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La presse non spécialisée dans l’automobile a un pêché mignon avec la voiture électrique : la tester à tout prix dans le pire cas de figure.
Revoilà mai et ses week-end prolongés. Avec son avant-goût de l’été, la période marque le début de la saison d’un nouveau marronnier de la presse : peut-on partir en vacances avec une voiture électrique ? Certains ont cette année pris de l’avance, j’ai vu passer ces dernières semaines quelques compte-rendu de longs voyages, un Paris/Toulouse du côté de l’Express ou encore un Oslo/Madrid réalisé conjointement par l’Automobile Magazine et Le Figaro.
Faire de longs trajets en électrique, c’est tout à fait possible, mais cela peut effectivement réserver quelques mauvaises surprises et galères (notamment côté bornes de recharge), que l’on va évidemment retrouver dans ce type de sujets. Et qui seront plus ou moins mises en avant. J’ai l’impression qu’il y a deux écoles : la presse automobile restera plutôt équilibrée et objective, tandis que la presse plus généraliste va retenir le côté accrocheur des ratés.
Le sujet Oslo/Madrid en Megane en est le parfait exemple. Pendant que nos confrères de l’Automobile-Magazine ont relaté sur le Web leur périple au jour le jour avec des titres neutres, du côté du Figaro, on a : « Galères de recharge, consommation importante, arrêts fréquents… nous avons roulé 4300 km en voiture électrique entre Oslo et Madrid ». On dirait un titre de ces émissions de TNT consacrées aux forces de l’ordre, qui transforment chaque coin de France en sommet de délinquance et violence !
Rebelote sur Twitter, le compte « Figaro Live » a mis en avant ce commentaire du journaliste venu présenter son papier : « Nous avons dû recharger 28 fois la batterie pour un coût de 780 €. En diesel, cela aurait coûté moins de 700 € et nous aurions eu à remplir le réservoir cinq fois ».
Bon sang, après avoir lu ça, aurais-je envie d’acheter une voiture électrique. Il vaudrait mieux que l’on reste tous fidèles au diesel non ? D’autant qu’on le fait souvent Oslo/Madrid en voiture. Et le Paris/Toulouse de l’Express ne va pas me rassurer, le trajet étant résumé ainsi en accroche : un voyage « sous tension », qui n’a rien « de tranquille ».
L’idée ici n’est pas de nier les défauts de la voiture électrique et d’en faire une défense de manière tout aussi manichéenne, en disant à quel point elle est géniale. Je tique davantage sur la mise en avant de ses problèmes dans ce genre de sujet avec un réel aspect sensationnaliste. C’est bien sûr plus accrocheur. Le négatif fait mieux cliquer que le positif. Et jouer avec une forme de peur aussi.
La presse aime souvent jouer avec la peur, imaginer le pire pour attirer l’attention. Il suffit de se souvenir de la manière dont le risque de pénurie d’électricité était évoqué sur les chaînes d’info en continu il y a quelques mois. Comme si on allait passer l’hiver dans le noir. On connaît maintenant la suite. D’ailleurs, dès que le moindre événement à lieu, cela se transforme maintenant dans les JT par : « Y’aura-t-il bientôt une pénurie de… ».
Beaucoup de bruit pour rien. Mais ce bruit infuse l’opinion publique. Il suffit de voir les dernières études sur la voiture électrique ou, plus récemment encore, des réactions dans des sujets consacrés au cap des 100.000 bornes de recharge . Quand on leur demande leur avis sur l’électrique, beaucoup de Français continuent de citer les mêmes défauts qui sont autant de freins à l’achat : l’autonomie, le prix, le manque de borne de recharge, le temps de recharge…
Forcément, la manière dont va être présenté un sujet comme celui du Figaro ne peut que conforter ces craintes, ces doutes. Car le papier aura beau évoquer des avantages et expliquer les défauts, le grand public va retenir l’accroche. L’opinion publique est influencée par des titres grandiloquents et des intros qui font penser au pire.
Dommage, car avec ces sujets et ces manières, certains continuent de penser que l’électrique n’est pas faite pour eux, alors que c’est faux. Alors oui, l’électrique ne convient pas encore à tous les usages. C’est évidemment sur les trajets très longs qu’elle est le plus à la peine et peut vite cumuler les défauts. Et quand on part pour un grand parcours, la voiture électrique impose aussi un apprentissage, notamment dans la gestion et la planification de la recharge.
Mais je pense qu’il y a un réel déséquilibre entre la manière dont l’électrique est essayée par la presse généraliste, qui n’a qu’une idée en tête, à savoir la tester dans le contexte qui lui convient le moins, le très long trajet donc (avec recharge rapide ultra-chère au passage), et finalement les habitudes de conduite des Français, qui ne traversent pas la France en voiture tous les jours.
Quand on fait beaucoup de trajets longs, je peux comprendre les réticences. Mais quand ce n’est pas un cas de figure qui revient souvent dans votre conduite, repensez-y, car si l’électrique ne peut pas encore tout faire bien, il y a tant de choses qu’elle sait faire comme une thermique, avec des avantages à la clé.
Pendant que les tests grande distance se multiplient, un contexte finalement peu représentatif du conducteur moyen, les sujets sur ceux qui vivent très bien au quotidien avec une Spring et ses 230 km d’autonomie WLTP manquent un peu dans les JT. Ils seraient pourtant nombreux à pouvoir témoigner des bienfaits de leur achat.
Les conducteurs de véhicules électriques sont une large majorité à être très satisfaits. Ce sont d’ailleurs les meilleurs publicitaires pour la voiture branchée, en partageant leur expérience dans leur cercle familial ou amical, voire au-delà, en montrant que c’est possible de passer du thermique à l’électrique.
Si certains ne veulent pas encore le faire, je respecte leur avis. Mais au final, ce que je veux, c’est entendre un avis forgé sur un vrai usage, un vrai argument concret. Pas sur une peur renforcée par un titre putaclic ou trois lignes accrocheuses sur Twitter
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