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C’est à Munich, chez MAN Truck & Bus, que la borne MCS pour la recharge au mégawatt a été installée. Le développement de la mobilité électrique lourde s’appuie sur cette technologie qui a désormais montré sa viabilité et demande de l’anticipation pour être déployée.
« MCS », c’est pour « Megawatt Charging System », ce qui signifie « système de recharge au mégawatt ». Lorsque le connecteur dédié a été présenté par le consortium CharIN au salon EVS35 à Oslo (Norvège) en juin 2022, l’année 2024 a été annoncée comme celle où MCS deviendrait une nouvelle norme de recharge.
Ce que le communiqué de presse daté du 21 mars confirme : « Le processus de normalisation internationale du Megawatt Charging System devrait être achevé cette année ». Réservée aux poids lourds, elle est associée à des chiffres qui peuvent impressionner. Le gros connecteur a été conçu pour supporter une tension de charge pouvant s’élever jusqu’à 1 250 V, avec une intensité maximale de 3 000 ampères permettant sur le papier une recharge à une puissance frisant les 3,75 MW.
Il s’agit des valeurs vers lesquelles le MCS pourrait évoluer avant de devoir améliorer encore le système ou de passer à un autre. Pour comparaison, le CCS dont nous disposons en Europe pour les voitures et utilitaires légers offre une capacité maximale de 400 kW à 500 A.
Aujourd’hui, en mars 2024, nous sommes loin des chiffres de rupture de la future norme. Les 700 kW déjà dépassés, pour une intensité de 1 000 A, permettent d’imaginer régénérer les batteries d’un camion en pas plus de temps qu’une voiture particulière. Le tracteur routier MAN eTGX qui a été utilisé pour mesurer la performance embarque une batterie d’une capacité de 534 kWh.
Trente minutes seulement ont été nécessaires pour retrouver 80 % d’énergie en partant d’un niveau de 10 %. Cette performance se traduit par une autonomie de 300 à 400 km retrouvée à chaque pause légale des conducteurs de camions.
Cette première démonstration publique de recharge MCS à plus de 700 kW réalisée en Allemagne sur un camion déjà commercialisé et produit par MAN Truck & Bus a bénéficié de l’ingénierie d’ABB E-mobility. « Avec MCS, le transport durable sur de longues distances avec des camions et des bus sera possible dans un avenir proche. Nous l’avons prouvé aujourd’hui », a commenté Michael Halbherr, PDG de l’entreprise qui a fourni la borne de recharge en prototype.
MAN Truck & Bus profite de toutes les occasions pour appeler au développement rapide d’un réseau de recharge adapté aux poids lourds électriques : « L’objectif est de 30 000 points de recharge MCS en Europe d’ici 2030, dont environ 4 000 en Allemagne ». La mise en service de ce chargeur est un moyen de faire presser le pas des décideurs politiques.
C’est dans cette optique que le PDG Alexander Vlaskamp a appelé : « Les camions électriques sont disponibles, la recharge en mégawatts fonctionne. Nous avons maintenant besoin de signaux clairs pour instaurer la confiance avec nos clients en faveur de l’électrification. Nous devons maintenant construire et faire évoluer l’infrastructure rapidement ».
Le constructeur allemand n’est pas isolé dans ce combat. Il fait aussi partie d’un consortium avec Scania, Daimler Truck, Volvo Trucks et Renault Trucks pour développer la recharge à haute puissance sur ou a proximité des autoroutes et des plateformes logistiques. Tout comme MAN Truck & Bus, Scania dépend du groupe Traton. Cette autre marque de poids lourds a déjà réalisé en mai 2023 avec ABB E-mobility ses propres essais de recharge MCS.
MAN Truck & Bus a raison d’insister dès maintenant sur le développement du réseau de recharge MCS avant même que la norme soit reconnue. Car il doit être préparé plusieurs années à l’avance du fait des infrastructures électriques à prévoir et du foncier difficile à trouver sur les autoroutes.
C’est pourquoi, avec toutes les marques qui produisent aujourd’hui déjà des camions électriques en Europe dont Iveco que nous n’avons pas encore cité, l’allemande a participé à un travail qui montre l’urgence de la situation. Intitulée « Electrification de la mobilité lourde longue distance : Besoins et enjeux de la recharge en itinérance », l’étude de 31 pages également portée par Enedis, TotalEnergies et Vinci Autoroutes a chiffré les besoins pour mailler les autoroute françaises.
Globalement, 519 aires devront être équipées à horizon 2035. Des configurations minimales ont été imaginées. Ainsi, une aire de services compterait 5 points rapides de recharge (puissance de 620 kW en 2025 et 800 kW en 2030) et 18 lents (100 kW). Les aires de repos offriraient 27 points lents. Les 50 sites les plus sollicités bénéficieraient d’une meilleure dotation : 14 points rapides + 58 points lents.
Pour ces trois modèles, en tenant compte des capacités de stockage, la puissance totale des stations serait respectivement de 2,5, 2,1 et 8 MW.
À lire aussiCamions électriques : les transports de marchandises thermiques, c’est bientôt fini ?En 2035, le réseau autoroutier français serait alors riche de 12 000 points de recharge et capable de distribuer de l’ordre de 3,5 TWh d’énergie à l’année. En pic, l’appel de puissance pourrait s’élever jusque 1,1 GW pour les seuls poids lourds. Pour cette échéance, l’étude chiffre à 2,98 GW cette crête pour les voitures particulières et utilitaires légers. Avec toutefois une bonne surprise : des courbes qui ne s’ajoutent pas mais se complètent.
Pourquoi ? Parce que les besoins en recharge des poids lourds sont concentrés dans la semaine, mais davantage le week-end pour les véhicules légers. D’où l’idée de mutualiser les ressources permettant de circonscrire les pics d’appel de puissance à 3,2 GW au lieu de 4,08 (1,1 + 2,98) pour l’ensemble des VE. En revanche la consommation totale s’additionnerait : 5,4 TWh (3,5 + 1,9).
Comme bénéfice supplémentaire, cette mutualisation permettrait de limiter à 630 millions d’euros d’ici 2035 les investissements nécessaires au niveau du réseau électrique pour renforcer ou créer 56 postes sources. Une enveloppe qui s’entend hors budgets pour les stations de recharge elles-mêmes et l’aménagement des aires.
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