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En hybridation avec les réseaux d’autocars interurbains, le covoiturage en ligne et sans réservation ajoute une solution concernant les déplacements vertueux au quotidien. Pour nous présenter ce mode de mobilité en plein développement, un dirigeant de la société Ecov et un électromobiliste adhérent qui transporte régulièrement des passagers avec son Tesla Model Y et occasionnellement en Fiat 500e.
Le présent article est à voir comme une suite à l’interview de Jamy que nous avons réalisée en décembre 2024 avant la diffusion sur France 5 de son émission consacrée au thème « Voiture, avion, climat : peut-on encore voyager ? ». L’un des reportages mettait en avant le covoiturage express organisé en ligne à Voiron, dans le département de l’Isère.
L’automobile plus propre étant aussi celle qui reste au repos quand on peut se déplacer autrement ainsi que celle qui accueille à bord d’autres passagers pour un bout de trajet commun, nous avons voulu en savoir davantage sur le sujet et vous présenter cette pratique. Une fois avoir obtenu des éclaircissements de la part de la société Ecov qui cherche à développer cette formule, il restait encore à trouver un automobiliste prêt à témoigner de son implication.
Forcément, nous avions envie de rencontrer un électromobiliste, afin qu’il nous communique ses motivations. Informaticien en début de la quarantaine, Eric est un des conducteurs de la ligne Star’t St1 tracée entre Le Rheu et Cesson-Sévigné, en périphérie de Rennes.
Voiron, Rennes : Combien existe-t-il de lignes de covoiturage express en France ? « Nous en avons créé 60 pour une trentaine de projets. Fondé il y a dix ans, Ecov a d’abord expérimenté en 2016 dans le Vexin une formule s’appuyant sur des stations connectées. Nous avons évolué petit à petit vers le covoiturage en ligne avec une première ouverture deux ans plus tard entre Bourgoin-Jallieu et Lyon », répond Harald Condé Piquer, vice-président d’Ecov, en charge de la gouvernance et de l’impact économique et social.
Le réseau qui se déploie est très proche de ceux des autobus et autocars interurbains : « Nous parlons de lignes express de covoiturage à haut niveau de service. La volonté de les développer est partie du constat que 80 % des kilomètres réalisés pour les déplacements en France sont parcourus en voiture. Le nombre de ces kilomètres ne diminue pas. Le taux moyen d’occupation des véhicules est de 1,4, et descend même à 1,07 pour les trajets domicile-travail ».
À lire aussiShirley, VTC en Tesla Model 3 à Paris : cette Américaine vous fera aimer la voiture électriqueLes offres en transport en commun et en covoiturage classique ne suffisent pas à inverser ces scénarios : « Fixer un rendez-vous à un horaire précis, ça va pour les longs trajets des week-ends et des vacances, mais pas pour le quotidien où le covoiturage classique est souvent perçu comme une perte de liberté. C’est pourquoi les gens préfèrent prendre leur voiture que de s’organiser. Par ailleurs, les offres multimodales fonctionnent très bien dans les grandes villes, mais moins en zones rurales et périurbaines ».
Les lignes sont en général assez courtes : « Nous commençons à avoir des projets plus grands. Aujourd’hui, nous sommes plutôt déployés sur de petites échelles. Bourgoin-Jallieu <> Lyon, c’est quatre arrêts ; Le Rheu <> Cesson-Sévigné, c’est cinq arrêts dans quatre villes. Ce sont des expérimentations localisées. Avec notre modèle, nous intensifions énormément la pratique du covoiturage ».
Quelques chiffres : « Le meilleur jour de janvier 2025, nous avons eu 40 passages de voitures, 20 le matin et autant le soir. Environ 13 % des personnes concernées par la ligne Star’t St1 l’ont empruntée, ce qui correspond au score d’un transport de bonne qualité. Sur ce tracé sans transport en commun, 90 % des usagers étaient des autosolistes. Avec cette ligne, nous arrivons réellement à retirer des voitures de la route. On a 80 % des passagers qui font du covoiturage quotidiennement ».
