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La Coréenne entend nous réconcilier avec la berline et son efficience énergétique.
« J’ai perdu le sens de l’échelle mais pas celui des proportions ». Dans son étrange nouvelle publiée en 1995, l’auteur britannique Will Self raconte les aventures d’un homme accro à la morphine travaillant sur une thèse sur les panneaux autoroutiers à destination des humains des prochains millénaires. Pris d’hallucinations, le personnage erre dans les rues d’une ville miniature, affronte des insectes géants et dévale des escaliers monumentaux, perdant définitivement tout sens de la mesure.
Dans un registre plus automobile, Hyundai défie pour la deuxième fois notre perception des tailles et des formes avec sa Ioniq 6.
Design et dimensions
Cette maxi-berline de 4,85 m adopte un profil courbe, avec un pavillon plongeant vers la poupe. Non, cette auto n’est pas basse. Malgré l’aspect suggestif de sa forme, cette voiture culmine à 1,49 m, soit une hauteur équivalente à celle une Tesla Model 3. Ou 9 centimètres au-dessus d’une Peugeot 508, reine des tricorps surbaissées. Pour la deuxième fois consécutive sur cette gamme Hyundai, le premier regard IRL sur le match Tinder (ou Meetic, Adopte…) tranche avec les impressions en photo. Ce n’est pas mieux ou moins bien, c’est… différent.
Longueur : 4,85 m
Largeur : 1,88 m
Hauteur : 1,49 m
La référence revendiquée par les équipes du designer Simon Loasby est celle du streamliner, courant esthétique des années 1930 tirant ses racines dans les premières recherches aérodynamiques. Exemple typique : la vénérable Tatra T 87. L’arrière tombant et les faibles surfaces anguleuses minimisent le Cx. Sur notre exemplaire doté de rétroviseurs classiques, il s’établit à 0,22. Sur une version équipée de caméras, il tombe à 0,21.
Les détails de style surprennent (et séduisent) aussi. La découpe des feux avant a du Lamborghini, le capot avant évoque dans une certaine mesure la Coccinelle. Le pixel des leds est devenu l’unité du design Hyundai, s’intégre dans des lignes aussi divergentes que celles de la Ioniq 5, du futur Kona ou de cette berline.
Intérieur
Avantage de la hauteur et de la longueur : l’accessibilité. Nul besoin de se baisser pour pénétrer dans l’habitacle lumineux. L’architecture générale est similaire à celle de la Ioniq 5 avec un poste de pilotage organisé autour des deux écrans de 12,3 pouces (instrumentation et infodivertissement) placés horizontalement. Différence marquante : une console centrale flottante se glisse entre les passagers avant, réduisant la sensation d’espace.
Celle-ci comporte des rangements un peu décevants… et les commandes de vitres électriques. Pas très ergonomique à l’arrivée au péage. Les matériaux proviennent souvent du recyclage. Les tapis de sols ont ainsi eu une première vie de filets de pêche en mer de Corée. L’ensemble des plastiques sont durs, ce qui est un choix courageux à ce niveau de tarifs où nombre de clients entendent fréquenter un intérieur habillé de « valorisantes » surpiqures. Les rangements dans les contre-portes sont très décevants. Vous vous consolerez (peut-être) en choisissant soigneusement la teinte du rétro-éclairage dans une palette de 64 couleurs. Sur notre finition Executive, les sièges avant sont chauffants, ventiles et réglables électriquement. Ils manquent toutefois de maintien dans les courbes.
Au-dessus de la console, on retrouve le désormais classique écran d’infodivertissement. Celui-ci est de bonne facture. On regrettera juste que la foule d’option disponible ne soit pas mieux organisée pour une utilisation quotidienne.
Vitesse d’exécution : 4/5
Infos disponibles : 5/5
Intuitivité : 2/5
Design : 4/5
Total : 15/20Heureusement, des boutons permettent de naviguer entre les principales fonctions. C’est particulièrement utile en manœuvre lorsque vous avez besoin de la caméra de recul. Notre version Executive destinée aux cols blancs propose également la très utile vue à 360°. Soulignons la qualité de l’image reportée sur cette Ioniq 6. Le système est évidemment compatible Apple Car Play et Android Auto.
Places arrière et coffre
Avec un empattement de 2,85 m, la berline coréenne propose logiquement (énormément) de place aux jambes des passagers arrière. En revanche, les gabarits dépassant le 1,80 mètre risquent de devoir pencher un peu la tête en raison de la chute prononcée du pavillon. Intallé(e) dans les fauteuils, on se tient penché un peu en arrière avec une assise remontant vers l’avant et un dossier incliné.
Sur les longues distances, les passagers arrière bénéficient d’un bloc aérateur et de deux prises USB. La cinquième place est loin du cauchemar habituel : la banquette agréable et l’absence de tunnel de servitude – on croirait le titre d’un album de Metallica – permet de mieux poser ses pieds.
En revanche, il est difficile de dire du bien du coffre. La soute ne propose que 401 litres d’emport. C’est d’autant plus décevant pour une voiture approchant des 5 mètres que le seuil d’accès est haut perche. L’absence de hayon – défavorable à l’aéro – n’aide pas au chargement. Un espace « câble » profond, situé sous le plancher, rattrape un peu le coup, tout comme le « frunk » de 45 litres situé sous le capot avant. Les mécanos et automobilistes soigneux seront heureux de découvrir un accès direct aux bouchons de liquides (lave-glace…).
