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Toutes les voitures hybrides ne se ressemblent pas. Et surtout pas le Nissan Qashqai, qui inaugure la technologie e-Power en Europe.
Pour de multiples raisons techniques, financières ou stratégiques, les constructeurs automobiles n’utilisent pas tous les mêmes configurations mécaniques pour leurs motorisations électrifiées. Et c’est notamment le cas avec les solutions hybrides, où plusieurs configurations existent. L’une des curiosités nous provient une nouvelle fois du Japon : la technologie e-Power est celle qui se rapproche le plus de la propulsion électrique idéologiquement. Explications.
Derrière ce nom inédit en Europe se cache une mécanique qui a fait ses armes au Japon avec la Nissan Note e-Power, qui lui a redonné une seconde jeunesse : elle est devenue la voiture la plus vendue sur l’archipel (hors indéboulonnables kei cars) avec une très grande majorité de moteurs e-Power. Son secret ? Une configuration presque unique, où seul un moteur électrique entraîne les roues, alors que le moteur thermique ne fait office que de générateur d’électricité. Un système similaire à celui de la Fisker Karma ou de la BMW i3 REx. Ou même à la solution Voltec de l’Opel Ampera de première génération, bien que le constructeur ait omis d’indiquer que le moteur thermique avait bel et bien une connexion aux roues par moment.
À lire aussie-Power : on a testé la voiture hybride pour tous de NissanAu Japon, le discours est bien rodé : cela offrirait tous les avantages de l’Electric Feeling Drive tant mis en avant par Nissan, tout en se débarrassant de ses inconvénients. Surtout que pour mieux souligner sa philosophie, la Note empruntait plusieurs éléments à la Nissan Leaf, comme le moteur, un bout de batterie, le sélecteur de marche avant/arrière ou même le système e-Pedal. Elle bénéficiait alors de l’agrément et l’instantanéité d’une petite électrique, tout en présentant une autonomie dans la limite du réservoir à… essence. À l’usage, difficile de faire la différence avec une hybride classique, d’autant que les composants n’étaient tout à fait bien dimensionnés ni optimisés. Mais de l’eau a coulé sous les ponts depuis 2017 et la technologie e-Power a effectué une nécessaire mise à jour technique pour l’Europe.
Le principe est toujours le même : le moteur électrique installé à l’avant est alimenté par la batterie, elle-même rechargée par le moteur thermique. C’est le principe de base d’un fonctionnement dit hybride-série. Il se différencie donc du système hybride-parallèle de Toyota et l’on y retrouve un fonctionnement similaire chez Mitsubishi ou sur la technologie e:HEV (anciennement i-MMD) de Honda. Dans ces derniers cas, le mode hybride-série est possible selon certaines phases de roulage, mais le moteur thermique peut toujours entraîner les roues à haute vitesse, là où le moteur électrique n’est pas le plus efficient.
Ce que ne fait pas le dispositif e-Power qui est composé, dans l’ordre de la chaîne d’alimentation, d’un moteur thermique, d’un générateur (que Nissan n’appelle pas tout à fait un moteur électrique comme Honda), d’une batterie, d’un onduleur et d’un moteur électrique. Une configuration fixe, donc, qui développe une puissance totale de 190 ch (140 kW) pour 330 Nm de couple, disponible avec tous les modes de conduite. C’est donc les valeurs du moteur électrique qui font foi sur la fiche technique.
Contre toute attente, la pièce maîtresse de ce schéma est la mécanique thermique, qui diffère sensiblement du modeste HRD12DE de la Note éponyme (qui continue toujours sa carrière avec la nouvelle génération de la citadine). Car si la puissance de cette unité n’a pas d’importance pour faire avancer la voiture, et pas vraiment pour la production d’énergie dans une petite voiture, Nissan a dû profondément revoir sa copie pour une application dans un SUV et pour satisfaire les normes européennes.
La génératrice thermique est un 3 cylindres 1,5 l, d’une puissance de 158 ch (116 kW) pour 250 Nm de couple. Un petit moteur, sans doute limité par les règles des émissions de CO2, mais aussi par la place disponible dans la baie, puisque monté longitudinalement. Ce KR15DDT (DOHC, injection directe, turbo) qui porte l’acronyme VCR est le second à utiliser un taux de compression variable en série, la primeur ayant été donnée à Infiniti aux États-Unis. Son objectif est de faire évoluer les rapports volumétriques en fonction des besoins, avec des ratios de 8:1 à 14:1 ici. Pour y arriver, les ingénieurs Nissan ont développé un système qui augmente ou réduit la course du piston via un actionneur en fonction de la demande en puissance. La solution technique est donc parfaitement similaire à celle du moteur VC-T, que l’on retrouvait par exemple sur l’Infiniti QX50 par exemple.
Dans la plupart des situations, lorsque la demande en puissance est raisonnable, le moteur privilégie un taux de compression élevé, gage d’efficience et d’émissions réduites. À l’inverse, un taux de compression faible favorise la puissance. Dans les deux cas, le mode d’injection est parfaitement conventionnel puisqu’il s’agit d’une injection directe homogène et non pas stratifiée. Aussi, c’est un régime de rotation de 4 800 tr/min qui est conservé le plus souvent, là où le pic de couple du moteur est atteint. Mais le système peut faire varier le régime en fonction des besoins en énergie, mais aussi pour ne pas créer de décalage entre le régime moteur et la vitesse.
