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Plombés par une dette majeure, les véhicules électriques en libre-service Autolib pourraient disparaître du paysage parisien. Bolloré, son exploitant, exige 46 millions d’euros par an des collectivités dont la mairie de Paris, qui a exprimé sa volonté de se tourner vers un nouvel opérateur. Certains accusent déjà une gestion floue du service et notamment des batteries facturées à un tarif démesuré.
Baisse du nombre de locations, problèmes d’entretien des véhicules, difficultés pour équilibrer les stations et vieillissement du matériel : Autolib semble avoir atteint le troisième âge. Encensé à ses débuts, le célèbre système de voitures électriques en libre-service parisien est touché par une dette estimée à 293 millions d’euros d’ici la fin du contrat en 2023. Exploitant, Bolloré ne veut pas assumer seul le montant. S’il s’est engagé à compenser un déficit plafond de 60 millions d’euros conformément aux termes du contrat, l’explosion de la dette a conduit l’opérateur à demander un paiement annuel de 46 millions d’euros aux 98 communes bénéficiant du service.
La plus grande, Paris, a qualifié le montant d’ « abracadabrantesque » et veut se tourner rapidement vers un nouveau modèle d’autopartage. Autolib, « une belle invention », est devenu « un peu moins séduisant » selon la maire Anne Hidalgo. Elle a convoqué lundi constructeurs automobiles, loueurs et opérateurs de mobilité pour réfléchir à l’avenir du système. Toyota, BMW, Volkswagen, Daimler et PSA y étaient, aux côtés de Hertz, Europcar et Sixt ainsi que les opérateurs Drivy, Ubeeqo, Zipcar et Communauto. La mairie de Paris souhaitant adopter un système de free-floating (sans station de restitution obligatoire), elle a également invité des acteurs comme Mobike et Scoot Networks.
Les deux géants français PSA et Renault sont sur les starting-blocs pour remporter un contrat qui pourrait voir 20.000 de leurs véhicules en service dans les rues de Paris et sa petite couronne. Un réseau d’autant plus avantageux pour les collectivités qu’il ne nécessiterait aucun fonds public, selon eux. PSA revendique son expérience dans l’autopartage via sa filiale Free2Move qui co-exploite le réseau emov à Madrid. Un libre-service qui compte déjà plus de 180.000 abonnés et 600 Citroën C-Zéro en circulation. La capitale espagnole est également une référence pour Renault, qui y opère le service Zity avec un partenaire local. Un système qui propose 500 Renault Zoé à un coût de 0,26 euros par minute.
Reste à savoir qui assumera le coût de l’abandon prématuré du réseau Autolib actuel. Sur les réseaux sociaux, certains pointent du doigt un gaspillage de fonds publics et d’étonnants procédés entre sociétés du groupe Bolloré. En consultant le document de référence 2015 de la société Blue Solutions, qui fabrique les célèbres batteries LMP des Bluecar utilisées par Autolib, on apprend par exemple qu’un contrat d’approvisionnement à long terme entre les deux filiales fixe un prix d’achat de 38.000 euros hors taxes par accumulateur.
Un prix « ensuite indexé à compter du 1er janvier 2018 sur la base d’une formule de prix dégressive en fonction des volumes », explique le document. Les Bluecar étant quasi-exclusivement fabriquées pour le réseau Autolib, le montant peut troubler. A un tel tarif, le coût ramené au kilowattheure des batteries Bolloré LMP atteint 1266 euros, alors que celui d’une batterie lithium-ion de Renault Zoé 40 est de 180 euros. Interrogée par nos soins à ce sujet, l’agence chargée de la communication du groupe Bolloré n’a pas souhaité nous répondre.
Par voie de communiqué, l’entreprise signale n’avoir « cessé d’alerter le syndicat depuis trois ans de la dérive financière du service sans qu’aucune mesure ne soit prise ». Elle explique regretter « cette polémique, qui va encore nuire à l’image du service et peser sur ses performances ». Bolloré pointe également la concurrence des VTC « à moteurs thermiques [qui] ont eu le droit de circuler [lors de la dernière journée sans voiture à Paris contrairement aux Autolib] ».
Déçu par les propos d’Anne Hidalgo, le groupe ouvre grand la porte à un abandon du service et lance une pique: « Comme pour Velib, qui a été récemment reconcédé à un tiers, le syndicat peut parfaitement reconcéder s’il le souhaite le service Autolib à un nouvel opérateur ». Une page se tourne dans l’histoire de l’autopartage 100% électrique.
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