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Pour faciliter la vie des conducteurs, les voitures affichent l’autonomie restante. Cependant, celle-ci peut être trompeuse lors des longs trajets sur autoroute.
En voiture thermique, il est rare d’évoquer l’autonomie totale et seule la consommation exprimée en l/100 km compte vraiment. En revanche, les choses diffèrent nettement avec une voiture électrique, où l’autonomie totale prime. Et pour cause : la norme d’homologation WLTP, et donc les constructeurs, mettent surtout l’accent sur le rayon d’action total, laissant de côté la consommation, qui plus est officiellement grevée des pertes liées à la recharge en courant alternatif. Une sérieuse usine à gaz, qui pousse donc tout les conducteurs à ne retenir que l’autonomie.
Conditionnés par les valeurs placardées, les clients n’ont donc d’yeux que pour l’autonomie de leur voiture électrique, aussi indiquée sur le tableau de bord. Et c’est surtout le cas aux Etats-Unis, où les conducteurs ne jurent que par l’autonomie estimée par le véhicule. Certains se livrent un amusant concours sur les réseaux sociaux où le jeu consiste à atteindre la plus haute valeur après une recharge complète. D’autres configurent l’affichage de manière à avoir une jauge en kilomètres plutôt qu’en pourcentage. Un comportement que nous avons pu confirmer lors de nos différents essais outre-Atlantique, où les véhicules étaient configurés de cette manière.
À lire aussiAvec la norme WLTP, pourquoi la consommation annoncée ne correspond pas à l’autonomie homologuée ?Cependant, cette solution a bien des limites. Et Tesla en fait actuellement les frais suite à une plainte collective sur son marché domestique : d’après de nombreux propriétaires, l’algorithme qui sert à calculer l’autonomie restante enjoliverait les valeurs. Celle-ci serait trop optimiste au dessus de 50 %, avant de se rapprocher de la réalité en fin de charge. Le but : projeter sous les yeux des clients des chiffres confortables. La méthode peut être trompeuse pour les conducteurs, mais les Tesla ne sont pas les seules à être configurée de cette manière.
La formule mathématique pour trouver l’autonomie est toute simple. Il suffit de diviser une capacité utile de la batterie par une consommation moyenne pour obtenir une autonomie restante théorique. Autrement dit, une voiture avec 60 kWh de capacité et une consommation de 20,0 kWh/100 km pourrait parcourir 300 km. Cette même voiture, avec 50 % de charge restante et désormais une moyenne de 23 kWh/100 km, n’aurait alors que 130 km d’autonomie avant la panne.
C’est cette formule qu’utilise les différentes normes d’homologation pour définir l’autonomie mixte d’une voiture, entre 100 et 0 % de charge. Ces mesures officielles, mais aussi celles menées en interne, permettent aux constructeurs d’élaborer les algorithmes qui calculeront du mieux que possible l’autonomie restante en fonction de la charge de la batterie. La logique est sensiblement la même, mais il peut exister des différences.
En fonction des routes empruntées et détectées par l’électronique, le système repose alors sur des consommations types. La voiture peut alors estimer une valeur d’autonomie comme nous venons de le voir. Cependant, d’autres paramètres sont pris en compte comme la température extérieure, l’usage des périphériques, les consommations sur les derniers kilomètres (de 50 à 100 km en fonction des marques), et même les habitudes de conduite précédentes pour les systèmes les plus intelligents. Pour plus de régularité, il semblerait que les formules reposent sur le taux de charge affiché, généralement plus bas que le taux de charge réel de la batterie (SoC BMS) entre 0 et 50 %. Enfin, certains dispositifs peuvent aussi prendre en compte le kilométrage supposé qu’il serait possible de parcourir sous 0 %, et donc sur le reste de charge réel de la batterie. Mais tous les systèmes ne sont pas aussi dynamiques et rapides les uns que les autres, ni même vraiment représentatifs de la réalité. On en a pour preuve nos différentes observations menées sur la route lors de nos essais longues durées dans le cadre des Supertests.
