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Le sujet revient régulièrement sur le devant de l’actualité, mais pas toujours pour de bonnes raisons. C’est quoi le problème avec la voiture électrique à énergie solaire ?
Ils sont une poignée de constructeurs – plutôt inconnus et plutôt des start-up – à croire à la voiture solaire, et à déployer toute leur énergie et leurs moyens pour mener à bien des projets dans ce sens.
Problème, ça n’a pas l’air de se passer très bien. Enfin, pas pour tous en tout cas. Pourtant, quand on parle de transition énergétique et de la voie vers le tout électrique, le solaire a de quoi faire rêver n’importe quel quidam qui sait qu’il devra remplacer de gré ou de force sa bonne vieille fumante par une rutilante électrique dans la décennie.
Car le solaire porte en lui les espérances – ou les croyances – les plus folles, comme celle de pouvoir se fournir en énergie à vie, sans limites, et « gratuitement ». Avec, cerise sur le gâteau, cette satisfaction d’échapper à toute forme de taxe et de ponction étatique.
Bon, on redescend sur Terre. En fait, tout ne se passe pas tout à fait comme prévu, et certains projets de voiture solaire semblent avoir du plomb dans l’aile, quand ils ne sont pas tout simplement abandonnés. L’occasion pour nous de procéder à un petit état des lieux des forces en présence, et à leur bulletin de santé. Vous allez voir, ça tousse un peu.
Commençons par celle qui avait suscité beaucoup d’intérêt avec pas moins de 44 000 pré-commandes, mais qui s’est finalement transformée en un gigantesque flop. La Sono Sion, drôle de voiture électrique au physique d’un autre temps (ou d’un autre monde), entre camionnette et monospace des années 80, promettait de récupérer une trentaine de kilomètres par jour grâce aux 7,5 m2 de panneaux solaires composés de 248 cellules solaires recouvrant l’intégralité de sa carrosserie. Outre l’intégration du « prolongateur » d’autonomie par le photovoltaïque, la Sono Sion attirait les initiés par l’originalité du concept, mais aussi, et peut-être surtout par son prix, annoncé aux alentours de 25 000 euros avant déduction des bonus écologiques. Ce qui permettait d’espérer une petite familiale 5 places avec une autonomie totale correcte de 300 kilomètres pour moins de 20 000 euros bonus déduit, avec en bonus un système de charge bidirectionnelle intégré. Malheureusement, le réalisme financier aura finalement eu raison de ce joli projet, déjà maintes fois retardé, dont l’abandon a été annoncé officiellement fin février, tout simplement parce que les caisses de Sono Motors sont vides et qu’il n’y a plus de trésorerie pour financer le passage à la phase d’industrialisation et de commercialisation de la Sion. Outre les problèmes de trésorerie, il semblerait aussi que le marketing de ce lancement ait été très mal géré, avec un processus aussi abscons que compliqué pour placer une pré-commande, qui pourrait en avoir découragé plus d’un. Il est à noter que les clients ayant versé un acompte ont été contactés par Sono Motors pour obtenir son remboursement.
Chez Lightyear, on peut dire qu’on a le sens de l’adaptation éclair. Alors que la berline de luxe solaire Lightyear 0 à 250 000 euros venait à peine de rentrer en production en décembre dernier, la marque a appuyé sur le bouton Stop des chaines de fabrication pour se concentrer sur le lancement de la Lightyear 2 (on ne sais pas où est passée la 1), une berline qui annonce 800 km de roulage « entre deux charges », et qui devrait juste coûter… 210 000 euros de moins, avec un prix annoncé de 40 000 euros auquel beaucoup d’observateurs ont un peu de mal à croire. Très franchement, si cette auto dont la commercialisation est annoncé pour 2025 semble connaitre un véritable succès si l’on se fie à l’afflux de plus de 60 000 pré-commandes, on peut quand même s’interroger sur le sérieux de la stratégie de la marque néerlandaise, qui zappe sans trembler des genoux d’une offre à une autre en divisant son prix par 6,25, pour un modèle probablement pas si différent du précédent. On se demande aussi si les exemplaires commandés de la 0 seront réellement livrés, si les clients passeront facilement de la 0 à la 2, s’ils seront remboursés… Beaucoup de questions pour un projet qui n’est pas vraiment de nature à rassurer clients et investisseurs. D’ailleurs, depuis l’annonce de la Lightyear 2, la société Atlas, qui détient Lightyear, a déposé un dossier de mise en redressement judiciaire et suspension de paiements auprès d’un tribunal des Pays-Bas. Attendons de voir, mais ça ne sent pas très bon, et l’histoire montre que tous les dossiers de ce genre finissent généralement en faillite définitive quelque temps après.
