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Avec 2 600 immatriculations dans notre pays au cours des premiers mois de l’année 2024, on ne peut pas parler de déferlante. Mais le nouveau directeur adjoint pour la France souligne les progrès à venir…
Chez BYD, il ne faut pas trainer. Il y a six mois, la marque faisait part de son objectif de détenir 5 % du marché des véhicules électriques en Europe d’ici à 2026, contre 1,1 % l’an dernier.
« On est au point d’accélération », explique à Automobile Propre Emmanuel Bret, le nouveau directeur général adjoint de la marque en France. Cet ancien de BMW (20 ans), Vinfast et Fisker a pour mission depuis début septembre de piloter le décollage du constructeur chinois à l’intérieur de nos frontières.
En 2023, un peu plus de 500 véhicules de la marque BYD furent immatriculés en France. Cette année, le constructeur a déjà écoulé plus de 2 600 voitures. « Ce n’est pas ce chiffre-là qui est important, tempère Emmanuel Bret, l’important, c’est la progression ».
Si cette multiplication par cinq des ventes sur neuf mois seulement peut être vue avec satisfaction, la part de marché globale (toutes énergies) du constructeur chinois demeure minime (0,2 %).
Tesla a, par exemple, écoulé 10 fois plus de véhicules cette année dans l’Hexagone. Et, malgré un gros coup de frein consécutif à la fin du bonus sur les véhicules asiatiques et aux nouvelles barrières douanières, le camarade chinois MG (groupe SAIC) a vendu largement plus de 10 000 voitures en France sur la même période.
Dans l’Hexagone comme ailleurs en Europe, le géant de la pile devenu leader du véhicule électrifié a connu des débuts plus poussifs que prévu, deux ans après l’arrivée des premières BYD Atto 3 dans nos ports.
L’une des raisons de cette croissance moins rapide que prévu est évidemment à chercher du côté des barrières douanières. La marque a collaboré avec les services de la Commission européenne, écopant d’un taux clément de 17 % supplémentaires par rapport aux 10 % appliqués d’office.
Ce qui n’a pas empêché la Stella Li, la vice-présidente de BYD, de vilipender l’établissement de ces droits de douane additionnels dans les colonnes du Frankfurter Allgemeine : « Les consommateurs européens luttent déjà avec l’inflation et des factures d’électricité ou de gaz plus élevées. Leur accès à la meilleure technologie automobile devient plus difficile et ils doivent payer davantage en raison des droits de douane ».
BYD n’a pas encore tranché entre maintien de ses marges et gains en parts de marché. Pas sûr que le constructeur entende baisser ses prix : « Nous sommes un constructeur premium accessible » assure Emmanuel Bret. Qui dit premium dit marges…
En attendant une production européenne d’ici à un an (voir encadré), BYD entend donc faire décoller son réseau, notamment grâce à la notoriété apportée par son partenariat avec l’Euro 2024 de football masculin.
Des mesures radicales ont déjà été prises. En Allemagne — où la part de marché n’a pas dépassé les 0,1 % et les 1 400 voitures livrées au premier semestre — BYD a décidé de racheter son distributeur local. Shenzhen pilotera donc directement les ventes à Munich, Berlin ou Hambourg.
À lire aussiFace aux difficultés à percer en Europe, BYD tente de mettre la main sur l’AllemagneMais le topo n’est pas le même dans l’Hexagone : « Il faut être très clair là-dessus : nous arrivons avec humilité. Le marché français n’est pas le même que le marché allemand ou que le marché belge, le marché anglais ou que le marché espagnol, explique Emmanuel Bret. Il nous faut un tout petit peu de temps pour mettre nos équipes en place, pour nous adapter et avoir le retour des clients, pour comprendre effectivement les marchés, selon les cultures, selon les lois, selon les dispositions géographiques ».
En France, on croît la force du voisinage. « Nous avons décidé de prendre des concessionnaires ou des groupes de concessions réputés et qui ont un ancrage local, contraste Emmanuel Bret. Cela peut être BYmyCAR, Emil Frey, Bodemer, Maurin… Ces groupes nous ont choisi car BYD apporte une vraie offre différenciée, des produits qui n’existent pas encore sur le marché français ».
Aucun des modèles n’est actuellement éligible au bonus écologique.
Aujourd’hui, BYD compte 33 points de vente et en vise une centaine d’ici à la fin de l’année 2025. Emmanuel Bret donne un exemple du cercle vertueux qu’il entend générer avec des « héros locaux » : « Quand je vais voir le groupe Bodemer, dans l’Ouest, ce sont des gens très réputés. Leurs clients achètent une voiture chez Bodemer. Plus qu’une marque, on achète une relation de confiance. On était très content qu’ils nous choisissent, car c’est un gage de qualité ».
À plus long terme, cela permet de faire connaître BYD a des clients venus acheter une Renault, une Citroën ou une Volkswagen dans le showroom juste à côté. « Cela ne se fait pas du jour au lendemain, mais on progresse » assure Emmanuel Bret. « On sait qu’il y a une demande énorme de la part de clients qui attendent de voir un store BYD ouvrir près de chez eux ».
Autre imprévu dans le plan initial : le décollage pas aussi rapide qu’espéré de l’électrique. BYD comptait initialement sur une stratégie 100 % VE sur notre continent. Or, le millésime 2024 est décevant de ce côté.
