Pour démontrer la pertinence des évolutions apportées sur la nouvelle Taycan, Porsche nous a proposé d’effectuer un trajet entre Stuttgart et Istanbul, soit 2 184 km en deux jours. Mission accomplie aussi vite qu’avec une routière thermique malgré de petits « bugs ». 

À première vue, le roadtrip organisé par Porsche semblait audacieux : traverser l’Europe d’ouest en est pour rallier le siège de la marque à Stuttgart en Allemagne et le centre d’Istanbul en Turquie en deux jours avec la dernière évolution de la Taycan 100 % électrique. Selon le planificateur de GoogleMaps, ce trajet nécessite 22 heures sans s’arrêter. Mais qu’en est-il avec une voiture électrique ? Si la plupart des pays de l’Union européenne disposent désormais d’un réseau de recharge rapide suffisamment étendu, les infrastructures existantes en Serbie, en Bulgarie et en Turquie ne sont pas aussi développées. Il nous a d’ailleurs été conseillé de télécharger des applications spécifiques pour pouvoir nous connecter aux réseaux de recharge de ces trois pays.

Break de chasse sans émission

Pour mettre toutes les chances de notre côté, Porsche a mis à notre disposition la dernière évolution de la Taycan dans sa version break Sport Turismo propulsion avec la grosse batterie de 104,9 kWh (soit 97 kWh utiles). Un modèle revendiquant jusqu’à 650 km d’autonomie selon les normes WLTP, mais aussi une puissance de charge très élevée de 320 kW permettant de faire un plein à 80 % en moins de 20 min sur un chargeur en courant continu (DC). Cette version d’essai intègre également le chargeur embarqué de 22 kW pour limiter au maximum le temps de charge sur des bornes en courant alternatif (AC). Autre bon point, nous partagions notre voiture avec le YouTubeur américain Kyle Conner, de la chaine Out Of Spec Reviews. Un grand spécialiste des voitures électriques qui réalise souvent de grands trajets à travers le monde.

Dévoreuse de kW

Dès notre départ depuis le musée Porsche de Zuffenhausen (dans la banlieue nord de Stuttgart), nous décidons d’opter pour le mode de conduite Range afin de limiter la consommation. Même si notre modèle est le moins puissant, il développe tout de même 435 ch et revendique pas moins de 2 195 kg sur la balance. En outre, nous disposons de jantes de 20 pouces (contre 19 pouces de série) chaussées de pneus sportifs Michelin Pilot Sport 4. À la différence de la première génération de Taycan, le mode Range n’est plus limité à 140 km/h et conserve de bonnes performances à l’accélération. L’utilisation du régulateur de vitesse actif permet également d’optimiser la consommation en évitant d’appuyer top-fort sur le champignon.

Nous sommes d’ailleurs agréablement surpris de constater que notre Porsche Taycan ne consomme pas plus de 22,5 kWh/100 km sur une autoroute allemande illimitée où nous évoluons autour de 140 km/h tout en faisant des pointes à plus de 200 km/h. Une sobriété liée à une meilleure gestion de son moteur arrière, mais aussi à son aérodynamique optimisée et ses suspensions pneumatiques de série qui rabaissent la garde au sol en mode Range. Après 382 km réalisés en 3 h 47, l’ordinateur de bord indique 20,3 kWh/100 km de consommation moyenne et encore 73 km d’autonomie.

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Nous nous arrêtons à un chargeur rapide à Salzburg, en Autriche, capable de délivrer 400 kW. Notre Taycan dévoile alors son incroyable capacité de recharge en affichant plus de 310 kW en début de charge et se maintient au-dessus de 200 kW jusqu’à 80 % de batterie. Un arrêt de 10 minutes suffit donc pour rallier le prochain chargeur rapide en Slovénie situé à environ 350 km. « C’est un monstre » s’exclame notre confrère américain impressionné par la vitesse de charge de cette nouvelle Taycan. En respectant les limitations de vitesse slovènes sur autoroute (130 km/h), la consommation tombe à 19,3 kWh/100 km et nous arrivons à ce deuxième point de recharge avec 13 % de batterie.

Notre Taycan dont la batterie a été préchauffée à l’avance aspire alors les kW comme un chien ronge ses os. Arrivée à plus de 90 % de batterie, elle continue d’afficher 55 kW alors que le pauvre Subaru Solterra sur la borne d’à côté n’avale pas plus de 52 kW à 45 % de batterie. Rappelons que sur des bornes ultra-rapides en courant continu (DC) comme celles-ci, « le remplissage » s’effectue comme une bouteille d’eau et nécessite donc de réduire la pression à la fin pour éviter le débordement (ou la dégradation des cellules sur une batterie). Mais le bolide allemand conserve le robinet bien ouvert quand le SUV japonais joue les cafetières.

