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Vous pensez être propriétaire de votre voiture électrique ? Désolés, nous avons une mauvaise nouvelle pour vous.
Avec la déferlante électrique, en cours et à venir, émergent de de nombreuses innovations technologiques qui changent notre rapport à l’automobile. Parmi elles, la plus en vue est certainement la conduite autonome, mais elle n’est pas la seule. Les planificateurs d’itinéraires, les applications permettant de trouver des bornes de recharge et de s’y connecter font également florès. Sans parler des dispositifs permettant de se connecter à sa voiture à distance, d’en contrôler les paramètres, de la surveiller, et d’agir sur certaines commandes.
Mais on parle moins d’un changement pourtant plus profond, qui s’opère à bas bruit, et qui est en train de complètement rebattre les cartes. Ce changement c’est celui qui consiste à ce que nous soyons de moins en moins « propriétaire » de notre voiture. C’est une évolution progressive et qui avance à petites touches, mais qui concerne tous les aspects liés au fait de « posséder » une auto.
Des changements encore une fois rendus possibles par la technologie, parfois imposés par des considérations financières, mais dans lesquels la politique, l’écologie, les notions de sécurité et même de « morale » ont aussi leur part.
État des lieux d’une révolution silencieuse.
C’est désormais devenu chose courante, ou en tout cas en train de le devenir, on peut mettre à jour sa voiture électrique comme son smartphone ou sa liste de recettes Thermomix. Tesla a ouvert le bal non sans un certain talent depuis plusieurs années, et « améliore » ses voitures (pardon, celles de ses clients, lapsus révélateur) à distance en poussant régulièrement des updates qui apportent de nouveaux services, de nouvelles fonctionnalités, et même, parfois, un surplus de puissance. Les autres constructeurs s’y mettent avec plus ou moins de bonheur, tant cette opération semble complexe à opérer sur des voitures qui n’ont pas intégralement été conçues autour de cette possibilité. Mais c’est la tendance et on ne reviendra pas en arrière.
Problème, avec l’informatique et les objets connectés, on fait ce que l’on veut. Ce qui signifie qu’on peut aussi retirer des choses. Si la plupart du temps les mises à jour apportent des fonctionnalités supplémentaires, elles peuvent également être synonymes de retour en arrière, voire de suppression ou de dégradation d’une fonctionnalité. C’est le cas notamment avec Tesla qui s’est amusé un beau jour à réduire l’autonomie de certaines versions de sa Model S pour préserver la longévité des batteries. Sans prévenir ses clients bien sûr. En 2021, ce sont les radars intégrés dans les Tesla qui faisaient les frais d’une nouvelle mise les désactivant, ce qui les rendait inopérants dans la fonctionnalité Autopilot de conduite autonome, puisque selon le constructeur les caméras seules pouvaient assurer cette dernière de façon plus efficace. Avant un revirement qui ressemble pour certains à une régression, au point d’inquiéter quelque peu les propriétaires des modèles concernés et qu’ils envisagent d’éviter la mise à jour.
Autre tendance accélérant la « dépossession » de nos voitures, la possibilité d’installer et activer des options supplémentaires après l’achat. C’est malin et probablement adapté à certains usages (par exemple louer une option climatisation seulement pendant les mois d’été). Mais d’une part ce n’est pas donné, d’autre part cela participe aussi à ce sentiment que l’on est dans une auto qui ne nous appartient pas, et que nous dépendons finalement du bon vouloir du constructeur. C’est le cas notamment avec le Function on Demand ou FoD disponible sur la Porsche Taycan, qui permet par exemple pour 10,72 à 19,50 euros par mois selon l’option d’ajouter à sa voiture le Porsche Intelligent Range Manager ou l’InnoDrive (sorte de pilote automatique). Si on arrête de payer, l’option est supprimée. Jusque là, pas de problème puisqu’il s’agit d’un choix délibéré, mais que se passera-t-il en cas de litige sur une fonction ou un paiement ? Il se passera probablement que les souscripteurs à ce genre d’options réaliseront qu’ils ne sont pas propriétaires de l’intégralité de leur auto.
Certes, pour l’instant, cette possibilité n’est pas encore très répandue, mais on peut imaginer qu’elle concerne progressivement de plus en plus de fonctionnalités, jusqu’à permettre de se façonner une voiture sur mesure, et surtout évolutive ou « dé-évolutive » dans le temps en fonction de ses besoins, de son humeur… et de ses moyens.
Si le propriétaire d’une Tesla a le malheur de faire un peu de tôle froissée, cela peut être le début des ennuis. Outre une éventuelle rareté des pièces qui induit des délais d’attente parfois importants, il devra aussi subir la contrainte de faire réparer sa voiture chez un carrossier agréé labellisé Tesla. Ce qui a pour conséquence de ne pas vraiment pouvoir choisir son réparateur, mais surtout de bloquer une réparation chez un prestataire non agréé. Comment est-ce possible ? Tout simplement parce que les voitures modernes sont équipées de multiples capteurs auxquels seuls les réparateurs agréés ont accès pour pouvoir le cas échéant les désactiver. Ainsi, un banal changement ou défroissage de bouclier arrière risque de coûter très cher et de n’être faisable que chez un carrossier adoubé par la marque, puisque ce dernier doit payer pour accéder aux différents systèmes de diagnostics avancés de Tesla. Encore un signe qui donne cette désagréable impression que l’on ne « possède » pas sa voiture, mais que c’est bien la marque qui impose ses choix.