Il existe deux manières de rentrer dans le cerveau des voitures. La plus simple, et accessible à tous, est de noter la différence d’autonomie estimée par la voiture et de comparer avec le kilométrage réel effectué entre deux points. C’est ce que nous avons fait entre deux bornes de recharge sur autoroute, avec des trajets de plus de 100 km sur autoroute avant et après ces mesures, tout en ayant activé la navigation. Ce qui signifie que les systèmes ont, en théorie, au moins eu le temps de se calibrer correctement et d’anticiper celles à venir pour les systèmes intelligents, sur un terrain où les estimations peuvent poser problème. Avec une telle méthode, on s’aperçoit rapidement des capacités de chacune à estimer efficacement l’autonomie.
À lire aussiTesla : une autonomie mensongère sciemment cachée aux clients ?La palme revient au BMW iX xDrive50 qui, lors de notre essai (là encore, cela peut varier selon les habitudes de chacun), a présenté un écart de -7,8 % en « consommant » 141 km d’autonomie estimée pour 130 km réels. A l’autre bout du tableau on découvre la Peugeot e-208, qui fait montre d’un écart considérable de -50,8 % : d’après l’ordinateur de bord, la voiture a avalé 260 km d’autonomie pour 128 km réel. Soit une erreur de 132 km !
Toujours selon nos chiffres, le Tesla Model Y Performance que nous avons déjà eu l’occasion de mesurer en Supertest n’est pas à la meilleure position, avec une perte de 213 km d’autonomie estimée contre 153 km réels (-28,2 %). Il se situe entre un Skoda Enyaq (-27,7 %) et la Leapmotor T03 (-28,6 %). Si cette méthode d’analyse est rudimentaire, on vous l’accorde, elle permet de situer la marge d’erreur d’un véhicule électrique et de ne pas se faire berner par l’autonomie restante estimée. Et elle permet déjà de mettre en lumière les différences d’un véhicule à l’autre.
Les écarts observés reflètent non seulement les capacités de chacune à prédire l’autonomie à venir en fonction des consommations précédentes, mais aussi les choix qui ont été faits : sans doute pour des raisons marketing et pour rassurer l’acheteur, certaines voitures oublient totalement les consommations précédentes lors de la recharge. Et elles peuvent aller jusqu’à afficher l’autonomie WLTP à 100 % de batterie, même après une recharge au milieu de l’autoroute, là où la consommation atteint des sommets ! Voilà une bien drôle de surprise lorsque l’on sait que l’autonomie dans ces conditions peut alors être inférieure de l’ordre de 40 % par rapport à l’autonomie WLTP selon nos mesures. C’est le cas de nombreuses voitures chinoises, mais aussi d’autres véhicules électriques à l’image de ceux du groupe Stellantis. Malgré un trajet autoroutier précédent de plus de 150 km, une Peugeot e-208 a estimé une autonomie totale de 362 km à 100 %…identique à la valeur WLTP. Dans ces conditions, nous lui avons calculé une autonomie réelle de 221 km !
En phase de recharge, entre 10 et 50 % de charge, le compteur d’autonomie de la citadine française indique en moyenne 13 km de plus par tranche de 5 %. Une fois la barre des 50 % passée, l’ordinateur estime gagner 25 km selon par tranche. Pourtant, la jauge exprimée en pour cent est assez linéaire. Et la Peugeot n’est pas une exception. Nous avons remarqué le même phénomène avec une Fiat 500e, où les autonomies sont trop optimistes au dessus des 60 % de charge, et plus réalistes en dessous. Voilà qui peut semer le trouble pour les conducteurs qui comptent avant tout sur l’autonomie affichée.
