu’on ne peut y répondre par quelques chiffres, et que le recul est encore insuffisant. Une batterie de forte capacité pourra très bien satisfaire un automobiliste après 15 ans d’usage, car l’autonomie sera encore potentiellement suffisante pour parcourir localement 150-200 km après recharge complète. Ce qui ne sera pas le cas avec un pack 14,5 kWh de Peugeot iOn, par exemple.
Les rédactrices du rapport ont frappé à la bonne porte en interrogeant Revolte qui a classé en trois types les pannes les plus courantes de batterie : électrique, connectique, chimique. La tendance est à la complexification qui rend de moins en moins faciles les interventions. Alors que c’était techniquement possible sur les Renault Zoé, Citroën C-Zero, BMW i3 et Volkswagen e-Up! du fait d’un coffrage vissé, les nouvelles voitures posent des problèmes à ce niveau.
Si une réparation est envisageable, c’est souvent a minima avec le remplacement d’un module exécuté par un électrotechnicien qualifié. De ses discussions avec des constructeurs et spécialistes du VE, HOP a commencé une liste des bons élèves a priori : BMW, Porsche, Stellantis, Renault. À l’opposé : Tesla, MG et BYD.
« C’est la loterie pour l’automobiliste lors de l’achat puisqu’il n’a pas de moyens de savoir facilement quel modèle dispose d’une batterie réparable ou non, alors que celle-ci coûte de 30 à 40 % de la valeur du véhicule », déplore à juste titre l’association. Elle s’inquiète : « Il n’existe pour l’instant pas de réglementations visant à garantir la réparabilité et le remplacement des batteries ».
Les batteries ne sont pas les seuls éléments qui risquent de rendre les voitures électriques davantage jetables. Ainsi le giga-casting. HOP cite le cas du Tesla Model Y dont une partie arrière est constitué de seulement 2 pièces, contre 70 sur la Model 3. BYD, MG et Hyundai ont déjà adopté cette pratique. D’autres constructeurs comme Toyota, Mercedes, GM, Volvo et même Renault pourraient suivre. Le surcoût des réparations serait aussi emporté par un choix de plus en plus restreint de professionnels capables d’intervenir en cas d’accident par exemple.
Se limiter aux composants électroniques n’est pas plus facile. Revolte a mis en avant qu’aujourd’hui il n’existe « aucune filière d’approvisionnement de pièces détachées internes à ces éléments ». A défaut, c’est tout un dispositif qui serait à remplacer, avec une facture dissuasive démarrant à 4 000 euros pour un chargeur et pouvant s’envoler jusqu’à 25 000 euros concernant une batterie non démontable.
S’ajoute encore à tout cela l’obsolescence par les logiciels qui peut rendre de moins en moins performants les véhicules au bout de quelques années. Le passage à la voiture connectée est aussi un piège du fait de la rétention des informations au profit d’un constructeur ou d’un groupe. HOP y voit des risques importants jouant sur : « la liberté de choisir son garagiste, la possibilité d’effectuer une contre-expertise, la possibilité d’effectuer une autoréparation, la possibilité de réparer à un prix juste et raisonnable ».
Afin de rendre la mobilité électrique viable à long terme pour les automobilistes, HOP formule sept préconisations dans son rapport. Elles touchent à la réparabilité, en intégrant des normes comprenant la durabilité pour les batteries, en garantissant le caractère démontable des véhicules, en favorisant le marché des pièces détachées issues de l’économie circulaire, et en mettant en place un indice qui préviendra le « consommateur au moment de l’achat sur les coûts d’entretien et de réparation qu’il devra assumer au long de la vie du véhicule ».
L’association espère aussi une garantie de dix ans sur les batteries, en privilégiant la réparation au remplacement. L’organisme souhaite une protection des automobilistes contre l’obsolescence logicielle. La dernière préconisation concerne un encadrement de la filière pour prioriser la réparation et le réemploi.
Pour faire entendre sa voix, HOP propose de signer une pétition contre les « futurs voitures jetables ». L’association attend un minimum de 10 000 sympathisants. Mi-mai 2024, plus de 3 400 personnes, dont moi-même, s’étaient déjà reconnues dans cet appel.
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