La ligne est ouverte de 7 h 00 à 9 h 00, puis de 16 h 30 à 19 h 30, du lundi au vendredi. L’utilisation est simple : « Si je suis un passager, je vais à un arrêt, je n’ai rien réservé, mais je sais que je vais trouver une voiture rapidement et parfois immédiatement. Si je suis un conducteur, je lance l’application en partant et je reçois des notifications quand des passagers sont en attente d’un transport ».
Eric a reçu son électrique en septembre 2023 : « Auparavant, j’étais motard au quotidien et j’avais une vieille voiture pour mes autres déplacements. J’en avais un peu marre de cette situation. Le Tesla Model Y me faisait de l’œil. C’est sans doute mon côté technophile et geek. J’ai été convaincu dès que j’ai essayé ce modèle. Je n’ai jamais été aussi content d’avoir une voiture ».
En passant électromobiliste, il est aussi devenu un des conducteurs de la ligne Star’t St1 : « Dès la première semaine, je me suis dit que c’était dommage d’avoir une aussi grosse voiture avec autant de place et de voyager seul. Ma première motivation a été de faire baisser la circulation. J’ai de la quatre-voies à prendre sur la rocade nord de Rennes et passe par une zone d’emploi où c’est très chargé. Il suffit de 4 % de trafic en moins pour qu’il n’y ait plus de bouchons. En corollaire, le volet écolo est important pour moi ».
Le Breton s’est inscrit à deux services : « Je suis sur BlaBlaCar Daily et Star’t. Pour ce dernier, en raison de mon lieu d’habitation, je ne parcours pas toute la ligne. Je commence à Saint-Grégoire et vais jusqu’au terminus qui est tout à côté de mon lieu de travail. Pour l’instant, je n’ai pris qu’une vingtaine de passagers Star’t, dont 16 l’année dernière. Ce qui s’explique par mes allers-retours qui sont un peu tôt par rapport aux horaires de bureau sur le secteur ».
Le rituel est bien rodé : « Quand je démarre le matin, je lance l’appli et j’indique que je vais à mon bureau. Les arrêts près desquels je vais passer se cochent automatiquement. Je retire Alphasis car ça m’obligerait à faire un détour dans les bouchons. Sur l’écran, je vois quand un passager se dirige vers un arrêt et dans combien de temps il y sera approximativement. Il m’arrive de me garer et d’attendre un peu. L’appli me signale aussi quand des personnes sont déjà arrivées sur place ».
Plusieurs voitures peuvent se diriger simultanément vers le même arrêt : « Chaque conducteur a un identifiant unique. C’est le premier qui se gare qui ramasse l’usager. Il est possible de prendre plusieurs personnes en même temps. Le hasard a voulu que la seule fois où j’ai eu trois passagers – 2 BlaBlaCar Daily + 1 Star’t -, c’est un jour où j’avais pris la Fiat 500e de ma femme. À quatre, nous étions un peu serrés dans la petite voiture ».
Comment ça se passe au retour avec des usagers qui veulent aller plus loin que Saint-Grégoire ? « L’application ne me les propose pas. Il m’est arrivé de véhiculer trois jours de suite par hasard un collègue que je ne connaissais pas. Sa voiture étant en panne, il a voulu essayer le service. J’ai aussi pris en charge une dame qui avait déposé son vélo à la révision. Beaucoup empruntent cette ligne parce qu’ils n’ont pas accès facilement aux bus et autres transports en commun. Je revois parfois les mêmes personnes ».
Rouler en électrique permet de démarrer les conversations à bord : « Je trouve que c’est agréable de rencontrer comme ça du monde. J’ai un profil de conducteur sympa. La Tesla Model Y fait parler. Ça commence souvent en rigolant. Les gens sont impressionnés par la taille de l’écran et le style épuré. Ils trouvent que la voiture est agréable, qu’elle ne fait pas de bruit. C’est d’ailleurs aussi ce qui me plaît dans le Model Y. Quand je reviens de la montagne avec, je ne ressens aucune fatigue après plus de dix heures de route ».
Eric reçoit un peu d’argent pour son service : « À condition de lancer l’application et de passer près des arrêts, je reçois déjà 0,50 euro par trajet, soit au minimum 1 euro par jour, même si je n’ai personne à récupérer. Pour chaque passager pris en charge, c’est 1 euro de plus. C’est gratuit pour lui et payé par la métropole de Rennes. Au bout du mois, ça me paye mon électricité. Je recharge depuis chez moi où j’ai des panneaux solaires et un abonnement EDF Tempo. Je roule donc gratuitement ».
