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Quand on prend la peine d’entrer dans l’histoire des taxis Téo, on s’aperçoit que l’entreprise s’est attribuée différentes missions, dont celle d’électrifier un maximum la profession, de procurer un certain confort social à ses salariés et d’éradiquer Uber. En quelque sorte l’agneau qui mangerait le loup !
Officiellement, les taxis Téo (Transport écologique optimisé) sillonnent les rues de Montréal depuis le 26 novembre 2015. La flotte de la compagnie, composée d’une soixantaine de véhicules électriques, tend à s’agrandir et dispose de ses propres installations de recharge alimentées en énergie renouvelable via le réseau d’Hydro-Québec.
A comparer avec les 4.000 taxis, au total, qui circulent dans la ville canadienne. Aux Tesla Model S, Kia Soul EV et Nissan Leaf de la première heure commence à être ajouté le Tesla Model X du constructeur de Palo Alto. Au bout d’un an, l’entreprise dressait un premier bilan de son impact écologique et social : 2,7 millions de kilomètres parcourus, 202.000 litres de pétrole non brûlés, 436 tonnes de gaz à effet de serre non émis et 350 emplois créés. Cette dernière information à son importance, car Téo Taxi souhaite opérer « une transformation positive des conditions de travail des conducteurs ».
Derrière les taxis Téo, Taxelco. Cette société se définit comme une « entreprise d’économie verte et sociale [qui] s’apprête à révolutionner l’industrie locale du transport de personnes en offrant une expérience zen à ses clients ». Elle-même dépend de XPND Capital qui souhaite « investir dans des entreprises innovatrices et chefs de file dans des secteurs en forte croissance ». Principal associé, Alexandre Taillefer, bien connu des Montréalais, qui insuffle toute son énergie à cette chaîne d’établissements.
D’abord projet pilote collaboratif, Téo Taxi exploite au mieux les technologies de l’information, pour une évidente question de rentabilité qui devrait profiter à tous ses acteurs, jusqu’aux chauffeurs eux-mêmes. Désormais bien identifiées avec leur livrée blanche et verte, les voitures de la compagnie ajoutent à la ville de Montréal une touche avant-gardiste au service de la mobilité durable.
Si nombre des chauffeurs de Téo Taxi ont quitté d’autres compagnies ou la plateforme Uber, c’est tout simplement parce que les conditions de travail sont avantageuses.
En conduisant un véhicule électrique parmi les meilleurs du marché dédié, ils ne travaillent que 40 heures hebdomadaires réparties sur 5 jours, avec 2 semaines de congés payés, pour une rémunération nette de 15 dollars canadiens (environ 10,75 euros au cours du 11 janvier 2017) de l’heure, soit environ le double, en moyenne, de ce que touchent ceux qui exercent la profession à leur compte ou pour d’autres structures. En euros, le salaire mensuel net s’élève donc à environ 1.900 euros.
Sur sa chaîne Youtube, Téo Taxi a déposé à ce jour 3 témoignages de ses chauffeurs. Salah-Eddine, par exemple, apprécie de savoir « à quelle heure il va venir travailler, à quelle heure il va rentrer chez lui, et à la fin de la semaine combien il va avoir gagné d’argent ». En outre, bénéficier de l’assurance emploi, de 2 semaines de vacances qu’il ne pouvait prendre auparavant est important à ses yeux. En quelques mots, il illustre la situation qu’il a connu en exerçant « dans le taxi régulier » pendant 8 ans : « Je sortais pour travailler, mes enfants dormaient ! Je rentrais le soir, ils dormaient encore ! ». Il avoue même ne pas s’être rendu compte qu’il ne leur était pas présent, « pris dans l’engrenage de travailler chaque jour un peu plus ».
Pierre-Léon, lui, est dans le métier depuis plus de 20 ans. De service même les week-ends, il avait fini par prendre un embonpoint qui aurait pu nuire à sa santé. Aujourd’hui, il est redevenu svelte en ayant le temps de se promener aussi bien dans la ville que dans des espaces plus sauvages.
« Le taxi traditionnel, il faut cumuler de plus en plus d’heures pour joindre les 2 bouts », témoigne-t-il. Lui aussi se rappelle qu’il ne voyait plus sa famille ni ses amis. « Téo Taxi redonne vraiment les lettres de noblesse au métier », se réjouit-il. La compagnie donne confiance, comme l’indique le chauffeur : « Dans le véhicule, on ne sent pas une méfiance, mais on sent que les gens sont contents ».
Visiblement ému, il affirme avoir pu prendre ses premiers congés payés en 25 ans de vie professionnelle, et met en avant la sécurité de l’emploi et le régime de rente pour la retraite dont il dispose désormais en étant salarié de Téo Taxi.
Si la flotte de Téo Taxi a stagné un peu plus d’une année à 50-60 voitures branchées, les projections de l’entreprise font état de 1.000 unités en 2018 et du double en 2020. En espérant que la progression soit suivie, dans 3 ou 4 ans, la moitié des taxis de Montréal seraient électriques.
Utopique !? Allez dire cela aux Montréalais qui font toute confiance à Alexandre Taillefer. Il a laissé de sérieuses traces en siégeant à une émission de téléréalité dans laquelle des entrepreneurs viennent présenter de nouvelles idées et inventions à cinq multimillionnaires. Il a été l’un de ces derniers pendant 3 saisons, d’avril 2013 à juin 2015. En outre, il porte de nombreuses casquettes très diverses, dont celle de président du Musée d’art contemporain de Montréal.