Conduite
Modèle : Hyundai Ioniq 6
Longueur : 4,85 m
Moteur : 1 (AR), 229 ch, 350 Nm
Batterie : 77,4 kWh
En agglomération, la Ioniq 6 est une berline prévenante. Si son gabarit n’est pas très favorable, la bonne vision périphérique sur les deux tiers avant permettent de circuler sans trop d’inquiétude. Les montants sont fins, aidant à mieux voir les autres usagers de la chaussée. A l’arrière, en revanche, on voit peu de choses dans le rétro intérieur. Comme sur une Tesla Model 3, la lunette nous montre davantage le ciel que les voitures situées derrière vous. Et comme la berline américaine, la Ioniq 6 braque insuffisamment (rayon : 5,91 m). Ici, les roues arrières pivotantes de la Mercedes EQE auraient eu leur utilité… mais l’étoile facture sa voiture près de 30 000 euros de plus, donc le reproche est légèrement exagéré.
Une fois sur la route, la puissance offerte par le moteur synchrone à aimants permanents situés sur le train arrière est tout à fait suffisante pour un usage quotidien. Les 229 ch et 350 Nm de couple ne s’essoufflent pas. Les accélérations – 0 à 100 km/h en 7,4 secondes – sont largement suffisantes pour toutes les situations routières. En courbe, en forçant un peu sa nature de « gentille » propulsion, on parvient à obtenir une légère dérive. On regrettera à cet instant le caractère mutique de la direction assistée électriquement, même en mode sport, où elle gagne tout de même en consistance. Le grip est dans la très bonne moyenne avec des 18 pouces Hankook pourtant typés efficience.
La Ioniq 6 partage ses trains roulant avec sa sœur Ioniq 5. Mais le bon combo McPherson à l’avant et multi-bras à l’arrière ne peut rien contre les lois de la gravité. En l’absence d’amortissement pneumatique et avec 1 985 kg sur la balance, notre exemplaire d’essai « tape » sur les ralentisseurs urbains à l’image de nombre de véhicules à (lourde) batterie. C’est nettement mieux à vitesse supérieure, avec une bonne maîtrise des mouvements de caisse et un juste compromis entre confort et précision. Sans doute victime de son centre de gravité plus haut perché, le SUV Ioniq 5 se montrait particulièrement débonnaire en détente, en roulis ou une gite à ses débuts.
Sur le chapitre confort, nous sommes en droit de nous extasier devant l’excellence de l’insonorisation des trains roulants… On entend presque jamais la chaussée. En revanche, c’est beaucoup moins ébaubissant en matière d’isolation des vitrages. Malgré la présence de verre feuilleté, ça souffle nettement dans les montants, surtout sur autoroute et par fort vent…
Consommation et recharge
Eole était très en forme pendant notre essai, rendant périlleux l’exercice des mesures de consommations électrique. C’est d’autant plus dommage qu’il s’agit là d’un des arguments clé de la Hyundai.
Aller : 17,8 kWh/100 km (route, ville, un peu d’autoroute, fort vent dans le dos)
Retour : 22,8 kWh/100 km (majorité d’autoroute, fort vent de face)
Gageons donc sur une cote mal taillée autour de 19-20 kWh de moyenne dans les conditions froides de notre essai. Mon confrère Soufyane Benhammouda a déjà réservé le véhicule pour son habituel supertest. Nos chiffres seront alors plus concluants.
N’empêche, il s’agit là de valeurs plutôt bonnes pour une maxi-berline de près de 2 tonnes avec une météo défavorable. Si l’autonomie annoncée de 614 km relève de l’optimisme, un rayon d’action de 400 à 500 km selon les conditions nous semble très réaliste. Un beau chiffre pour un véhicule doté d’une capacité de batterie normale (77,4 kWh).
D’autant que Hyundai ne ment pas sur la puissance de recharge exceptionnelle assurée par son système 800 volts. Branchée sur une borne Ionity, notre Ioniq 6 a repris 55 kWh en 20 minutes, démarrant autour de 120 kW dans les trois premières minutes puis « crêtant » à 234 kW. A comparer avec 239 kWh annoncés dans des conditions idéales. Seuls Audi et Porsche disent mieux, sur des véhicules nettement plus prohibitifs.
A noter : si vous optez pour les pneus 20 pouces au lieu des 18, vous perdez 69 km d’autonomie (selon la norme WLTP).
Prix et gamme
Pas donnée, la Hyundai. Si la gamme est simplifiée et l’équipement riche dès le premier niveau de finition (reconnaissance des panneaux, régulateur intelligent, poignées affleurantes…), la berline coréenne est placée assez haut sur l’échelle des prix. Evidemment, la présence du système 800 volts lui donne un gros… et coûteux avantage sur la concurrence.
Intuitive : 52 200 euros
Créative : 56 800 euros
Executive : 61 300 euros
Intégrale (325 ch)Executive : 65 200 euros
Est-ce Hyundai qui a perdu le sens de la mesure dans sa grille de tarifs ? Ou bien est-ce Tesla qui propose des Model 3 anormalement placées ? Tout dépend de votre perspective.
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