Aptera est probablement l’acteur le plus ancien dans la course à la voiture solaire. Présent depuis 2006 sur le marché (de la promesse), le constructeur californien a déjà connu de nombreuses péripéties et peut être considéré comme un survivant près être passé par un premier dépôt de bilan en 2011, puis une renaissance en 2020. La marque semble cependant tenir la rampe pour le moment, et continue patiemment et méthodiquement le développement de sa drôle de voiture solaire, tout en cultivant une certaine transparence, ce qui est tout à son honneur. Ce qui ne laisse pas de susciter une forte attente pour cet engin atypique à trois roues doté d’un carénage qui le fait plutôt ressembler à un avion qu’à une voiture, tant le poids et l’aérodynamique ont été étudiés et travaillés. L’autonomie annoncée serait de 1000 kilomètres, avec en prime des performances dignes des meilleures Tesla, le tout pour un prix très contenu mais « subject to change » de 33 200 dollars. Seul petit souci, si les précommandes sont bien ouvertes depuis… des années, et l’unité de production en place, le projet semble avoir encore du mal à décoller, et on attend toujours les premières livraisons, toujours sans aucune indication de délai ni de date. Autre détail pratique, l’Aptera Sol, malgré son fort encombrement, aérodynamique oblige, est une sorte de coupé ne pouvant transporter que deux personnes et un surf. Autrement dit l’emprise au sol d’une très grosse berline et la capacité d’emport d’un vélo cargo…
Voilà pour les marques « pure players » qui sont nées avec l’électrique et ayant construit leur projet industriel et marketing autour du photovoltaïque. Mais elles ne sont plus seules sur le marché. Les constructeurs traditionnels ou en tout cas se voulant généralistes ont emboîté le pas, non pas pour concevoir des voitures solaires, mais pour saupoudrer leur production de cellules photovoltaïques dans un esprit de prolongation d’autonomie, en complément de recharge de la batterie principale. C’est le cas de Mercedes avec son prototype à très grande autonomie EQXX, de Fisker avec son Ocean, dont la commercialisation européenne devrait débuter dans les prochaines semaines, aux cellules solaires intégrées dans le toit transparent, pouvant produire « de quoi parcourir 2500 à 3000 km par an ». De son côté, le coréen Hyundai avait laissé entendre au lancement de la Ioniq 5 que le toit de celle-ci serait doté de cellules photovoltaïques, mais le projet semble avoir été abandonné sur les modèles de production, en tout cas jusqu’à ce jour.
Bien que l’idée semble prometteuse pour éliminer les énergies sales et réduire les temps d’attente pour la recharge, plusieurs obstacles doivent être surmontés en matière de voiture solaire. Le premier est l’incapacité des panneaux solaires à produire suffisamment d’énergie pour faire avancer une voiture, ce qui nécessite des améliorations technologiques. Deuxième obstacle l’énergie solaire variable ou insuffisante dans les pays ayant peu d’ensoleillement. D’un point de vue pratique, intégrer des cellules photovoltaïques dans la carrosserie d’une voiture est une chose, les rendre efficientes de façon optimale en est une autre, car on doit répondre à plusieurs problématiques d’usage, à commencer par le rendement du panneau solaire, mais aussi l’exposition au soleil en fonction du lieu, l’inclinaison des panneaux, l’orientation de la voiture, sans parler du temps passé à l’ombre… ou dans un parking souterrain. Cependant, des innovations prometteuses sont en cours de développement pour améliorer ces aspects, tels que des panneaux solaires plus efficaces, ainsi que des panneaux solaires capables de récupérer de l’énergie à partir de la pluie, développés par des chercheurs chinois.
De fait, même en installant des panneaux solaires d’une superficie de 3m2 sur une voiture, la production d’énergie ne dépassera pas les 300w par temps ensoleillé. Cette quantité d’énergie produite est insuffisante pour propulser un véhicule, même léger, et peut seulement fournir une charge complémentaire faible d’environ 8 à 10 fois moins puissante que celle obtenue à partir d’une prise électrique standard domestique de 220 volts, dont la puissance est de 2,4 ou 3,7 kW. En pratique, en laissant la voiture exposée au soleil pendant une période de 10 heures, l’énergie produite serait d’environ 3 kWh, ce qui peut dans le meilleur des cas correspondre à une distance de 20 kilomètres.
Malgré ces obstacles, le développement de technologies plus avancées est en cours, ce qui permettra aux voitures électriques alimentées par l’énergie solaire de devenir une réalité dans un avenir proche. Mais entretemps, il risque d’y avoir encore beaucoup de casse pour celles et ceux qui seront tombés dans le panneau.
Rendez-vous dans 15 ans, sous le soleil exactement ?
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