Si ce n’est que le nombre de véhicules qui crée le doute, sachez que Taxelco s’est offert sur place, en 2015 et 2016, les compagnies Taxi Hochelaga et Taxi Diamond, avec leur flotte respective de 500 et 1.200 véhicules.
Les 2.000 taxis, Taxelco les a donc presque déjà. Suffit juste de grignoter encore un peu le secteur et de convertir à l’électrique ceux qui ne le sont pas ! D’ici 2020, quoi d’impossible ! Lors du dernier achat, Alexandre Taillefer avait déclaré : « On a atteint la densité requise pour pouvoir servir les Montréalais en cinq minutes », et certifiait ne pas prévoir d’autre nouvelle transaction de la sorte dans le secteur.
Téo Taxi joue sur plusieurs tableaux dont celui de la propreté et des services. A bord, des bouteilles d’eau, de la confiserie, le WiFi gratuit, des chargeurs pour les téléphones portables des clients, et des écrans tactiles qui présentent par défaut un contenu personnalisé, notamment en fonction de la destination demandée. Le tout, sans payer plus cher que pour un taxi conventionnel. Et ça se comprend, puisque chaque exemplaire bénéficie d’une prime gouvernementale de 6.800 dollars canadiens, soit environ 4.875 euros.
En outre, à raison d’environ 200 kilomètres par jour, l’économie réalisée sur le carburant représente environ 8.000 CAD (5.700 euros environ) par an.
Au Québec aussi, les taxis sont en croisade contre Uber. Téo Taxi affronte la plateforme qualifiée de VTC chez nous avec les mêmes armes : une application numérique pour réserver sa voiture. D’ailleurs, pour Claire et Julien, un couple de Français expatriés au Canada qui mène actuellement une réflexion sur son mode de vie, la similitude est frappante : « Dans le fonctionnement c’est exactement comme Uber. On installe l’appli, on entre une carte de crédit et on réserve son taxi, qu’on voit arriver en temps réel sur la map. Le temps d’attente dépend de la proximité ou non d’un chauffeur et de l’horaire (entre 5 et 20 minutes). Pour le paiement et le tip [NDLR : pourboire] du chauffeur, tout se passe également dans l’appli ».
Mais est-ce raisonnable de comparer Téo Taxi avec Uber qui pratique là-bas des prix à ce jour 50% moins élevés en période creuse que l’industrie réglementée ? Le journal de Montréal s’est demandé si la plateforme dissidente n’était pas la cause d’une explosion des plaintes émises par les clients des taxis, ces derniers devant faire face à une baisse de 10 à 30% de leur clientèle, selon période.
Sur une page du site Téo Taxi, Alexandre Taillefer explique : « Quand nous avons décidé de nous intéresser à l’industrie du taxi, nous avons compris une chose fondamentale. Le service ne pourra jamais être amélioré à long terme si l’on ne règle pas les conditions extrêmement précaires dans lesquelles vivent les chauffeurs. Les détracteurs de l’industrie ont raison, les chauffeurs ne sont pas tous souriants, accueillants, propres. En fait, c’est un euphémisme. Mais comment agiriez-vous derrière un volant si vous étiez obligé de travailler 12 heures par jour, 6 jours par semaine pour un salaire de misère, et ce, depuis 12 ans ? ».
Le danger que souhaite mettre au jour Alexandre Taillefer dans son coup de gueule, c’est le fait qu’Uber considère ses chauffeurs, selon les propos du financier, « comme de la matière première » dont il « souhaite se débarrasser à terme ».
Comment ? En exploitant des véhicules autonomes ! Cela, ce n’est pas un secret : les fondateurs de la plateforme s’en vanteraient même ! Mais sans doute que la réflexion globale sur le sujet n’est souvent pas menée jusqu’au cas particulier de l’avenir individuel des chauffeurs. Quoi qu’il en soit, le présent blog n’a pas pour vocation de prendre partie dans le conflit qui oppose l’industrie des taxis à Uber, au Québec, en France, ou ailleurs. Mais voilà déjà, avec le lien matérialisé dans le paragraphe précédent, une bonne source d’informations pour commencer à se forger une opinion. En outre, cette position prise par Alexandre Taillefer explique aussi pourquoi, à ses yeux, le volet social est important, totalement intégré à la philosophie et la raison d’être de l’entreprise.
CDPQ Infra, une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, porte un projet de nouveau réseau métropolitain reliant le centre-ville, la rive Sud, l’Ouest de l’île, la rive Nord, et l’aéroport où Téo Taxi est déjà présent (voir notre article).
Avec 27 stations traversées par une ligne de 67 kilomètres à double sens, le maillage se classerait quatrième par son importance, après ceux de Vancouver (Canada, 68 km), Dubaï (Emirats arabes unis, 80 km), et Singapour (République de Singapour, 82 km). Les travaux débuteraient tout prochainement, avec une inauguration en 2020. CDPQ Infra a dévoilé il y a quelques semaines une série d’ententes qui devraient permettre aux futurs usagers d’accéder aux stations par des moyens de transport très divers. Parmi les partenaires, Téo Taxi, qui disposerait d’espaces de stationnement équipés de bornes de recharge aux abords de certaines d’entre elles.
L’extension de Téo Taxi à la ville de Québec est prévue, mais a pris un peu de retard. Elle devait débuter fin 2016. Désormais, ce serait mi-2017, avec sans doute pas plus de 15 ou 20 voitures. En amont, il s’agit pour l’entreprise de trouver quelques propriétaires sur place qui seraient prêt à louer leur permis. Cette nouvelle étape ne serait pas la dernière, puisqu’il est envisagé un développement plus large sur le territoire canadien. Trop tôt, cependant, pour communiquer dessus.
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