Voici donc l’heure du repentir, avec l’arrivée dans les concessions de BYD hybrides. Rappelons d’ailleurs ici que le constructeur vend nettement plus de PHEV que d’électriques en République populaire.
Chez nous, la marque a débuté il y a quelques mois la commercialisation de son grand SUV plug-in, nommé Seal U DM-i. L’appellation DM-i regroupe la technologie PHEV « maison ».
À lire aussiComment fonctionne l’hybride rechargeable de BYD ?Au cours des derniers mois, ce modèle hybride a été la locomotive du groupe en France, atteignant environ 30 % des immatriculations de BYD. « Il y a très clairement une stratégie de développement de DM-i » concède Emmanuel Bret, sans donner de précision sur les futurs modèles hybrides en vue.
À lire aussiEssai – BYD Seal U DM-i : un SUV hybride rechargeable pour contourner l’obstacle européenPour en proposer, la marque pourrait puiser dans son catalogue chinois. La Seal 06 DM-i, commercialisée à Pékin, Shanghai ou Guangzhou avec des batteries de 10 et 15 kWh, pourrait faire office de candidate logique à l’export en Europe à court terme. D’autant que ces voitures hybrides ne sont pas concernées par les nouveaux droits de douane établis par l’UE. Ceci permettra d’établir des liens avec les clients en attendant l’arrivée des premières BYD made in Europe.
L’Europe sera bientôt arrosée de BYD assemblées bien plus près de chez nous. La première étape sera l’inauguration d’ici un an de l’usine de Szeged, au sud-est de la Hongrie, non loin des frontières roumaines et serbes. La capitale du paprika a cédé en début d’année un terrain de 300 hectares au géant de Shenzhen.
Avec son très haut degré d’intégration verticale (la marque parle de 85 %), le groupe n’est pas spécialement intéressé par la présence de sous-traitants locaux, même s’il devrait y faire appel pour « valider » sa fabrication made in Europe. BYD est sans doute davantage intéressé par l’impressionnante étoile ferroviaire qui rayonne autour de cette ville, qui compte autant d’habitants qu’Amiens. Le pays comptait déjà par ailleurs une usine de bus électriques BYD. Pas besoin de trop embaucher, donc, côté « relations institutionnelles ».
D’autant que les responsables locaux sont plutôt amicaux vis-à-vis de la Chine. Quand la Commission européenne dresse des barrières douanières à l’endroit des VE chinois, le ministre des Affaires étrangères hongrois fait part de son scepticisme : « Nous rejetons les tentatives de découplage entre l’économie européenne et la Chine » déclarait Péter Szijjártó au moment de la signature.
À ces capacités fixées à 150 000 unités par an (et éventuellement à 300 000 plus tard) s’ajoutera une seconde usine dans la « zone Europe », prévue pour une montée en cadence en 2026. Elle sera située à Manisa, à 40 km du port géant d’Izmir, dans l’ouest de la Turquie.
Là aussi, le facteur politique a joué. Cet été, le gouvernement d’Ankara a annoncé la mise en place d’une barrière douanière supplémentaire de 40 % pour les véhicules importés de Chine… à l’exception des constructeurs investissant sur le territoire national. En ouvrant son usine à Manisa, BYD s’ouvre les portes d’un marché prometteur. Le pourra servir 85 millions de Turcs, soit une population comparable à celle de l’Allemagne.
Mais BYD entrebâille ici aussi les portes de l’Union européenne, qui a signé des accords de libre-échange avec la Turquie dans les années 1990. Un état de fait dont profite, par exemple, Renault pour assembler sa Clio dans la capitale automobile qu’est Bursa.
Ainsi, la marque de Shenzhen pourra à court terme contourner les 17 % de droits de douane supplémentaires attribués par la Commission européenne aux véhicules électriques de BYD.
L’offensive se poursuit aussi avec le lancement du BYD Sealion 7, concurrent direct du Tesla Model Y ou du Peugeot e-5008. Sur le stand BYD au Mondial de l’auto, l’engin de 4,83 mètres attirait d’ailleurs beaucoup de curieux. « Cela vaut une bonne copie d’un constructeur européen » commentait un visiteur de la Porte de Versailles, en évaluant la qualité des matériaux utilisés dans le spacieux habitacle.
Et une nouvelle fois, on ne traîne pas. Les premiers exemplaires sont déjà rangés sur les rouliers en direction de l’Europe. Les essais presse (pour nous) et les premières livraisons (pour les clients) auront lieu dès le mois de novembre. Les tarifs n’ont pas été officialisés, mais devraient se trouver dans les mêmes tranches que son concurrent muskien.
De quoi séduire un peu plus une clientèle européenne jugée exigeante par Stella Li : « Ils sont un peu conservateurs, c’est vrai, et ils ont besoin de temps pour vous comprendre. Mais ce n’est qu’une question de temps. Une fois qu’ils auront créé un lien de confiance avec nous, nous devrions faire bonne figure ». Un lien qui sera nécessaire au décollage de la marque de prestige de BYD, Denza, dont l’arrivée est prévue en Europe au cours de l’année 2025.
Emmanuel Bret le reconnaît : « On a un objectif de progression énorme. Ici, on ne calcule pas au trimestre, on doit progresser chaque jour ».
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