Une courte nuit à Belgrade

Mon coéquipier Kyle prend le relais et décide de faire le plein pour rallier Belgrade d’une traite. Les applications indiquent qu’en Serbie, la plupart des chargeurs ne délivrent pas plus de 60 kW. Kyle redémarre avec 95 % de batterie, l’ordinateur de bord indique 464 km d’autonomie pour une distance de 449 km à parcourir. Cela laisse peu de marge et le planificateur indique -47 % à l’arrivée. Il s’agit en fait d’un « bug » que Kyle résout rapidement en effectuant un « reset » avec une pression des deux doigts dans le coin droit de l’écran. Une procédure évidente pour un habitué de ces smartphones roulants. Une fois « rebooté », le planificateur nous annonce une arrivée à Belgrade avec 4 % de batterie.

En revanche, le régulateur de vitesse refuse toujours de fonctionner depuis que Kyle a pris le volant. Rien de bien surprenant pour notre confrère américain de 27 ans qui teste toutes les voitures électriques depuis sept ans. Pour bien faire, il faudrait couper le contact plus de 10 minutes pour faire un « reset hardware ». Mais il faut avancer, d’autant que la frontière serbe est bien embouteillée. Après tout, ces bugs classiques sur des modèles de présérie n’empêchent pas de rouler. Nous arrivons finalement à l’hôtel de Belgrade à 21 h 10 avec 2 % de batterie en roulant normalement. Le troisième ravitaillement sur du courant alternatif (AC) s’effectuera durant la nuit en un peu moins de 5 h dans le parking de l’hôtel qui intègre des bornes de 22 kW.

Départ de Belgrade à 7 h du matin en direction de Sofia, la capitale de la Bulgarie située à 422 km. Une distance que notre Porsche électrique peut effectuer d’une traite sur autoroute en respectant les limitations de vitesses qui oscillent entre 120 et 140 km/h. La nuit a aussi été salvatrice pour le régulateur de vitesse actif qui fonctionne de nouveau. Nous ne bénéficions cependant pas de l’aide au maintien de voie qui figure dans le long catalogue des options.

Cela étant, le confort et l’agrément de conduite figurent au sommet des grandes routières de luxe. Même sans vitrage acoustique (en option aussi), les bruits d’air se font discrets jusqu’à 140 km/h. La sellerie au dossier dur procure néanmoins un bon maintien et se double d’un amortissement pneumatique très efficace qui peut être sublimé par le nouveau système Porsche Active Ride (en option bien sûr). La puissance de freinage, la tenue de cap et la précision de la direction font référence. Oubliez les bugs et les écrans. Regardez la route, prenez le volant à deux mains. Vous êtes dans une Porsche, pas dans un iPhone roulant !

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Six arrêts pour rejoindre l’Orient

Notre quatrième arrêt pour recharger se trouve à proximité de Sofia, sur le parking d’un étonnant restaurant dans le plus pur style américain baptisé Route 80. Nous devons partager l’unique chargeur de 150 kW avec nos confrères polonais et turcs. Cela fait donc 75 kW pour chacune des voitures. Pas très rapide, mais mieux que rien. Pas besoin de carte pour lancer la charge, il suffit d’utiliser l’excellente application FINES qui recense les bornes locales et vous fournit des informations détaillées sur votre charge. Nous récupérons seulement 28 kWh (moyennant 10 €) en 22 min, soit de quoi faire environ 140 km et rejoindre une autre borne Fine plus puissante située à 132 km.

Pour la trouver, pas évident, bien qu’elle soit localisée à la sortie de l’autoroute dans le village de Gelemenovo. Elle se cache en fait sous un arbre, dans un champ, au bout d’un petit chemin qui semble privatif. Mais elle est bien là, rutilante, ne demandant qu’à distribuer ses 250 kW. Sur la même durée que la précédente borne, soit 22 min, notre Porsche biberonne 75 kWh, soit de quoi faire 350 km pour seulement 27 €. De quoi rejoindre la frontière turque où il faudra expliquer ce que viennent faire un Américain et un Français dans une Porsche en plaques allemandes.

Une fois les formalités réglées, nous rejoignons le Supercharger d’Edirne qui compte six bornes de 250 kW. La Porsche Taycan ne peut pas tirer à plus de 124 kW, mais cela suffit pour faire l’appoint avant de rejoindre la « wonderful » ville d’Istanbul, autrefois baptisée Byzance et Constantinople. Le carrefour entre l’Occident et l’Orient qui mêle subtilement tradition et modernité, comme notre Porsche sans pot d’échappement. Dernier regard sur le compteur. 26 h 57 au volant, 2 183,5 km à 83 km/h de moyenne pour 21,1 kWh/100 km de consommation moyenne. Très raisonnable pour une voiture de Grand Tourisme capable d’avaler 450 km d’autoroute avec d’excellentes performances.

Le tarif de 129 000 € pour notre configuration Sport Turismo avec sa grosse batterie et sa sublime couleur Provence semble plus délicat à digérer. Mais l’absence de malus écologique et le plafond d’amortissement de 30 000 € accordés sur les voitures électriques pour les entreprises atténuent grandement la douloureuse. Des avantages fiscaux dont ne bénéficient pas les Turcs lourdement taxés sur les voitures de luxe importées. Ce qui n’empêche pas d’écouler environ 400 exemplaires de Porsche Taycan par an contre 700 en France.

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