La quadragénaire aimerait prendre en charge des personnes plus souvent. Il a cependant une crainte qu’il nous a livrée spontanément : « L’image de Tesla n’est pas vraiment au beau fixe actuellement et ça peut en gêner certains. À Rennes, un mur a été tagué ‘On va vous brûler vos Tesla’. Des gens s’énervent. J’ai remarqué qu’en France, il y a une haine de la voiture électrique. On vit dans un pays qui monte les gens les uns contre les autres. Mais j’aime bien mon Tesla Model Y qui coche toutes les cases de mes besoins ».
La rémunération des conducteurs diffère cependant selon les lignes : « Plusieurs modèles coexistent. Dans les milieux ruraux et en montagne, tous les usagers vivent le covoiturage en ligne dans un esprit de solidarité. C’est toujours gratuit pour les passagers, mais les conducteurs qui donnent un coup de main ne reçoivent pas d’argent. Payer pourrait même être contreproductif ».
Ce modèle existe aussi en Bretagne : « Il s’agit de Covoit’Go implanté dans la région de Brocéliande, avec deux lignes au départ et à l’arrivée de Plélan-le-Grand. Ailleurs, c’est dans les Alpes, en Savoie et en Haute-Savoie, par exemple entre Chambéry ou Aix-les-Bains et la montagne. On retrouve ce modèle en Alsace et en Cœur d’Hérault ».
L’indemnisation des conducteurs par les collectivités aide à lancer les nouvelles lignes : « Lorsqu’un service est bien actif, les collectivités n’ont plus besoin de participer, en particulier pour la partie concernant les trajets à vide. Ainsi pour Lane Lyon où on a pas mal de passagers par rapport aux conducteurs. Aujourd’hui, on cherche à réduire cette indemnisation au siège libre. À Bourgoin-Jallieu, où le service est perçu comme comparable à un très bon transport en commun, les conducteurs sont prêts à participer contre peu gratuitement ».
Eric a d’ailleurs une autre motivation : « J’amortis plus rapidement l’impact carbone à la fabrication de ma voiture électrique par rapport à une thermique. Une plateforme comme BlaBlaCar Daily délivre pour cela un compte-rendu mensuel. En revanche, je n’en ai pas avec Star’t : je dois faire mes calculs moi-même ».
C’est ce que nous avons fait remarquer à Harald Condé Piquer : « Calculer l’impact carbone de notre service n’est pas simple. Sans nos lignes, nombre de passagers prendraient les transports en commun ou covoitureraient autrement. Dans ces cas, le gain en CO2 serait nul. Sortir des chiffres pourrait nuire à notre crédibilité ». Eric n’est pas le seul électromobiliste à s’être proposé en conducteur. Le dirigeant d’Ecov a déjà quelques pourcentages à communiquer : « L’Ademe nous a posé la question pour une enquête. Les voitures électriques représentent 14 %, les hybrides rechargeables 5 %, et les autres hybrides 6 % ».
À lire aussiAvec sa Kia EV6, Hugo économise 5 000 € par an par rapport à son ancienne voiture dieselLe covoiturage en ligne pourrait bien être une solution à développer plus largement que les transports en commun pour décarboner les déplacements : « Trains, autocars et autobus restent limités à leur rentabilité d’exploitation. Alors qu’il est possible de démarrer des lignes de covoiturage partout en France ». Ecov propose d’ailleurs à ceux qui ont identifié des besoins de les signaler sur le site citoyens.ecov.fr : « Nous invitons aussi les lecteurs d’Automobile Propre à télécharger notre livre blanc ‘Des transports express pour tous‘ ».
Automobile Propre et moi-même remercions beaucoup Eric pour son accueil au téléphone, sa disponibilité et son témoignage de covoitureur que nous avons sollicité. Un grand merci également à Harald Condé Piquer qui a bien voulu répondre à nos questions concernant Ecov et la ligne Star’t St1.
Pour rappel, toute contribution désobligeante à l’encontre de nos interviewés, de leur vie, de leurs choix, et/ou de leurs idées sera supprimée. Merci de votre compréhension.
Philippe SCHWOERER
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