Selon une basique règle de trois, en se basant sur la capacité annoncée de la batterie, la consommation prise en compte par le système serait non seulement décorrélée de la réalité, mais très optimiste en haut de la jauge. D’après les autonomies indiquées (en partant du principe que la charge cachée sous la barre des 0 % ne soit pas prise en compte), la Peugeot e-208 se baserait sur une consommation de 12,2 à 16,4 kWh/100 km entre 100 et 10 % de charge, et de 13,3 à 18,7 kWh/100 km pour la Fiat. Dans le même temps, l’ordinateur de bord indiquait des consommations respectives de 20,8 et 20,2 kWh/100 km sur le même trajet autoroutier qui nous a servi de base de mesure. Si certains ordinateurs de bord peuvent s’adapter très rapidement en passant d’une consommation en ville à l’autoroute, il apparaît nettement que d’autres pourront mettre bien plus de temps. Dans ce dernier cas, les surprises ne seront donc pas impossibles !
Cependant, remarquons que toutes les voitures ne sont pas toutes logées à la même enseigne en la matière. Des mesures similaires sur une Kia EV6 ont présenté une formule de calcul rapidement adaptative et plutôt linéaire sur l’ensemble de la charge, mais avec une surestimation en fin de charge pour ne pas surprendre les conducteurs. Lors d’un trajet type, le crossover est passé d’une consommation théorique de 24,6 kWh/100 km à 66 % de charge à une valeur de 28,3 kWh/100 km à 23 % de charge. Dans le détail, l’autonomie estimée est passée de 208 à 63 km, pour un parcours de 125 km exactement avec une moyenne de 27,5 kWh/100 selon le tableau de bord à ce moment.
Le calcul de l’autonomie estimée est une véritable usine à gaz. En revanche, elle n’est en aucun cas un indicateur de l’autonomie réelle du véhicule. Surtout, l’algorithme qui sert à calculer ces estimations n’est soumise à aucune règlementation claire. Les constructeurs sont donc libres d’afficher l’autonomie WLTP à 100 % s’ils le veulent, ou à l’inverse de faire le choix de valeurs moins séduisantes mais réalistes. Si cette dernière méthode fera crier au scandale, elle a le mérite d’être claire.
Mais précisons aussi que le calcul inverse est possible, et que la voiture peut estimer bien plus d’autonomie si les conditions sont favorables. C’est par exemple le cas lorsque l’on roule sur une route nationale plate, avec des températures optimales : la valeur d’autonomie peut être supérieure à celle de départ, alors que le véhicule a bel et bien consommé de l’énergie. Ce cas là montre toute la complexité qui se cache derrière ce chiffre affiché au tableau de bord.
Dans un sens comme dans l’autre, il peut être assez trompeur de ne retenir que cette seule valeur pour anticiper ses ravitaillements : en cas de mauvais calcul, il est possible de se retrouver en panne ! Nous vous conseillons donc de plutôt faire confiance à la jauge en pour cent qui, même si elle n’est pas représentative de la capacité restante dans certaines situations, se montre bien plus linéaire, stable et réaliste que la jauge exprimée en kilomètre. Voilà pourquoi nous faisons tous confiance au pourcentage restant sur notre téléphone, et non pas à la durée d’autonomie estimé par le système.
Reste que des précautions sont à prendre : certains véhicules peuvent projeter une jauge décalée, comme nous l’avons découvert à bord du Nissan Ariya. De plus, certaines voitures peuvent légèrement accélérer la perte de pour cent en fin de charge pour pousser le conducteur à recharger rapidement. Enfin, il est important de noter que si la capacité de la batterie est moindre (froid en hiver, perte de capacité dans le temps, …) la jauge sera toujours exprimée sur une échelle de 0 à 100 %. Par exemple, si une voiture ne dispose plus que de 54 kWh de capacité utilisable au lieu de 60 kWh lorsqu’elle était neuve, elle affichera 100 % lorsqu’elle aura le plein, et non pas 90 % maximum.
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