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Le bonus semble encore important pour soutenir les ventes de voitures électriques. Mais est-ce une aide qui profite désormais plus aux constructeurs qu’aux conducteurs ?
Le bonus écologique va évoluer en 2024. En plus des critères de poids et de prix, ce coup de pouce dépendra d’un score environnemental, calculé à partir de l’empreinte carbone de la production et du transport du véhicule électrique. Les règles définitives ont été actées par un arrêté publié fin septembre au Journal Officiel.
Un arrêté plein de chiffres, de méthodes de calcul, de conditions… Bref, une sacrée usine à gaz qui risque de donner du fil à retordre aux marques, qui doivent remplir des dossiers complets pour que cet éco-score soit déterminé. Mais les constructeurs peuvent se satisfaire d’une chose : il y a toujours un bonus écologique. Mieux, le gouvernement a laissé entendre que les ménages modestes seraient davantage aidés en 2024. Il n’a toutefois pas donné de montant, alors que ceux-ci touchent déjà jusqu’à 7.000 € cette année, contre 6.000 € en 2022.
Pourtant, fin 2019, et on l’a quasiment oublié, l’Etat avait commencé à entamer une sortie progressive du bonus écologique, en annonçant une baisse régulière du bonus maximal chaque année. Le calendrier évoqué à ce moment là prévoyait ainsi 5.000 € max en 2021, 4.000 € en 2022. Cela aurait pu donc être 3.000 € cette année et 2.000 € l’année prochaine ! A l’époque, le ministère de la transition écologique mettait en avant une baisse progressive des prix des électriques grâce à leur démocratisation. Et donc un besoin moindre de les aider, comme il n’existe plus de bonus écologique sur les modèles hybrides.
Quelques mois après cette annonce, le Covid a tout bousculé. Suite à la première fermeture imposée des concessions, le gouvernement a pris la direction opposée en renforçant le bonus, afin d’accélérer la reprise du marché. Puis un autre bouleversement a remis en cause la baisse des aides : la flambée des prix des carburants. Pour Emmanuel Macron, une parade au carburant trop cher, dont il ne baissera pas les taxes, est de passer à l’électrique. Il y a aussi l’argument écologique.
L’idée de sortir progressivement du bonus écologique s’est donc éloignée. Du moins pour les véhicules les plus populaires, car il y a quand même eu une fin progressive du bonus sur les modèles les plus onéreux, en excluant les véhicules de plus de 60.000 €, puis ceux de plus de 47.000 €.
Pour le reste, pas touche au bonus. Et les acheteurs en ont besoin. La preuve avec les résultats d’un sondage que l’on a lancé sur notre page Youtube il y a quelques semaines. A la question « l’éligibilité d’un modèle au bonus écologique est-elle un critère important lorsque vous achetez une voiture électrique », la réponse est sans appel : oui à 85 % (avec plus de 6200 votes).
Pour une majorité de Français, l’aide de l’Etat reste incontournable pour passer à la voiture électrique. On peut y voir une récompense pour le bien de la planète. Mais, plus simplement, il est évidemment question d’un coup de pouce pour faire baisser le prix d’une technologie qui reste onéreuse et demande encore un surcoût important face au thermique. Le marché de la voiture électrique s’est bien développé (une voiture vendue sur six est électrique en France), mais les prix avant les aides sont toujours très élevés.
D’autant que la crise du covid puis la guerre en Ukraine ont engendré une flambée des coûts de production. Si cette flambée n’épargne aucun type de motorisation, elle n’a pas aidé à rendre les électriques plus accessibles, le prix des batteries ayant aussi fortement augmenté. La situation commence toutefois à se détendre, Renault l’a mis en évidence pour faire baisser le prix des Clio et Arkana. Mais pas encore des électriques. Et d’ailleurs, en dehors d’acteurs qui jouent les trouble fêtes, comme Tesla, les prix des électriques ne baissent toujours pas.
On se demande toutefois s’ils ne sont pas maintenus artificiellement hauts par le bonus. Il ne fait aucun doute que les constructeurs savent que leurs véhicules profitent de cette aide. Et que c’est donc au moins 5.000 € du prix qui est pris en charge par l’état français. Forcément, cela peut inciter à rajouter 5.000 € au prix réel du véhicule ! Cet effet a pu être constaté dans divers domaines, dès qu’une aide de l’Etat est mise en place. Cela avait par exemple été le cas avec le photovoltaïque.
À lire aussiMarché automobile : la Dacia Spring explose les compteurs de ventes, la MG4 double le Model YPar exemple, le fait que la nouvelle Citroën C3 électrique, lancée en 2024, coûte plus de 12.000 € de moins que sa cousine l’Opel Corsa Electric pose question ! Mais soyons clairs et honnêtes, il n’y a pas de preuve et aucun constructeur ne dira si cela se passe ainsi ! On pourra quand même le voir en 2024 avec les modèles qui vont perdre le bonus, comme la Dacia Spring ou la MG4. Il y a des chances que le prix de départ hors bonus baisse pour limiter la casse. Et on pensera alors que le prix aurait pu diminuer avant donc !
Certains suggèrent d’ailleurs que mettre fin au bonus permettrait d’y voir plus clair et d’inciter les constructeurs à annoncer le « vrai » prix de leurs modèles, d’autant que les clients ont parfois du mal à s’y retrouver entre des offres qui ne prennent pas en compte les mêmes aides. Il sera évidemment intéressant de regarder la courbe des ventes des modèles privés de bonus par l’éco-score, et voir s’ils peuvent se vendre sans l’aide du gouvernement.
Un autre aspect est l’effet important de seuil, avec cette limite à 47.000 €. Ce qui peut être à la défaveur du client. Par exemple, quand le seuil a augmenté de 45.000 à 47.000 € en 2022, le gouvernement s’adaptant à l’inflation, Volkswagen avait augmenté le prix de l’ID.3 de quelques centaines d’euros pour profiter de cette marge.
Mais on voit surtout en ce moment un côté positifif de l’effet de seuil. La limite de 47.000 € pousse des marques à être dessous pour avoir le bonus, extrêmement incitatif à l’achat. Et favorise les efforts pour avoir des propositions intéressantes. En début d’année, Tesla baissait le prix du Model Y Propulsion de 49.990 à 46.990 € pour le faire entrer dans la zone bonus. Plusieurs concurrents ont donc réagi en ajustant leurs offres. Mercedes a mis en place un EQA Edition à 46.950 €, un modèle qui annonce 553 km d’autonomie. Ford, Skoda et Hyundai ont lancé de grosses remises sur les Mustang Mach-E, Enyaq et Ioniq 5 pour leur faire atteindre la zone bonus.
Clairement, le seuil a un double effet très intéressant sur des modèles électriques familiaux, avec de bonnes autonomies. Les marques sont incitées à baisser les prix ou pratiquer des remises, et le client profite ensuite du bonus. Les modèles sont ainsi à des prix semblables aux thermiques.
D’ailleurs, sous notre sondage, de nombreux internautes confirment qu’ils n’auraient pas pu passer à l’électrique sans le bonus qui permet de réduire la note. Le débat commence toutefois à porter sur l’intérêt de le verser à tous, et donc à des ménages aisés qui ont les moyens de passer à l’électrique sans aide. On est loin d’une suppression totale du bonus, mais le réserver petit à petit aux plus modestes semble être une prochaine étape. Pour le gouvernement, ce sera aussi un moyen de réduire la note d’une aide qui pèse maintenant très lourd dans les finances.
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