Car c’est là l’un des reproches que nous avons formulé à ce type de système hybride, où le moteur a tendance à brailler plus fort que la voiture n’avance. Une sensation assez similaire à celle que peut procurer une mécanique hybride Toyota en raison de sa transmission à train planétaire. Mais la technologie e-Power se démarque par un moteur électrique qui offre toujours du répondant, quand un système HSD donne l’impression de dilapider de la puissance dans l’air. Mais pour améliorer encore l’expérience, les ingénieurs Nissan ont développé le dispositif Linear Tune qui fait varier les régimes en fonction de la pression sur l’accélérateur et la vitesse, même s’il n’est pas tout à fait nécessaire de le faire. Une solution qui s’avère plus intéressante que les faux passages de rapports qui apparaissent de plus en plus sur des mécaniques dépourvues de boîtes à vitesse (Ford Kuga Hybrid, Honda Civic e:HEV,…).
Le moteur est directement connecté à un générateur électrique qui produit 110 kW de puissance. Il s’occupe de recharger la batterie installée sous les sièges avant, lorsque celle-ci arrive à son seuil de charge minimal. Mais il vient aussi épauler directement la pile lors des fortes sollicitations pour combler le déficit de puissance. Car la batterie de 1,97 kWh de capacité nette (2,1 kWh bruts) ne peut produire qu’un maximum de 60 kW (80 ch), soit un niveau de puissance bien en dessous des 140 kW (190 ch) que peut encaisser la machine électrique. Précisons que la batterie repose sur 96 cellules et est sous tension 346 V. Elle n’est évidemment pas rechargeable par une source d’alimentation extérieure et ses seuils de fonctionnement se situent entre 25 et 75 % de SoC. Cela permet dans la limite basse de conserver un tampon nécessaire pour assurer un fonctionnement correct du système (bien qu’il puisse le faire techniquement), mais aussi de ne pas voir les performances s’écrouler en charge basse.
La question du rendement total de cette motorisation se pose toujours face à ces nombreux intermédiaires. Cependant, Nissan n’a pas été en mesure de nous fournir l’information pour le moment, mais de préciser que le bloc thermique peut présenter un taux de 38 % en moyenne, avec un rendement thermodynamique proche des 40 % avec le taux de compression le plus élevé. C’est finalement assez proche des mécaniques atmosphériques à cycle Atkinson (Toyota ou Honda), qui réussissent à présenter des valeurs records de 41 %.
Avec des composants plus gros et une technologie bien plus élaborée que sur la Note, le système e-Power devrait se montrer à la hauteur du Nissan Qashqai qui inaugure la mécanique en Europe. C’est ce que permet sa plateforme CMF-CD, alors que celle du Juke Hybrid (CMF-B) n’a pas d’autres choix que de recourir à la solution e-Tech de Renault. Cependant, si le principe veut avant tout mettre au premier plan l’Electric Drive Feeling, le système s’apparente bien plus à une mécanique hybride conventionnelle au volant, qu’à une mécanique électrique épaulée par un groupe électrogène comme pouvait le présenter la Note. Une petite nuance qui a son importance.
En arrivant en Europe, le système est présenté bien différemment par Nissan pour ne pas perturber la clientèle. Car à l’arrivée de la technologie au Japon, Yokohama adorait affirmer que la motorisation bénéficiait de tous les avantages de la propulsion électrique sans avoir à se soucier de la recharge. Mais l’un des précurseurs du Zéro Émission oubliait alors volontairement d’indiquer que l’un des avantages premiers de la motorisation électrique est justement de ne pas émettre de CO2. Ce que ne fait pas la solution e-Power.
Sur les bancs de l’homologation WLTP, le Nissan Qashqai e-Power affiche une consommation de 5,3 à 5,4 l/100 km (119-123 g/km de CO2) en fonction des configurations. L’objectif apparaît comme réussi sur les plaquettes. Pour mettre en perspective, un Toyota CH-R avec son 2,0 l hybride de 184 ch au total navigue entre 5,2 et 5,3 l/100 km (118-121 g/km), et le RAV4, du segment supérieur, s’affiche entre 5,6 et 5,8 l/100 km (126-132 g/km) avec son gros 2,5 l d’une puissance totale de 218 ch.
Il existe deux façons de voir les choses en matière d’électrification. Sur le strict plan du carburant, le Qashqai est un hybride puisque de l’essence est nécessaire à son fonctionnement. Les choses diffèrent sous le capot cependant. Mais le e-Power n’est pas vraiment un hybride (le moteur thermique ne contribue pas directement à la rotation des roues), et son seul moteur électrique n’en fait pas pour autant une voiture électrique : n’oublions pas que le Qashqai dispose d’une sortie d’échappement.
Quelle que soit l’approche philosophique que l’on peut se faire, le Nissan Qashqai e-Power disposera bel et bien d’une carte grise hybride, avec l’acronyme EH à la case P.3. Il ne profitera donc d’aucun bonus écologique, ni de malus, pour le moment. Un sursis dont compte bien profiter Nissan, qui voit en sa motorisation une solution de transition vers le tout électrique, qui plus est plus pertinente que les solutions hybrides rechargeables. Retrouvez bientôt notre essai pour savoir s’il peut tenir ses promesses.
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