L’évolution des technologies, notamment dans le domaine de la conduite autonome, permet déjà de s’affranchir d’un conducteur dans certaines situations, mais aussi d’un propriétaire. Les services de ridesharing vont se multiplier, et les nouveaux consommateurs qui n’ont que faire de posséder une auto se déplaceront à bord de voitures avec ou sans conducteur, louées occasionnellement selon leurs besoins, comme avec Citiz par exemple. Côté voitures sans chauffeur, c’est encore Tesla qui était censé montrer la voie en permettant aux propriétaires de Model 3 dotées de la version la plus évoluée de son Autopilot de la mettre à disposition en location en mode conduite autonome. Selon Elon Musk, cette possibilité incroyable devait arriver dès fin 2020. On attend toujours, et seuls les naïfs et ceux qui ne connaissent pas la notion d’« Elon time » y ont cru, évidemment.
Mais si cela arrive un jour, ce sera une entaille de plus dans la notion de propriété automobile. Et n’oublions pas que ceci est rendu possible par la propulsion électrique.
Si l’expérience de Renault avec la Zoé n’a pas perduré, certains constructeurs proposent – ou imposent – encore la location de batteries associée à la vente de leurs modèles. C’est le cas entre autres du vietnamien VinFast, qui compte sur cet habillage tarifaire pour afficher des tarifs de vente moins élevés, avec en contrepartie la location de la batterie, gage de tranquillité selon lui, et de longévité, moyennant un prélèvement d’un montant situé entre 120 et 150 euros par mois. C’est une autre façon de ne pas être totalement propriétaire de sa voiture.
Enfin, plus classiquement au chapitre financier, il ne vous aura pas échappé que les constructeurs tentent de plus en plus de « dissimuler » le prix de vente de leurs productions, au profit d’offres toujours plus clinquantes – et tentantes – de location longue durée. Une façon de faire passer la pilule en affichant des mensualités alléchantes, car la structure de tarification de la LLD peut effectivement paraître intéressante de prime abord, et permettre d’accéder à des modèles dont l’achat par d’autres moyens de financement serait difficilement réalisable. Cela étant, il est quand même une petite entrave qui oblige les constructeurs à afficher les tarifs avec leurs gammes électriques, c’est celle du bonus écologique, puisque pour savoir si un modèle est éligible, il faut connaitre son prix de vente. Difficile dans ce contexte de se passer de cet affichage dans une campagne marketing, puisqu’il constitue un élément clé de la négociation. Cela étant, la LLD a le vent en poupe, ce qui vous garantit sans aucune équivoque de ne jamais être propriétaire de votre voiture.
On le voit, la voiture – a fortiori électrique – est de moins en moins un produit fini, et le fait d’en avoir une dans son garage ne signifie plus que nous en soyons totalement et intégralement propriétaire. Un nouveau paradigme qui ne concerne d’ailleurs pas que l’automobile. Si l’on jette un coup d’œil sur certains produits numériques et connectés comme les smartphones, et notamment ceux d’une certaine marque avec une pomme, on a compris depuis longtemps que c’était le constructeur qui dictait sa loi sur ce que l’on peut faire ou ne pas faire avec son téléphone même quand cette possibilité n’est pas liée à une limitation technique.
Une question vient alors à l’esprit, parmi d’autres. Que se passerait-il si un gouvernement décidait d’imposer de façon autoritaire aux constructeurs un bridage des puissances ou une limitation de la vitesse par l’installation forcée d’une mise à jour ? C’est techniquement possible sur nombre de voitures, et ce scénario ne paraît pas si farfelu quand on voit comment les gouvernements ont réduit sans aucune difficulté les libertés individuelles et collectives lors de la crise du Covid. Crise énergétique aidant, et sous la pression de quelques lobbies écolos, il ne serait pas plus surprenant que cela que cette idée germe dans le cerveau de quelque élu en mal de publicité, trop heureux d’interpréter à sa façon la petite musique de la fin de l’abondance. Pour notre bien, évidemment, et de façon temporaire, il va de soi.
Une vision probablement dystopique et quand même difficile à appliquer étant donné la disparité du parc automobile actuel, mais qui nous ferait réaliser de façon assez brutale que nous ne sommes pas propriétaires de notre auto. Et que nous risquons de l’être de moins en moins.
Ne montrez pas cet article à votre député, cela pourrait lui donner des idées. Si ce n’est pas aujourd’hui, peut-être dans quinze ans.
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Focus sur Tesla24 septembre 2024
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